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littÉrature - Page 29

  • Demain, dès l’aube

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    HUGO EN NEÉRLANDAIS

     

     

    Le célèbre poème de Victor Hugo

    lu en néerlandais et dit en français

     

     

    Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,

    Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.

    J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.

    Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

     

    Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,

    Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,

    Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,

    Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

     

    Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,

    Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,

    Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe

    Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

     

     

    CouvParijsRetour.jpg

    Bart Van Loo est un auteur flamand francophile ; il écrit sur les lettres et la cuisine françaises : ici. Son prochain livre, qui paraîtra début 2010, porte sur le sexe et l’érotisme dans la littérature. Un de ses faits d’armes : à Amsterdam, il a porté avec Le Clézio une grosse valise pleine de livres de romanciers français en traduction néerlandai- se. Quelques pages de Paris aller-retour en français : PDF

     

     

    Dans la vidéo ci-dessous, Bart Van Loo nous montre (1' 20 mn) les deux lettres de Victor Hugo à Camille Berru retrouvées récemment par Steven Van Impe, conservateur de la bibliothèque Henri Conscience d’Anvers. L’histoire de cette découverte racontée en français : ICI


     

     

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  • Cees Nooteboom

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    CEES NOOTEBOOM EN QUELQUES MOTS & VIDEOS

     

    en français

     

    en espagnol

     

    en néerlandais

     

     

    Nooteboom sur le site de l'INA

    BarrotNoteboom.jpg

     

    Cees Nooteboom en bref : ICI & ICI ou encore ICI

     

     

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  • Le Slalom soft

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    LE NOUVEAU RECUEIL

    DU POÈTE FLAMAND Paul BOGAERT

     

     

    À travers 29 séquences réparties en 5 volets (précédés ou non d’un argument), le Slalom soft nous entraîne sur les toboggans d’un centre de loisirs aquatique ou encore sous une immense cloche de verre qui abrite un système écologique fermé.

    CouvSlalomSoft.jpg

     

    LA QUATRIÈME

    L’Année du Bouillon. Au bureau, l’atmosphère est tendue. On doit inventer des noms alors que la climatisation ne marche pas comme elle le devrait. Au paradis aquatique règnent effervescence et enthousiasme, en particulier dans les toboggans. Jusqu’au moment où le maître-nageur rencontre des problèmes. Des noyés et des coachs personnels l’interrogent. Il tente de se concentrer. Mais le niveau a baissé. Le mal est fait.

    Dans le Slalom soft, Paul Bogaert se focalise sur le travailleur qualifié qui s’active dans sa cloche de verre surchauffée ; dès qu’on l’appelle pour un excrément, il se précipite de-ci de-là « selon la grotesque chorégraphie à la longue épuisette ».

     

    En fonctionnaire, quelqu’un viendra me cueillir

    comme sur l’écran d’une série.

    On sera bien surpris

    de me voir en sortir gommé.

    Abstraction faite de cela (revoilà ce gland, licencie-le)

    j’entends une sirène,

    le gyrophare caresse les façades sans doute

    comme l’autre fois, tu te souviens, il s’agissait de faire évacuer

    Le Je sais Tout.

     

    Long poème d’un tenant, le Slalom soft se laisse scinder en courtes unités avant de se reformer en un ensemble qui risque à tout moment de se rompre sous vos pieds.

     

    CouvSlalomSoft.jpg

     

    UN POÈME

     

     

    Tu mens puis filtres

     

    Tu mens puis filtres

    l’accessoire, le commentes

    l’humectes le tires le tends

    et dans l’évocation des faits bien entendu le tisonnes.

    Accessoire qui

    rond et sensible aux majuscules

    traîne alors dans les conclusions comme s’il

    exploitait ce hotspot in.

     

    Ou bien tu mens puis tombes dans l’habituel

    dans l’explication bouche bée

    dans le laborieux flip-flap que l’on voit trop souvent.

     

     

    le poème en langue originale

    Je liegt en je filtert...

     

     

    L’AUTEUR

     

    Paul Bogaert est né en 1968. En 1996 paraît son premier recueil, WELCOME HYGIENE. Tracassé par un état de surconscience, le poète porte sur lui-même et les autres un regard qui engendre une impression d’étrangeté.

