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  • De Dunkerque à Vlieland, de Hadewijch à Hafid

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    Lettres néerlandaises :

    impressions d’un lecteur français

     

     

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    Petite incursion dans ma bibliothèque : Histoire de la littérature flamande (A. Snellaert, 1849), De la littérature néerlandaise à ses différentes époques (J.A. Alberdingk Thijm, 1854), La Vie littéraire de Marnix de Sainte-Aldegonde et son « Tableau des Differends de la Religion » (G. Oosterhof, 1909), La Littérature flamande contemporaine (A. de Ridder, 1923), Conrad Busken Huet et la littérature française (J. Tielrooy, 1923),  Bilderdijk et la France (J. Smit, 1929), Le Réveil littéraire en Hollande et le naturalisme français (1880-1900) (J. de Graaf, 1938), Panorama de la littérature hollandaise contemporaine (J. Tielrooy, 1938), Les Sœurs Loveling (H. Piette, 1942),lettres néerlandaises,traduction littéraire,flandre,pays-bas,édition  Alluvions et nuages. Courants et figures de la littérature hollandaise contemporaine (A. Romein-Verschoor, 1947), La Littérature belge de langue néerlandaise (K. Jonckheere, 1958), La Littérature néerlandaise (P. Brachin, 1962), Jan Slauerhoff (1898-1936). L’homme et l’œuvre (J. Fessard, 1964), Vondel et la France (W. Thys, 1988), la volumineuse – plus de 900 pages – Histoire de la littérature néerlandaise (réd. H. Stouten, J. Goedegebuure & F. van Oostrom, 1999), L’œil de l’eau. Notes sur douze écrivains des Pays-Bas (J. Beaudry, 2002)…

    lettres néerlandaises, traduction littéraire, Flandre, Pays-Bas, éditionJe m’abstiens de mentionner les anthologies disponibles en langue française comme la traduction d’œuvres majeures ou totalement oubliées. D’énumérer les revues qui ont tenu une chronique sur les lettres néerlandaises, contiennent des contributions sur Multatuli, Hella. S. Haasse ou Paul van Ostaijen, présentent en traduction des poèmes de Lucebert, Peter Holvoet-Hanssen ou Onno Koster, de la prose de Hafid Bouazza, de Jan Arends ou encore de Hugo Claus. Ces publications se comptent par centaines. Certes, beaucoup parmi celles de l’ère anté-informatique s’empoussièrent dans de rares bibliothèques ou chez tel bouquiniste de Béziers ou d’Anvers, mais il suffit de passer en revue la bibliographie établie en 1999 par J. Verbij-Schillings pour constater que nombre de productions du XXe siècle et d’un plus lointain passé ont été traduites, certaines avec maestria, et qu’avec un peu de ténacité, un néophyte de langue française peut se forger une assez bonne idée des lettres néerlandaises sans avoir forcément accès aux textes originaux. Si l’on attend toujours une traduction de certaines œuvres en prose (les Nederlandsche Historien de P.C Hooft, Van de koele meren des doods de F. van Eeden, Het ivoren aapje de Herman Teirlinck, des romans et nouvelles de F. Bordewijk, J. van Oudshoorn, Willy Spillebeen, Eenzaam avontuur de Anna Blaman, De Zondvloed de Jeroen Brouwers, Dubbelspel de F.M. Arion, de nouvelles traduction des romans de Louis Paul Boon et de Maurice Gilliams… sans oublier la grand classique de la littérature jeunesse Jip en Janneke) et de celle de poètes majeurs (M. Nijhoff, G. Achterberg, Jan van Nijlen…), de plus en plus d’auteurs contemporains, voire des « classiques » du proche passé (le Max Havelaar de Multatuli, une grande partie de l’œuvre de Hugo Claus, les deux romans les plus connus de W.F. Hermans, quelques titres de Gerard Reve, Simon Vestdijk, J. Slauerhoff, les premiers recueils de Lucebert…) sont aujourd’hui offerts à la curiosité des lecteurs et donnentlettres néerlandaises,traduction littéraire,flandre,pays-bas,édition parfois lieu à une chronique radiophonique circonstanciée ou à des recensions élogieuses (certes il y a aussi des critiques littéraires tout aussi peu scrupuleux que la mère d’Alfred Issendorf – le personnage central de Nooit meer slapen –, ainsi que le prouve l’article paru dans un magazine spécialisé à propos justement du roman Ne plus jamais dormir, traduction de ce même Nooit meer slapen). Dans la sphère francophone, la littérature néerlandaise demeure donc une terre totalement inexplorée uniquement pour ceux qui ne prennent pas la peine d’ouvrir les livres en vente chez les bouquinistes ou publiés depuis un certain temps par des éditeurs ayant pignon sur rue (Actes Sud, Gallimard, Le Seuil, Albin Michel, Héloïse d’Ormesson, Belfond, L’Âge d’homme, Le Castor Astral, Bourgois…).

    lettres néerlandaises, traduction littéraire, Flandre, Pays-Bas, éditionAutrement dit, de nombreux efforts ont été faits pour mettre en valeur tant des auteurs flamands que des auteurs néerlandais, certains ayant d’ailleurs eu l’honneur de collections plus ou moins prestigieuses. Ainsi, à la fin du XIXe siècle, « La Nouvelle Bibliothèque Populaire », dans des fascicules à la portée de presque toutes les bourses et très largement diffusés, a accordé, parmi un total de 500 auteurs français et étrangers présentés dans une notice biographique et littéraire souvent bien documentée, une place à une œuvre de J.J. Cremer, Alberdingk Thijm, Hildebrand, Bilderdijk, Conrad Busken-Huet, Erasme et de Joost van de Vondel. Plus près de nous, la célèbre série des « Poètes d’aujourd’hui » éditée par Pierre Seghers – maison qui avait déjà donné en 1954 Par-delà les chemins d’Adriaan Roland Holst – a pu consacrer un volume à Guido Gezelle et un autre à Karel Jonckheere. Celle dirigée par Claude Michel Cluny aux éditions La Différence a proposé dans les années 1990 une anthologie Cobra ainsi qu’un large choix de la poésie des Flamands Karel van de Woestijne et Leonard Nolens.

