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peter holvoet-hanssen

  • Racine de la poésie

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    Les Carnets d’Eucharis

    2016

     

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    La récente livraison papier des Carnets d’Eucharis, la quatrième, offre, en ce printemps, dans une composition que l’on doit à Alain Fabre-Catalan et Nathalie Riera, une gerbe colorée où le présent voltige, le passé refleurit, où bien des muses sont chantées.

    Tout un bouquet de poètes à l’honneur… de l’Italie à l’Autriche, du Portugal aux Pays-Bas, des États-Unis à la Suisse, de l’Équateur à la Belgique… dans le sillage de Charles Racine (un hommage d’une trentaine de pages), ami de Paul Celan, de Jacques Dupin, mais aussi de Giacometti : « Il y a un parallèle à faire entre la manière dont Charles Racine considère la poésie, son rapport particulier au langage, et la démarche d’Alberto Giacometti dans son approche de la matière en tant que sculpteur, avec cet art de l’effacement où s’exprime le regard incisif qu’il porte sur le réel, ‘‘questionnant le proche et le lointain’’ dans la ‘‘discontinuité’’ qui en est le véritable ‘‘moyen d’approche et de saisissement’’. Aux spéculations abstraites touchant à la création, Giacometti opposait ‘‘l’intensité d’une vie entièrement possédée par la recherche de la vérité’’, ce qui ne manqua pas d’interpeler Charles Racine que l’on peut imaginer pris par ‘‘cette âpreté, cette émotion, cette évidence’’ qui se dégageait de ‘‘la geste’’ du sculpteur autant que de l’écrivain qu’il avait devant lui. »

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    Des « portraits » comme autant de miniatures d’où se dégagent en particulier des figures féminines évoquées avec tendresse et pertinence (Danielle Collobert, Sophia de Mello Breyner Andresen, Gaspara Stampa, Margherita Guidacci…) ; se profile alors, au fil d’un entretien, une esquisse d’autoportrait du poète/éditeur Claude Chambard avant celui, sur papier glacé, du cinéaste Pip Chodorov.

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    Quelques brèves proses, quelques vers en français puis, entre une « Petite anthologie d’écrits contemporains sur les arts visuels et audiovisuels » et des « Notes, Portraits & Lectures critiques », un cahier « Traductions » – qu’annoncent d’ailleurs bien plus tôt les pages consacrées à Hilde Domin – où la langue néerlandaise, grâce Gerry van der Linden et Peter Holvoet-Hanssen, occupe une belle place. Vers en version originale et en version française.

     

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    Lecture avec P. Holvoet-Hanssen, février 2016 

     

     

                      Au chevet d’une corneille blanche

     

    in memoriam Anny Hanssen, ma mère

     

    La kermesse, à Ruisedele, est à l’arrêt, aussi le vent pousse

    saint Nicolas vers l’Espagne, gélifie le ciel rose en brume

    tout s’enténèbre au-dessus de la manufacture de morts où j’écris

     

    Vois s’élever des panaches de fumée, maman gît fiévreuse

    sous la muzak qui sifflote Winchester Cathedral, maintes pensées

    pareilles à des grenades de mortier, yeah where is my mind

     

    Les gargouillis, les bip-bip, l’attente du couic – me souviens

    avoir vu des chats tomber des arbres, des morceaux humains

    rassemblés par une horde de gosses, dépêche-toi de finir

    ton poème, pas un quidam ne le lira si ce n’est toi et moi

     

    Vers perce-neige figés sur la tige de la rose, aussi ôtez

    ces gants d’examen, les masques, poussez-moi ce moniteur,

    la tension artérielle de ma mère reste bloquée sur zéro –

    je suis pas à plaindre répétait-elle sans cesser de se tordre

    de douleur – elle s’envole dans un banc de poissons qui fait des feux d’artifice

     

    Je le savais dit sa petite-fille blanche ébouriffée : cette nuit

    y avait une araignée noire sous mon lit, grosse comme une baraque

    toute vide, qui sait si y a pas une planète pour les morts

     

    La foire est dans le noir, autos tamponneuses qui tournent autour

    de la lune, près de l’ascenseur un homme qui a perdu femme et enfants

    dans les environs de Ruiselede où sournoises les étoiles brasillent

     