    CirculaireSystemenBogaert.jpgOn retrouve ces attitudes mentales et sensorielles exacerbées dans le recueil Circulaire systemen (Systè- mes circulaires, 2002) : Paul Bogaert y explore la fascination qu’il éprouve pour tout ce qui est rotatif. Le système circulaire fermé procure une impression de sécurité, mais aussi de malaise. L’auteur crée, sur un ton pseudo-scientifique, des sortes de machines langa- gières poétiques qui opposent le quotidien au systématique.

    Après avoir publié AUB (SVP) en 2006, Paul Bogaert a signé l’essai Verwondingen (Blessures, Centre de Poésie, Gand, 2008) dans lequel il explore les secrets de la poésie en analysant la chanson serbe retenue pour le concours de l’Eurovision en 2007. Son éditeur Meulenhoff/Manteau vient de faire paraître le Slalom soft, son quatrième recueil.

    En une dizaine d’années, Bogaert s’est affirmé comme l’une des voix les plus remarquables de la poésie flamande. Le site de l’auteur propose quelques poèmes des différents recueils en traduction française.

     

     

    des poèmes du slalom soft ont paru dans une traduction de Paul Bogaert & Daniel Cunin dans la revue Deshima, d'autres paraîtront dans Action poétique, décembre 2010 ; une dizaine ont été imprimés dans une plaquette Poètes de Flandre - Paul Bogaert

     

  • Le voyage vers l'enfant

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    L'ENFANT ET LE VIEIL HOMME

    Troisième roman de Vonne van der Meer en traduction française (éditions Héloïse d’Ormesson). Non pas le dernier volet de la trilogie de l’île frisonne – ça viendra peut-être –, mais une histoire dérangeante qui nous emmène sur les traces de Julia, femme prête à tout pour adopter un enfant.

    CouvVoyageVonne.jpg

    LE MOT DE L’EDITEUR

    Quand Julia aperçoit un siège enfant sur une bicyclette, son désir de maternité s’affirme et elle rêve d’un bébé avec Max, son mari. Or le couple ne peut pas avoir d’enfant. Dans l’espoir d’adopter, ils décident alors de partir au Pérou, où ils iront de surprises en défaites. Et rencontreront Pablo qui, loin d’être le nourrisson tant espéré, changera leur vie à jamais.

    Vonne van der Meer nous éblouit par son écriture limpide qui cerne les craquelures du quotidien. Son histoire forte et juste déborde d’émotions.

     

    EXTRAIT

    Dans l’appartement d’en face, la femme était en train d’entreposer sur son balcon les gâteaux qu’elle venait de cuire. Bientôt, quand le soir tomberait, son mari rentrerait du travail, garant sa voiture au coin de la rue avant d’en soulever le capot. Il ne se mettrait pas, à l’inverse de ce que Julia avait cru la première fois, à bricoler son moteur mais étendrait dessus une bâche. Sur cette bâche, il poserait les gâteaux préparés par sa femme ; dans le coffre grand ouvert, il entreposerait des boîtes de biscuits. Si la vente ne marchait pas bien, ils mettraient tout dans la voiture et tenteraient leur chance une ou deux rues plus loin. La femme allongerait son bébé sur la banquette arrière pour qu’il dorme et ne rentrerait que lorsqu’elle aurait vendu tous les gâteaux.

    Elle empaqueta son bébé dans une pièce de tissu aux rayures vives, plus ou moins semblable à celle que Julia avait achetée à Puno. Elle fredonna la chanson qu’elle chantait toujours pour son enfant. À chaque fois, Julia captait quelques paroles : Es tu risa en tus ojos, la luz del mundo… Tu risa me hace libre…

    Julia sortit son morceau d’étoffe de l’armoire et l’étendit sur le lit. Elle roula quelques vêtements dans une serviette qu’elle posa sur le tissu. Elle s’était entrainée jusqu’à parvenir à le jeter sur son dos en un mouvement fluide. À plusieurs reprises, ayant songé que son enfant ne serait peut-être pas un bébé, elle avait alourdi le paquet avec un oreiller, ses chaussures de marche et un dictionnaire.

    Cette fois, le paquet était tellement léger qu’elle le sentait à peine dans son dos. Elle s’endormit avec lui. C’est bien plus tard – il faisait déjà nuit dehors –, alors qu’elle s’avançait vers le lavabo, quelques petites culottes à la main, qu’elle remarqua dans le miroir qu’elle le portait toujours.