    lettres néerlandaises,traduction littéraire,flandre,pays-bas,éditionSi je tiens à relever la présence de toute ces publications, c’est pour corriger un peu l’image que beaucoup se font et qui était d’ailleurs la mienne voici un quart de siècle lorsque la littérature néerlandaise n’était encore pour moi qu’une terrae incognitae. Comme beaucoup de Français, j’ignorais jusqu’au nom de Multatuli, n’avais jamais entendu parler de Vondel ni de Willem Frederik Hermans. L’outil Internet n’existant pas encore, je n’avais pu prendre connaissance, à 1000 kilomètres de la Flandre, de l’abondance des textes disponibles en langue française. Certes, à plus d’une occasion, la découverte palpitante d’un ouvrage d’occasion ne tardait pas à se traduire par un certain désappointement : la médiocre transposition ne m’encourageait guère à lire les auteurs flamands ou bataves dans une autre langue que la leur.

    lettres néerlandaises,traduction littéraire,flandre,pays-bas,éditionL’énumération du premier paragraphe se veut en quelque sorte un hommage aux histoires de la littérature, non tant à celles parues en français, qu’à celles de Jonckbloet, Te Winkel, Knuvelder, Anbeek ou encore aux ouvrages collectifs Twee eeuwen literatuurgeschiedenis et Nederlandse Literatuur, een geschiedenis. Un hommage aussi aux découvreurs et éditeurs de textes médiévaux et aux biographes. Les épais volumes de Wim Hazeu, Hedwig Speliers, Gé Vaartjes, Frédéric Bastet, Harry G.M. Prick, Jan Fontijn, Michel van der Plas, Marco Daane et de bien d’autres sont autant de voyages au long cours au fil desquels il nous est loisible de faire escale, le temps de reprendre en main un ouvrage de Vestdijk, de Frederik van Eeden, de Richard Minne, de Louis Couperus…

     

    lettres néerlandaises,traduction littéraire,flandre,pays-bas,éditionSans certains de ces volumes, qui présentent chacun ses qualités et ses défauts, il n’est guère possible à un étranger d’explorer en profondeur l’exotique terre des lettres néerlandaises : « dat is een land waar je nergens vaste rots onder je voeten hebt ! » dirait le professeur Nummedal. Car il s’agit bien, lorsqu’on découvre, en partant de zéro, une littérature étrangère, d’une expérience de l’exotisme au sens que donne à ce terme Victor Segalen. Parallèlement à cette exploration se constituent des îlots au gré des lectures des œuvres littéraires elles-mêmes. Des îlots : l’œuvre ou une partie de l’œuvre d’un auteur donné, plus rarement les meilleurs fruits d’un courant littéraire.

    Si le hasard, la curiosité sont pour beaucoup dans ces découvertes et dans la création progressive d’un « canon » personnel, un livre offert, un simple conseil peuvent aussi favoriser l’engouement pour un auteur donné. À cela, il convient d’ajouter, en ce qui me concerne, une manie : les chemins de traverse. Le désir de lire nombre d’œuvres a en effet été éveillé et continue de l’être par des « intermédiaires », des « passeurs », en particulier des lettrés francophiles qui m’entraînent dans leur sillage à travers leur perception de leur propre culture et de la culture française, autrement dit des auteurs qui ont fait une démarche similaire à la mienne mais dans le sens inverse. Ainsi, c’est toujours un régal de parcourir des auteurs comme Frans Erens, W.G.C. Byvanck, Alexander Cohen, J. Tielrooy, André de Ridder et d’autres dont le nom ne me vient pas immédiatement à l’esprit… Les écrivains d’expression française qui permettent d’entrer dans l’univers néerlandophone sont encore trop rares, mais ils existent. lettres néerlandaises, traduction littéraire, Flandre, Pays-Bas, éditionAu XIXe siècle, un Alphonse Esquiros et un Xavier Marmier ont évoqué les figures de Bilderdijk, d’Isaac da Costa, de Nicolaas Beets ou de Jacob van Lennep. À notre époque, le poète Jean-Claude Pirotte nous invite en Gueldre, rend hommage à Eddy du Perron. Le natif de Dunkerque Claude-Henri Rocquet offre un retour sur la vie et l’œuvre de Ruusbroec. Empruntant les pas d’un des romanciers français majeurs, à savoir Jean Giono, nous nous immisçons dans l’atelier de l’un de ses confrères, pacifiste comme lui, auteur qui lui apparaît comme un « chimiste de la joie » : « Je ne connais pas Antoon Coolen. C’est actuellement le seul homme que je voudrais connaître. […] Dans ce livre, tout est à la même profondeur. Je veux dire qu’il y a accord parfait entre la tragédie et le plus minuscule détail. […] Le ton d’une voix, la veste d’un villageois, le cochon qui lettres néerlandaises, traduction littéraire, Flandre, Pays-Bas, éditionfouille la boue, le couvent de la charité, et même les gendarmes, tout est d’accord. Je ne dirai par que c’est le grand talent d’Antoon Coolen ; c’est plus. C’est plus important que du talent. C’est qu’il est l’expression même de la profondeur à laquelle se passe le drame. Il est l’homme exact. Il est l’enfant du monde. » Une préface comme celle donnée en 1936 par Giono à l’édition française (Grasset) du roman de Coolen De goede moordenaar – dont est tirée cette citation – peut faire bien plus que des pages érudites ou des discours savants pour favoriser la reconnaissance d’un écrivain hollandais en France ; ce n’est pas un hasard si Le Bon assassin a été réédité à Paris en 1995, recueillant des éloges dans le quotidien français le plus en vue. André Gide a signé pour sa part la préface du premier roman néerlandais paru en traduction aux éditions Gallimard, Zuyderzée (1938) de son ami Jef Last : « Last est moins un romancier qu’un poète ; où, si l’on veut, c’est un romancier à la manière de Knut Hamsun. » Trop rares aussi les Xavier Hanotte, romancier wallon qui a donné de belles traductions de Hubert Lampo, Doeschka Meijsing, Walter van den Broeck, Ward Ruyslinck, Maarten ’t Hart, Willem Elsschot… Les traducteurs font eux aussi partie de ces passeurs qui attirent notre attention sur un livre donné tout en nous incitant à revenir à l’original. Parmi ceslettres néerlandaises,traduction littéraire,flandre,pays-bas,édition devanciers, il y a par exemple l’homme de lettre néerlandais d’expression française, Auguste Clavareau qui a laissé d’innombrables transpositions de poésies (De Hollandsche Natie de J.F. Helmers, De overwintering der Hollanders op Nova Zembla de H. Tollens, Kleine gedichten voor kinderen de H. van Alphen…). Et plus récemment Philippe Noble qui, depuis Le Pays d’origine (Gallimard, 1980, préface d’André Malraux) a donné ses lettres de noblesse à la traduction des créations néerlandaises (Eddy du Perron, Cees Nooteboom, Harry Mulisch, Etty Hillesum, J. Bernlef…).

