Hella Haasse (1918-2011) (19/10/2011)
La Chasse aux étoiles
La plupart des livres de Hella S. Haasse ont été traduits en français par Anne-Marie de Both-Diez et par Annie Kroon (Actes Sud & Le Seuil).
Images de Hella Haasse
Hommage (en néerlandais)
Entretien (en néerlandais) avec Hella S. Haasse
Entre votre premier roman historique consacré à Charles d'Orléans, En la forêt de longue attente, et La Récalcitrante qui relate les aventures conjugales de Charlotte-Sophie Bentinck, mariée en 1733, cinquante ans se sont écoulés...
H.H. Et ma façon d'écrire a radicalement changé. En la forêt de longue attente est un roman traditionnel, linéaire, écrit avec force détails dans la tradition du XIXe siècle. Or, l'expérience de la vie, la perception que nous en avons, est bien plus composite, imbriquée, faite de strates successives. J'ai donc changé ma manière pour La Ville écarlate et Un goût d'amandes amères. Le récit est composé comme un puzzle, le lecteur progresse par associations, et c'est à partir des éléments distribués dans le texte qu'il appréhende le tout.
Ce qui a changé également, c'est votre manière d'utiliser les documents...
H.H. Je suis de plus en plus fascinée par les archives et la possibilité qu'elles offrent de savoir exactement ce que pensaient les gens, la manière dont ils s'exprimaient, le fait qu'ils racontent d'eux-mêmes à travers leur correspondance ou un journal intime ce que fut leur propre vie. La Récalcitrante et Les Seigneurs du thé sont basés sur des documents authentiques que je livre tels quels, car je trouve bien plus intéressant de donner leur point de vue plutôt que le mien.
En ce sens, le romancier ne va-t-il pas plus loin que l'historien ?
H.H. Certainement, car il ose, à partir des faits historiques dont il dispose, élaborer, interpréter, supputer et supposer telle relation ou telle motivation chez un personnage. J'ai l'impression que le romancier travaille comme un détective doté d'un sens assez sûr de la psychologie.
D'où vous vient ce goût pour l'Histoire ?
H.H. De mes premières lectures peut-être. Je lis depuis l'âge de cinq ans. J'aimais les contes d'Andersen, ceux des Mille et une nuits, les histoires de Jules Verne. Jeune fille, je lisais dans la langue originale les romans historiques de Walter Scott et de Victor Hugo. Mon père me permettait de lire tout ce que je souhaitais, je pouvais puiser librement dans la biblio- thèque... (...) La question de l'autofiction ou de la fiction relève d'un choix personnel qui ne porte en soi aucune valeur. Peut-on jamais dire la vérité sur soi-même ? N'est-on pas, tou- jours et quoi qu'il arrive, une fiction pour soi ? Ne suffit-il pas de commencer à écrire sur soi pour savoir im- médiatement que c'est une autre sorte de vérité qui surgira ? Ce qui compte, c'est le style, la quête d'un style et le fait qu'un récit éveille ou non chez le lecteur le désir de descendre en soi comme le fit l'écrivain.
Extrait de l'entretien de l'auteur avec Catherine Argand (Lire, 01/03/2003)
Un goût d'amandes amères, le roman que Hella Haasse considérait comme le plus abouti
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