     

    Lecture de Thomas Roman, Parutions.com, 24/08/2009

    « Vonne van der Meer trace cette errance à deux, en fait une véritable solitude, de main de maître. Sous sa plume, marionnette triste, Julia incarne mille itinéraires, dix-mille, des milliers ; ceux de femmes dont l’horloge biologique devient ce mécanisme grippé, déboussolé. Une fable aussi sur le besoin d’ “être avec”, et les solutions offertes par l’existence, jusqu’aux plus surprenantes. Vous lirez… Vous verrez… Une écriture sèche, blanche, dure parfois, qui convainc tout à fait. »

     

    Lecture de Jeanne Garcin, Femmes, septembre 2009

    SignetVonneVoyage.jpg« Elle est professeur de lettres classiques, lui est architecte. Max et Julia s’aiment depuis dix ans mais désespèrent  de fonder une famille. Las d’attendre que le miracle opère, le couple se lance dans l’aventure de l’adoption.

    Par le biais du jeune duo et au fil de son parcours à travers le Pérou, le périple quotidien viendra sans cesse nourrir l’épopée humaine. De découvertes en déceptions, de désillusions en espérances renouvelées, Le Voyage vers l’enfant figure avant tout l’intense expérience d’une vie. Heureuse coïncidence par ailleurs, c’est une écriture tout en rondeur et en limpidité qui sert ce chemin déployé vers la maternité. A cette féminité ambiante, Vonne van der Meer ajoute un très exigent soucis du détail. Minutieusement relatée, chaque scène évoque une manière de tableau mouvant.

    De cette prose quasi cinématographique découle une lecture éminemment visuelle : accolés les uns aux autres, les plans successifs laissent transparaître la possibilité d’un scénario. Rien d’étonnant à ce que, déjà attelé à l’adaptation sur grand écran, un cinéaste ait succombé à la séduisante intrigue. »


    Lecture de Yaël Hirsch : ici

     

    voir sur ce blog l’entretien avec l’auteur : ici


    L'auteur présentera et dédicacera son livre le jeudi 8 octobre à 19h00 à l'Institut néerlandais, 121 rue de Lille, 75007 Paris : ici

    VientdeParaître1.jpg


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  • Le Royaume interdit

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    MACAO, CAMOES

    & LA CHINE

     

     

    Après La Révolte de Guadalajara (2008),

    les éditions Circé publient un nouveau roman

    de Jan Jacob Slauerhoff,

    le plus célèbre sans doute : Le Royaume interdit.

     

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    Le mot de l’éditeur

     

    Né en Frise en 1898, poète et romancier, JAN JACOB SLAUERHOFF est l’un des grands classiques de la littérature hollandaise du vingtième siècle. Après ses études, il voyage en tant que médecin de bord, naviguant entre l’Europe et les Indes hollandaises, la Chine, le Japon, l’Amérique et l’Afrique du Sud. Souvent étiqueté comme écrivain maudit, « rebelle », « provocant », « poète de la désillusion », il exprime dans son écriture une réelle modernité, tant dans des recueils de poésies (Archipel, 1923) ou de nouvelles (Écume et cendre, 1930) que dans ses romans Le Royaume interdit (1932), La Vie sur terre (1934) et le posthume La Révolte de Guadalajara (1937). Il meurt en 1936.

    Les romans de Slauerhoff traitent de choses tout à fait ordinaires : de la recherche du bonheur, du franchissement des limites, de la soif d’aventures qui défient la fantaisie. Vers le milieu du XVIe siècle, le poète Luiz de Camões embarque à destination de l’Inde, ignorant que le Roi du Portugal veut l’exiler à Macao. C’est une époque mouvementée, une époque de conquêtes. C’est ainsi que ce voyage en mer, d’abord calme, devient une véritable aventure où l’on risque sa vie – mais ce n’est pas tout : d’étranges rêves hantent Camões, dans lesquels il ne couche pas ses vers sur le papier mais les envoie à travers l’espace. Près de 400 ans plus tard, un inconnu, opérateur radio irlandais, perd son identité. Des souvenirs étrangers se substituent aux siens, quelqu’un prend possession de lui. Un poète, dont les vers sont immortels, et une femme, dont l’amour dépasse les frontières du temps et de l’espace, se retrouvent ainsi après plusieurs siècles dans l’Empire du Milieu, le royaume interdit, qui devient pour eux le symbole d’une nouvelle liberté.