     

  • Xavier Marmier, lettres et gens de lettres de Hollande (3)

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    Lettres sur la Hollande : littérature Moyen Âge – XVIIIe siècle

    (suite de « Poésie populaire de la Hollande »... )

     

     

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    Cette littérature médiévale, nous dit Xavier Marmier dans le chapitre qu’il consacre à « l’Ancienne Littérature » (chap. IV, p. 135-175) de ses Lettres sur la Hollande, « a beaucoup imité et peu inventé [1] », la domination bourguignonne n’a fait qu’aggraver la situation. « Toute l’ancienne littérature de la Hollande se compose d’imitations ou de traductions [2] », ajoute-t-il un peu plus loin. Il évoque à ce propos le Flamand Jacob van Maerlant (vers 1235 – vers 1300) et Melis Stoke (actif au début XIVe siècle à la cour des comtes de Hollande) auquel on attribue la version définitive de la Rijmkroniek van Holland (366-1305), l’une des premières œuvres historiographiques en néerlandais. On ne peut guère reprocher à Marmier une vue aussi courte. En 1840, la littérature médiévale demeurait un champ d’études très peu exploré. Quelques philologues commençaient à peine à redécouvrir des textes et à les éditer. Ainsi, on ne cernait pas encore la dimension du minnesanger limbourgeois du XIIe siècle Hendrik van Veldeke. Quant à l’œuvre de Hadewijch d’Anvers, poète mystique majeure de l’Europe occidentale, elle venait tout juste d’être exhumée par Franz Joseph Mone sans que l’on soit d’ailleurs encore en mesure de l’attribuer à un auteur donné [3]. On sait que Marmier a eu entre les mains l’ouvrage de ce philologue allemand [4]. Pour ce qui est de la littérature mystique des plats pays, qui est d’une richesse considérable, le Franc-Comtois aurait tout de même pu s’arrêter sur Jan van Ruusbroec (1293-1381), Geert (Gérard) Grote (1340-1384), figure majeure de la Dévotion moderne dont une bonne partie de l’œuvre est rédigée en moyen néerlandais, ou encore sur Thomas a Kempis (vers 1380-1471) qui a lui aussi laissé quelques traités en moyen néerlandais (Cleyn Alphabet et Een merkelike Leringe) et dont l’Imitation de Jésus-Christ puise à des sources hollandaises [5]; au lieu de cela, il préfère s’en tenir, comme dans son article de 1836, à l’intérêt que présentent à ses yeux les poésies populaires, en particulier religieuses, naïves pour la plupart, reprenant l’intégralité de sa version française [6] de « La Fille du Sultan ». Et s’il cite quelques vers [7] de Zuster Bertken (vers 1426-1514), considérée aujourd’hui comme l’une des grandes plumes de son temps, c’est de façon anecdotique. Quant aux chants et traditions profanes qui, pour beaucoup, célèbrent l’amour, il en donne quelques traductions (dont un chant qui s’intitule « Trois jeunes filles »), et résume la légende « Les Pains de pierre » devant figurer dans un recueil que prépare le poète Adrianus Bogaers (1795-1870), l’un des rares amis hollandais de Marmier.

    Adrianus Bogaers

    xavier marmier,histoire littéraire,traduction,lettres sur la hollande,vendel,cats,moyen âge,siècle d'orPour ce qui est du Moyen Âge, Xavier Marmier relève tout de même deux œuvres originales : Karel ende Elegast (Elegast et Charlemagne) – qui présente le riche et puissant Charlemagne en voleur de grands chemins – ainsi que Van den vos Reynaerde (le Roman de Renard), bien différent des versions que l’on connaît ailleurs, composé de deux livres écrits à un siècle de distance, le deuxième bien moins original que le premier qui, selon Grimm, est le meilleur poème du Moyen Âge après la Divine Comédie. De ces deux œuvres, se basant sur des éditions récentes, il cite des passages, en résume l’intrigue. De la seconde, empreinte d’une couleur toute flamande, il offre une analyse. Dernière remarque : le Franc-Comtois explique l’absence des sylphes et des fées, de contes fabuleux et de légendes populaires dans la littérature hollandaise par la topographie et la géographie, le Hollandais étant après tout l’unique magicien d’une terre qu’il a lui-même façonnée. 

    L’évocation de la « Littérature moderne » (chap. V, p. 176-235) s’ouvre sur l’omniprésence de la poésie dans les mœurs bataves : « Je ne connais pas de pays où l’on ait autant mesuré d’hémistiches et façonné de rimes », « tout le monde rime », tant les riches que les pauvres, les citadins que les ruraux [8]. Les Hollandais récitent des vers dans leurs conversations, des rimes ornent l’entrée de bien des bâtiments, des monuments, etc. Ce qui fait dire à Marmier : « La Hollande est l’un des pays les plus poétiques qui existent au monde [9] ». Cependant, il ne tarde pas à nuancer son propos : « Mais la rime, si musicale qu’elle soit, ne constitue pas la poésie, et le poème le plus élégant, le plus correct, peut bien n’être qu’une œuvre de labeur et de patience dénuée de verve et d’inspiration. Or, tel est souvent le cas en Hollande. [10]» Le mode de vie, fondé sur la patience, fait que « l’organisation sociale de la Hollande, la tendance pratique des esprits, tendance qui se manifeste déjà dans les plus anciennes annales de cette contrée, n’étaient pas de nature à donner un grand essor à l’imagination des poètes. [11] »

    Suit un historique, non dénué d’humour, des chambres de rhétoriques, autrement dit des sociétés littéraires qui pullulèrent à la Renaissance, marquant une rupture avec les œuvres « de sentiment, d’originalité, de candeur » du passé [12]. Elles sont caractéristiques de la bourgeoisie des petites et grandes villes hollandaises, mais aussi flamandes, et peuvent toutes se prévaloir d’un nom, d’un blason, d’une devise, d’un porte-enseigne, d’un procureur fiscal (sorte de greffier), de grades littéraires et de certains privilèges. « Le but des chambres de rhétorique hollandaises et flamandes était, comme nous l’avons déjà dit, de travailler au progrès de la langue et de la poésie ; mais leur tendance était, à vrai dire, plus morale encore que littéraire. [13] » Pour illustrer l’activité de ces cénacles, le voyageur s’arrête, en en citant des passages en traduction, sur un drame joué au sein de l’une de ces confréries au XVIe siècle : L’Enlèvement de Proserpine par Pluton. Reprenant un passage traduit en français d’un historien hollandais [14], il évoque une réunion entre chambres de rhétorique, au cours de laquelle on se livrait à un combat poétique. Les guerres du XVIe siècle portèrent un coup pour ainsi dire fatal à ces sociétés littéraires, même si elles subsistent d’une certaine façon, vers 1840, sous la forme de clubs de lecture. Leurs productions, nous assure Marmier, ont été médiocres, et leurs activités n’ont pu empêcher l’influence du français ainsi qu’une passion pour l’Antiquité qui incita beaucoup d’auteurs à écrire en latin (des poèmes de qualité) et à s’inventer un nom latin [15].

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    Dirck Volckertszoon Coornhert

     

    Le XVIe siècle aura tout de même eu en Dick Coornhert (1522-1590), catholique très critique s’étant fait un devoir de dénoncer tout ce qui attentait à la liberté de penser, un fervent défenseur du néerlandais. En grande partie grâce à son action, « la Hollande avait du moins les deux éléments essentiels de sa philologie, la grammaire et le dictionnaire [16] ». Le Franc-Comtois ne juge pas opportun de mentionner le calviniste convaincu Philippe Marnix de Sainte-Aldegonde (1540-1598), homme d’État d’origine savoyarde, qui a laissé des œuvres en français, en latin et en néerlandais, qu’admirera l’homme politique anticlérical Edgard Quinet. La plus célèbre demeure De biëncorf der h. roomsche kercke (La Ruche de la sainte Église catholique, 1569), un pamphlet parodique dirigé contre l’adversaire religieux [17]. Marmier garde de même le silence sur l’Anversoise Anna Bijns (1493-1575) dont la piété aurait dû l’attirer, à moins qu’il ne l’ait jugée trop teintée de drôlerie et de sarcasme [18]. Il se trouve que ces deux auteurs de grande valeur figurent dans la Batavian Anthology de John Bowring, de même d’ailleurs que les autres écrivains de premier plan dont Marmier ne nous dit mot.