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    Extrait de la postface

    « Aux royaumes de Slauerhoff »

     

    Février 1927. Sur le Tjimanoek, bâtiment qui assure la liaison entre Java, la Chine et le Japon, le médecin de bord assiste Mme Cameiros da Silva qui accouche. Il a les plus grandes peines du monde à extraire le fœtus, mort dans le ventre de la mère. Celle-ci va tout de même survivre. Quelques mois plus tard, en juin, lors de son second séjour à Macao, ce même médecin rend visite aux époux Da Silva ; le mari, pour remercier le praticien néerlandais d’avoir sauvé sa femme, lui offre une édition des Os Lusíadas. Cinq ans après, dans les premiers numéros de Forum, revue cofondée par Eddy du Perron, voit le jour aux Pays-Bas le roman Le Royaume interdit dans lequel tant la ville de Macao que la vie en mer et l’auteur des Lusiades occupent une place primordiale.

    L’idée initiale de ce roman, le polyglotte Jan Jacob Slauerhoff (1898-1936) n’a pas attendu de lire (ou relire) Camões pour l’avoir. Entre septembre 1925 et septembre 1927, profitant de ce que les bateaux sur lesquels il servait mouillaient dans différents ports chinois ou encore à Hong-Kong et Macao – à 4 heures de distance l’une de l’autre à l’époque –, il a rassemblé des éléments qui lui serviront à composer une part essentielle de son œuvre, les poèmes, nouvelles et romans « chinois ». Ainsi, dès 1928, Macao devient le titre de l’un des cycles du recueil Oost-Azië. Certains poèmes de la plaquette française, Fleurs de marécage (1929), évoquent eux aussi, non sans nostalgie, cette ville singulière au glorieux passé, en partie éteinte, que l’écrivain préférait à la moderne Hong-Kong. En feuilletant le journal que Slauerhoff a laissé, les notes qu’il a prises au cours de différents voyages, sa correspondance ou encore des esquisses de nouvelles dont certaines remontent au tout début 1927, on relève maints passages qui figurent, sous une forme plus ou moins retravaillée, dans Le Royaume interdit. Par exemple, des éléments autobiographiques sur la traversée de Hong-Kong à Macao resurgissent dans l’évocation du radio de bord, personnage sans nom, qui embarque alors qu’il est hanté par l’esprit de Camões. Il est probable toutefois que l’édition des Os Lusíadas ait aidé Slauerhoff à préciser la place à donner au poète portugais dans son histoire.

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    En plus d’être un roman sur l’éternelle errance – c’est là, disons le d’emblée, le thème central de toutes les œuvres de celui qu’on a pu baptiser « la catastrophe errante », ce médecin incapable de se fixer sur le continent, cet amant toujours en chemin vers une autre femme, vers la même femme, à l’image du marin de la nouvelle « Larrios » du recueil Écume et cendre (1930) –, Le Royaume interdit présente la singularité de déboussoler le lecteur qui se trouve dans l’impossibilité de ranger le roman dans une catégorie précise, en raison des variations permanentes de perspective qu’il offre au plan narratif comme au plan temporel et de la dimension onirique et démoniaque de nombre de ses pages. Quiconque croit, au bout de quelques-unes d’entre elles, avoir ouvert un roman d’aventures risque de rester à quai ; de même, on est loin du roman historique, du roman psychologique, voire du roman exotique pourtant prisé à l’époque. Qui est qui ? Qui parle ? Qui écrit au juste ? Comment le grand poète portugais, banni de son pays au XVIe siècle, peut-il revenir au XXe pour tenter de se glisser dans le corps d’un banni plus ou moins volontaire ? Quel est le rapport entre ce Camões désabusé, qui a laissé des mots et des vers qui ont fait le tour du monde, et le radio de bord qui envoie pour sa part des mots codés dans les airs ? Comment expliquer tous les parallèles entre ces deux existences que séparent plusieurs siècles, l’origine sociale, la langue maternelle… ? Parallèles qui, par endroits, rapprochent les deux solitaires misanthropiques au point de les confondre – métempsychose ? –, par exemple dans la scène ou le radio de bord se retrouve devant la célèbre église São Paulo de Macao, dont ne se dresse plus que la façade :