    Dans le XVIIe siècle si fécond et si riche, la littérature prit enfin son essor, annonce Marmier qui s’arrête cependant uniquement sur les trois auteurs que mettra également en avant l’anthologie d’Édouard Rod à la fin du XIXe siècle. P. C. Hooft (1581-1647) donna la première pièce qui mérite le nom de tragédie (Geeraerdt van Velsen, 1613) [19]. Bien qu’il reconnaisse la valeur et les mérites de cet auteur, en particulier en tant qu’historien (Nederlandsche historien, 1642) ayant pris Tacite comme modèle, Marmier, lui qui n'a pourtant pas craché sur les plaisirs de la chair, ne peut s’empêcher de jouer au moralisateur : « Il publia en outre des poésies fugitives, des chansons érotiques qui eurent un grand succès, et qui sont passées de mode avec le mauvais goût qui les inspira. [20] »

    Vondel, par Ph. Koninck, 1665

    xavier marmier,histoire littéraire,traduction,lettres sur la hollande,vendel,cats,moyen âge,siècle d'orCependant, Joost van den Vondel (1587-1679) avait plus de génie poétique et de goût [21]. Nombre de ses pièces prennent leur sujet dans la Bible, Lucifer (1654) étant « son chef-d’œuvre » : « Cette pièce ne peut certes être comparée au Paradis perdu, ni pour la hardiesse de l’invention, ni pour la hauteur des pensées, ni pour la pompe du récit et la fraîcheur des descriptions ; mais, en le plaçant au-dessous de l’épo

  • Aperçu des lettres hollandaises (1879)

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    La littérature hollandaise,

    appendice de la littérature allemande

     

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    Voici le premier texte d’une série de publications anciennes en langue française donnant un aperçu historique de la littérature néerlandaise. Relevons que son auteur, L.-E. Hallberg, aurait pu éviter certaines erreurs en choisissant des sources plus sûres déjà disponibles à l’époque, par exemple les contributions publiées en français par J.A. Alberdingk Thijm ou Alphonse Esquiros. De même, on aurait pu attendre un jugement un peu plus nuancé ; d’autres auteurs n’avaient-ils pas émis avant lui un jugement moins timoré : « Fort étendue en comparaison de la grandeur du pays, la littérature hollandaise représente dignement la vie morale et le développement intellectuel d’un peuple riche de souvenirs, de savoir et de fidélité à son propre caractère. Sa langue est un dialecte de bas-allemand, épuré par une longue culture et fixé enfin par les travaux de grammairiens savants, à la tête desquels il faut nommer Sigenbeeck. Elle possède l’avantage d’une grande facilité d’expression, due à l’emploi des mots racines dont elle fait un grand usage, mais qui tend peut-être aujourd’hui à s’exagérer. Dans ses formes littéraires on pourrait remarquer une phraséologie un peu solennelle, produite peut être par l’influence du latin, et qui conduirait à l’enflure quand le sujet manquerait d’élévation. En revanche elle possède une foule de tournures naïves et gracieuses, tirées de son propre fonds, et qui permettent à l’écrivain d’être familier sans bassesse.

    C’est l’histoire qui a donné à la Hollande ses prosateurs classiques, Hooft qui s’est modelé sur Tacite, et Simon Styl qu’on peut comparer à Salluste. Un ouvrage plus volumineux, l’histoire de la patrie par Wagenaar, doit plutôt sa célébrité à l’étendue des recherches et à l’exactitude de la narration qu’à un grand mérite littéraire. La science et la critique historique caractérisent également, une foule d’autres écrits consacrés à l’éclaircissement des souvenirs nationaux, et ç’a été là pour les savants hollandais une source d’études inépuisables.

    Parmi les poètes, il faut d’abord citer Cats, conteur, qui tient de la finesse de Marot et de la bonhomie de La Fontaine. Son vieux style offre la langue du peuple dans sa grâce familière, tandis que Vondel, son contemporain, fait parler un langage noble et lyrique à la tragédie encore au berceau (1630). C’est à ce dernier que l’admiration publique assigne la supériorité de génie sur tous ses successeurs : cependant le talent d’écrivain semble porté à une perfection plus savante et plus soutenue chez Tollens, dont le chef-d’œuvre est un poème sur l’hivernement des Hollandais, la Nouvelle-Zemble. Au-dessous de lui par l’élégance et la correction, mais non par la chaleur, Helmers chante aussi sa patrie avec un noble enthousiasme.

    Une nouvelle série de poètes s’ouvre dans les temps modernes avec Feith dont le talent lyrique est d’un ordre élevé. Nous ne pouvons pas indiquer ici plusieurs autres noms qui viennent à la suite du sien mais le plus justement célèbre est celui de Bilderdyck, dont la fécondité rappelle celle de Voltaire et à qui l’esprit et l’imagination ne font jamais défaut dans cette longue suite de productions diverses. Son ouvrage est une histoire du pays, compilation assez curieuse par la nouveauté des opinions qu’il y soutient, mais où règne l’esprit de paradoxe.

    À côté de ces littérateurs qui emploient l’idiome national, la Hollande compte aussi une foule de poètes et de prosateurs latins trop remarquables pour être passés sous silence. Elle avait eu autrefois le moine Thomas à Kempis, auteur aujourd’hui bien avéré de l’Imitation du Christ. Erasme, Janus Donsa, Grotius (qui excellait aussi à manier la langue nationale), tiennent la première place parmi ces adorateurs de l’Antiquité qui en firent renaître les grâces et le génie au moment où les littératures modernes sortaient peine de l’enfance » (Encyclopédie du dix-neuvième siècle : répertoire universel des sciences, des lettres et des arts, avec la biographie de tous les hommes célèbres, T. 14, 1852, p. 108-109).

    CouvHallberg1.jpgNé dans le grand duché de Bade, Louis-Eugène Hallberg (1839-1921) était issu d’une famille protestante d’origine suédoise ; il sera baptisé catholique à sa naissance. Fils d’un universitaire ayant émigré en France, il deviendra lui-même professeur de littérature étrangère à la Faculté des Lettres de Dijon avant d’aller enseigner à Toulouse. Grand connaisseur de la littérature allemande, sur laquelle il a écrit nombre d’études, il publia, sous le nom de H. Grimm, une collection d’auteurs allemands classiques, et traduisit le Laocoon de Lessing (ainsi que des Morceaux choisis de Platon, 1871).

    Son Histoire des littératures étrangères, nous dit un de ses confrères de l’Académie des Jeux Floraux de Toulouse, est un « manuel, très plein d’idées et de faits, de biographies, d’analyses, de chronologies, utile à posséder et à lire et à consulter, plus maniable et plus dense sous sa forme scolaire que celui d’Heinrich, antérieur à celui de Bossert ». Malheureusement, il « n’a pas été répandu comme il devait l’être. Deux volumes, entièrement composés, de littérature italienne et espagnole, sont restés inédits ».

    À la fin de son premier volume, l’auteur consacre un peu plus d’une vingtaine de pages à la littérature hollandaise. Les voici.

     

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  • La pétulante Flamande

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    La maîtresse flamande de Frédéric Mistral

     

     

    « L’action de la poésie est extraordinaire sur les jeunes filles !

    Et si on ne se gardait pas, quel roman ! » F. M.

     

     

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    Dans un billet consacré à Vondel, nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer Frédéric Mistral. Passons de l’homme public, invité à représenter la France aux Pays-Bas à l’occasion du troisième centenaire de la naissance du grand écrivain du Siècle d’or, à l’homme privé. C’est un ouvrage magnifique qui nous en offre l’occasion : Frédéric Mistral. Illustre et méconnu, de Gérard Baudin, félibre mainteneur depuis 2006, collectionneur de tout ce qui touche à cette figure provençale majeure et fondateur du Conservatoire documentaire et culturel Frédéric Mistral. Publié cette année aux HC éditions, ce livre - dont la couverture reproduit un portrait réalisé par Nadar - propose un retour sur la vie du poète de Maillane à travers des centaines de documents iconographiques (en noir et blanc et en couleur). Le texte savoureux et fourmillant de détails s’arrête assez longuement sur les amours mistraliennes, un chapitre pas toujours exploré par les biographes du Don Juan Mistral. Gérard Baudin passe en revue les femmes qui ont occupé une place dans le cœur ou dans l’esprit du père du Tresor dóu Felibrige, nous donnant à lire des extraits de sa correspondance : « Ma belle amie répondit à mes lettres volcaniques par une très gentille proposition de mariage. » Ou, à propos d’une fille de boucher qu’on lui propose d’épouser : « […] la profession du beau-père nous fournira le motif d’armes superbes à savoir : un sanglier de gueules ravageant l’or MadameLoynes.pngd’un champ de blé… et puis quelque panégyriste pourra me comparer un jour au troubadour Bertrand de Marseille, qui aima et chanta Porcelette des Porcelets. » Mais point de mariage encore : « […] au diable les chastes épouses qui châtrent l’imagination de leurs maris poètes, vive les belles maîtresses… » Au sujet d’une jeune femme qui a la moitié de son âge et qui l’invite à la rejoindre alors qu’ils ne se sont jamais vus : « Je pars pour Uriage, moins pour prendre les eaux que pour me faire prendre… c’est toute une histoire… » En 1894, à propos d’une autre : « L’action de la poésie est extraordinaire sur les jeunes filles ! Et si on ne se gardait pas, quel roman ! »

    Jeanne Detourbey (détail, 1862), dont Mistral fut amoureux

    Parmi ces femmes qui ont séduit le séducteur, il y eut une servante de son père, qui lui a donné un fils – enfant que Frédéric ne reconnaîtra pas et dont l’une des arrière-petites-filles est la comédienne Andréa Ferréol –, Louise Colet et une certaine Marie Meersmans (Bruxelles, 1820 - Paris, 1903), dite Estelle de Moolle, dite la grande Thérèse, dite comtesse de Sainte Marcelle, « Flamande au teint de lait », fille naturelle et courtisane qui a tenu un salon littéraire à Paris, connue aussi pour avoir été la maîtresse de Gambetta et celle de Mistral. Comme dans nombre de cas, c’est la femme qui a fait le premier pas en adressant une lettre au poète. Ils se rencontrent à Lyon, se reverront à Paris, même après qu’il eut épousé la jeune Bourguignonne Marie Rivière (« La fillette n’est pas précisément jolie, mais elle est éminemment gracieuse, distinguée et intelligente, une vraie nòvio de poète… », écrit-il à propos de sa future). La seule fois où Marie Meersmans fera le voyage dans son entier de Paris à Maillane, ce sera dans son cercueil : elle a demandé à être inhumée dans le cimetière du village de Mistral, son ami auquel elle a légué sa fortune et ses papiers. Elle repose à quelques mètres du tombeau du prix Nobel.

     

    L’Intermédiaire des chercheurs et curieux, 30/11/1934, p. 862Mistral3.png

     

    Un caractère bien trempé que cette Flamande ainsi que le prouvent quelques passages des lettres - semble-t-il retrouvées entre-temps - qu’elle adressait à son « professeur de provençal » : « Ta femme, Marie, elle est laide, je le sais, très bas-bleu, comme tu dois rire d’une femme qui voudrait te captiver avec la poésie… » Et : « Quant aux fillettes dont tu me parles pour me faire jalouse, je t’assure, cela me laisse bien calme : je te sais trop friand de propreté, de frais parfums, d’ongles propres : toi, avec tes belles mains blanches, tu ne toucherais pas avec un vif plaisir les restes des garçons d’écurie qui se lavent toutes les fois qu’ils tombent dans le Rhône. »

    Mistral par F.A. Clémént, 1885, détail

    portraitMistral.pngOutre les pages qui reviennent sur les principaux évènements ayant marqué l’existence de l’illustre et méconnu Provençal (« Mai de soun noum li grihet brun / Canton soulet la survivènço »), le lecteur découvrira dans ce livre un chapitre intitulé « Mistral et les arts ». Il est consacré aux innombrables effigies du poète réalisées par des peintres, des dessinateurs, des sculpteurs, des graveurs, des médaillistes… et des caricaturistes. Un trop bref passage s’intéresse aux quatrains publicitaires qu’il a composés pour vanter les mérites de certains produits et aux réclames qui ont utilisé son nom ou les titres et hé- roïnes de ses œuvres.