    Vitraux élevés, porte fermée ; il fit un petit tas de pierres, se hissa sur le rebord d’une des fenêtres, se pencha et vit que derrière cette façade l’église était dévastée ; il regarda le vide pavé de pierres tombales. Des vautours se tenaient sur les vestiges de bancs. Il se laissa tomber, les oiseaux s’envolèrent, l’un d’eux passa tout près de lui, il trébucha sur un bloc de pierre puis s’étala dans une stalle vermoulue. Empêtré dans une masse de bois mou, il se débattit, la vermoulure lui bouchait les yeux et le nez. Étouffant, il parvint tout de même à se remettre sur ses jambes. Entre-temps, l’église s’était relevée, elle était pleine de silhouettes qui allaient et venaient, la plupart montaient sur des bancs entassés sous les fenêtres et, par ces ouvertures, déchargeaient de lourds mousquets. Devant l’une d’elles, un vieux moine était en train d’actionner un canon. Par intermittence, une balle sifflait dans l’église. Il se tenait près de l’autel. Un homme en bel uniforme, mais le crâne orné d’une couronne de cheveux argentés, lui remit, au nom de Dieu, un lourd fusil. Il gagna une fenêtre, laissa ses doigts aller et venir sur le canon et la platine rouillés. Des balles étaient posées sur le rebord de la fenêtre. Il regarda en contrebas le versant de la colline : des silhouettes tentaient de gagner l’endroit où était édifié l’église, et il en tombait sans cesse ; il se mit à tirer machinalement dans le tas. Son épaule encaissait le recul de l’arme, mais il n’entendait pas les coups partir ;  après quelques secondes, il voyait une flamme vaciller sur son lourd mousquet. (…)

    D. Cunin

     

    Principales sources

    sur Le Royaume interdit

     

    CouvAriePos.jpgOutre la biographie – Wim Hazeu, Slauerhoff. Een biografie, 1995 – et les quelques livres consacrés à Slauerhoff et la Chine – Arie Pos, Van verre havens. Het werk van Slauerhoff en de Chinese werkelijkheid, 1987 ; W. Blok & K. Lekkerkerker (éd.), Het China van Slauerhoff. Aantekeningen en ontwerpen voor de Cameron-romans, 1985 ; Eep Francken, Over Het verboden rijk van J. Slauerhoff, 1977 –, on peut lire en français la thèse de Louis Fessard, Jan Jacob Slauerhoff (1898-1936). L’homme et l’œuvre, Nizet, Paris, 1964 ou encore l’article de W. Blok, « Expérimentation temporelle dans le roman Het verboden rijk de J. Slauerhoff », Écriture de la religion, écriture du roman. Textes réunis par Charles Grivel. Mélanges d’histoire de la littérature et de critique offerts à Joseph Tans, Groningen/Lille, Centre Culturel Français de Groningen/Presses Universitaires de Lille, 1979, p. 123-137. La thèse récente de Hendrik Gerrit Aalders, Van ellende edel. De criticus Slauerhoff over het dichterschap (2005), fournit de nombreux éléments sur l’importance qu’ont revêtu certains poètes français pour l’écriture de Slauerhoff (Villon, Samain, Verlaine, Laforgue, Jarry, Rimbaud, Baudelaire, Segalen…). La suite de la postface revient en particulier sur le rôle fondamental qu’a joué l’œuvre de Tristan Corbière pour l’écrivain néerlandais.

     

    Voir sur ce blog Slauerhoff & Macao

    ET Slauerhoff, entre révolte et dérive

     

    Les alter échos de Jan Jacob Slauerhoff,

    par Mathieu Lindon

    « Une étrange violence, physique et intérieure, habite le Royaume interdit. Dès la deuxième page du prologue, est décrit l’affrontement de deux flottes du XVIe siècle, lorsque le Portugal œuvre à la colonisation asiatique. « La nuit, on continua de se battre à la lumière des torches ; des chaloupes armées participèrent aux combats tandis qu’une multitude de requins, ces hyènes des batailles navales, se disputaient les noyés en sang. » Cette flamboyance austère, cette cruauté sans atermoiement sont des caractéristiques de l’œuvre de Jan Jacob Slauerhoff....»

     

     

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