    Heureuses amoureuses de l’œuvre mistralienne qui pou- vaient, dans les années qua- rante et cinquante du siècle passé, porter des parfums baptisés Calendal et Îles d’Or, vendus dans des flacons signés Lalique.

     

     

    Le mot de l’éditeur

     

    couvMistral2.pngIl aurait pu devenir notaire, avocat, magistrat, député, ministre peut-être. Mais ne supportant pas de voir sa langue maternelle reléguée au rang de patois, Frédéric Mistral préfère se faire poète. Mieux encore ! Il fait vœu de restaurer son idiome par la poésie, se faisant l’apôtre des pays d’Oc. De tous les grands écrivains et poètes, il est le seul au monde qui, par la poésie chantant sa province et composée dans sa langue régionale répudiée par les écoles de France, ait été couronné du prix Nobel de Littérature. Au fil des ans, si le nom du Mistral survit, le souvenir de son œuvre s’estompe. Les écoles ont depuis longtemps évincé ses écrits. Pour cause : ses poèmes et sa prose, dont toute la sève coule de sa langue maternelle, sont exagérément rangés sur les étagères des langues minoritaires, du folklore. Aussi, chaque citation, chaque article, chaque ouvrage nouveau s’élève en barricade contre l’oubli de sa mémoire, contre l’oubli d’une langue, contre l’oubli tout simplement.

    MistralRhone.pngLors des commémorations du centenaire de la naissance de Frédéric Mistral, en 1930, on pouvait lire dans un grand quotidien : « Il y a trop de Français qui ne savent pas que le nom de Mistral peut être prononcé comme celui d’Homère, comme celui de Virgile, comme celui de Goethe…Tous les Français devraient “connaître Mistral”, qui ne fut pas un poète provençal ; qui est un poète universel, qui est un poète de la grandeur, de la fierté, de la noblesse, de l’émotion la plus haute, de l’expression la plus pure... »

     

     

    Envoulen-nous, Nerto ma bello !

    Tu, sus moun cor que reboumbello,

    Tu, touto miéno dins mi bras,

    Acò’s plus dous que l’ipoucras !  

    (F. Mistral, « La Nonne », Nerto)

      

     

    Exposition Frédéric Mistral - Nïmes, 2009

     

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  • Deshima, n° 3

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    RENDEZ-VOUS MANQUÉS ?

     

    Histoires de rendez-vous manqués, le numéro 3 de la revue thématique annuelle Deshima vient de paraître. Il présente, en près de 500 pages, un épais dossier sur l’anthropologue et linguiste J.P.B. Josselin de Jong, un autre (en grande partie en langue anglaise) sur l’Extrême-Orient vu par des scientifiques allemands et scandinaves à l’époque de la VOC (dont un article sur l’île de Deshima !), quelques articles sur Calvin et le calvinisme, deux nouvelles et des poèmes d’auteurs néerlandais en traduction française, un essai sur le romancier W.F. Hermans et, pour finir, une escapade sous les rafales bataves.

     

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    Table des matières

     

    Avant-propos                  Thomas Beaufils (p. 5)

     

    Dossier : J.P.B. de Josselin de Jong

    Biographie de J.P. B. de Josselin de long (p. 11)

    Discours de Claude Lévi-Strauss (prononcé lors de la remise du prix Erasme 1973) (p. 13)

    Thomas Beaufils, « Tache aveugle ». L’absence d’un contrepoint visuel a-t-elle été fatale au « structuralisme » hollandais ? (p. 21)

    Nicoletta Diasio,Au grand air. L’écriture photographique de Claude Lévi-Strauss, contrepoint visuel du structuralisme (p. 47)

    Kirsten Beukenkamp, Entre décolonisation et démocratisation de l’université : Quelle place pour une anthropologie des mondes contemporains aux Pays-Bas ? (p. 67)

    Jean-Baptiste Beaufils, Rêve et culture chez J. P. B. De Josselin de long (p. 81)

     

    Choix d'articles de J. P. B. de Josselin de jong

    Les danses des Piegans (p. 105)

    Histoire de la linguistique (p. 131)

    Types culturels et phases culturelles (p. 163)

    L’archipel malais, un champ d’étude ethnologique (p. 189)

    Manifeste (p. 209)

    Un peuple en devenir (p. 213)

    Les Indes de Meijer Ranneft (p. 219)

    Culture et rêve (p. 239)

    De l’ethnolinguistique (p. 255)

     

    Les pays du Nord et l’Extrême-Orient

    Thomas Mohnike, L’Europe du Nord et l’Extrême-Orient au temps de la VOC. Quelques remarques introductives (p. 275)

    Susanne Friedrich, Gottorf et ses collections d’histoire naturelle provenant des Indes orientales. Objets et « savoir» des non-spécialistes (p. 285)

    Stefan Ehrenpreis, Germans in the VOC : scribal communication, patronage and family relations (p. 303)

    Martin Krieger, The Dutch Beginnings of the Danish intro-Asiatic trade (p. 311)

    Wolfgang Behschnitt, The Dutch East lndia Company in a Swedish perspective. The 1667-edition of Nils Matson Kiöping’s and Olof Eriksson Willmans travel accounts (p. 321)

    Peter Rietbergen, Japon and Europe ca 1800: the pivotal role of Deshima (p. 337)

    Carl Jung, An Exchange of ldeas: C.P. Thunberg’s Encounter with the Scholars of Western Studies in Japon (p. 359)

     

    Savants mélanges

    Spiros Macris, Le calvinisme hollandais et la mécanique des consciences (p. 379)

    Spiros Macris, Un pamphlet différé. Vondel : Op de Ionghste Hollantsche Transformatie (p. 393)

    Anonyme, La prédestination. Extrait des Canons du Synode de Dordrecht (p. 399)

    Guillaume Groen van Prinsterer, La Hollande et l’influence de Calvin (p. 405)

     

    Lettres néerlandaises

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    Willem Frederik Hermans fumant une Gauloise

    4ème du recueil de nouvelles De laatste roker

     

    Vonne van der Meer, L’adieu à Phœbé (p. 423)

    Willem ]an Otten, Chronique d’un fils qui devient père (p. 433)

    Willem Jan Otten, BW-PLO (poème) (p. 450)

    Gerry van der Linden, Poèmes (p. 451)

    Raymond J. Benders, Solitude, ma mère (essai sur W.F. Hermans) (p. 465)

     

    Au fil du vent du nord

    Gilles Fumey, Moulins et vélos aux Pays-Bas : quand le vent est dans la roue (p. 481)

    Auteurs (p. 489)

    Résumés (p. 491)

     

    Résumés (sauf textes traduits et textes anciens)

     

    Thomas Beaufils, So many things left to do... the forgotten texts of J.P.B. de Josselin de Jong

    Through a closer observation, Dutch’s anthropologists are not very interested in the works of J.P.B. de Josselin de Jong. Of course, we can read a series of articles on the famous FAS (Field of anthropological study), the concept developed by JPB in his well-known inaugural discourse: “The Malay Archipelago as a field of ethnological study”. Meanwhile, by J.P.B.’s death, in a memoriam which dated back to 1965, anthropologist Van Baal found hard to find the qualities of our researcher: “What did this man have, so that he were able to assure such influence? It’s not his life, nor his works”. To Lévi-Strauss, the Dutch have done everything to denigrate their own research’s’ results. At the French’s side, we have been participating in an embellishment process to emphasize the works of Lévi-Strauss, which naturally finish by gaining the entire merit. At the same time, the works of J.P.B. are also as prominent. But there is still so much to do to revalorise and to embellish these works and also to make it more accessible to publics. JPB’s family owns documents (photos, letters) which researchers obtain piece hy piece. Unpublished manuscripts await to be published one day. This article focuses on the necessity of giving lights on his life on the study fields. So that one day he will gain the place he merits. 

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    J.P.B. Josselin de Jong, portrait reproduit dans la revue Deshima

     

    Nicoletta Diasio, “In the open air”. Photography by Claude Lévi-Strauss, a visual counterpoint of the structuralism

    The pictures realized by Lévi-Strauss during the expeditions in Brazil (1935-1939), reveal some implicit tensions in all the work of the author: the oscillation between scientific rigorous concern and passion for the artistic creation, the report of the rational and the sensitive as means of knowledge, the imperative of the distance and the implicitly reflexive dimension. His photographic style weaves between the fascination for the « savage », the nostalgia of the fugitive and the wish to give a body, a face and a concrete presence to the ethnographic subjects. It discloses the change of paradigm in the fieldwork during the 30s.

     

    Kirsten Beukenkamp, Between decolonization and democratization of university: Where to place the anthropology of the contemporary world in the Netherlands?

    Dutch anthropology is strongly related to the national colonial history in which it finds its origins and to empiricism in comparison to theoretical frameworks. Anthropology of the contemporary world seems, as it questions these elements, not to have found its place in the Netherlands yet. These elements are equally present at local level. By looking at the positions and work of the Utrecht University anthropologists and the preparation of my own master research, the article tries to understand the present-day definition and meaning of Dutch anthropology as well as the new possibilities a contemporary anthropology could offer.

     

    Jean-Baptiste Beaufils, “Culture and dream” of J.P.B. de Josselin de Jong

    In his 1946 conference, Culture and dream, De Josselin de Jong seeks to establish the individual / culture report from the unconscious point of view. To this end, he questions the anthropological theories, very fashionable at the time, using Freudian theory of latent and manifest contents of the dream. But he severely criticised and rejected them when they try a junction between individual and culture by using the concept of the prevalence of symbolism in the dream. Actually, unbeknownst to him, these criticisms recur the real thought of Freud: the theory of the interpretation by the symbol is really to attribute to Jung. Well, Freud separated from Jung for the most part for that point. For his part, De Josselin de Jong concluded that it was not the approach that was absurd, but the concepts used. So, it was necessary to suspend to find the solution. My researches in development of the book De la colonisation de l’esprit allowed me to notice that further to De Josselin de Jong, Lacan and Lévi-Strauss, each constructed a piece of the solution. On the one hand, a model of the dynamics of language in the performances of an individual through the transformations in his individual myth in the cure (diagram double mirror). On the other hand, in the culture, by the myth and its dynamic in the collective, universalized by the canonical formula of myths. It appears that a culture in potential is direct