    Peter Holvoet-Hanssen

     

     

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  • Les porteurs

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    Un poème de Peter Holvoet-Hanssen

     

     

    Le recueil poeti d’Europa, publié cet été par l’Istituto Italiano di Cultura de Paris, offre à lire deux auteurs d’expression néerlandaise : Nachoem Wijnberg  (le poème Emprunter aux Grecs, traduction française de Kim Andringa) et Les porteurs du Flamand Peter Holvoet-Hanssen. Ce dernier va donner à l’automne un nouveau roman : Zoutkrabber Expedities et publier (en collaboration) Miavoye, un livre en hommage à Paul van Ostaijen. C’est d’ailleurs à ce poète, mort de tuberculose à 32 ans, que sont dédiés les vers qui suivent.

     

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    De dragers

      

    de kist wiegt en de wolken schouderen het licht

    dat in de velden graast, een loden hemelboog

    ‘wie sterft vervloeit als verf,’ klinkt nuchter aan Gods Toog

    ‘een vader die een voorhoofd kust, mijn vergezicht’

     

    de Grote Nar die voor de zwarte toetsen zwicht

    in ʼt Land van Music-Hall, klimop spiraalt omhoog

    en op het kruis een kraai, blikt met een mensenoog

    een moeder vindt haar kind: gedichten schreef het wicht

     

    laat schouwen roken, doof geen vuur in stervensnood

    drie duiven op het puntdak horen feestgeruis

    ‘een woordenschilder tekent met een flinke poot’

     

    diep in het bos het bronwellen en windgesuis

    de oude beuk moet wachten op het bladerrood

    en niemand niemand zingt ‘we gaan nog niet naar huis’

     

    Peter Holvoet-Hanssen, 5 juin 2014

     

     

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    P. Holvoet-Hanssen sur la tombe de Paul van Ostaijen

    (photo : Koen Broucke)

     

     

    Les porteurs

     

    le cercueil bercé et sur l’épaule de ces nuages

    la lumière qui pâture les prés, une voûte gris plomb

    « quiconque meurt se dilue comme peinture », entend-on

    au Zinc de Dieu, « un père qui embrasse un front, mon horizon »

     

    le Grand Bouffon qui cède devant les touches noires

    au Pays du Music-Hall, du lierre s’élève en hélice

    et sur ​​la croix un corbeau ouvre un œil d’homme

    une mère trouve son enfant : le moutard écrit des poèmes

     

    faites fumer les foyers, n’étouffez aucun feu à l’agonie

    trois pigeons sur le toit entendent des flonflons de bastringue

    « un peintre de plume dessine d’une main bien trempée »

     

    au fond du bois jaillissement de source susurrement de vent

    il faut au vieux hêtre attendre la rouge frondaison

    et personne ne chante personne « ne sait quand reviendra »

     

     

    traduit du néerlandais par Daniel Cunin

     

     

    Présentation du recueil, avec, entres autres, Philippe Beck & William Cliff... 

     

    … et, toujours à Paris, Peter Holvoet-Hanssen en compagnie de Laurence Vielle, Vincent Tholomé & Michel Bertier

     

     

  • Villon d'Anvers

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    Peter Holvoet-Hanssen

    pillard et pirate en poésie

     

     

    Il se réclame de François Villon, voit la poésie comme « des nuages en mouvement qui passent sur la page ».

     

     

     

    QUAND RIMBAUD TOMBE DU CIEL

     

     

    Ça nous mène où, Arthur ? Enfer ! Es-tu devenu un autre ?

    C’est vrai, même en hiver, les sources sont limpides.

    L’eau froide fortifie le cœur. Mais allez expliquer ça

    aux affaiblis de la baraque 13. Pas de soupe, pas de feu.

    La mort pareille à une truie qui se vide dans ses petits. Ici

    et non là naissent des enfants à l’étoile, poussière.

    Poussière de rien du tout. Écoutez ce chien. Aboyer vers l’autre versant.

    Écho. Aboyer après son écho. Toujours plus furieux jusqu’à

    ce que la nuit le néantise – à la flamande. On va

    se régaler, bloguer, trompeter. Ne va pas essayer, toi, de

    voir une vue plus grande, équilibre & déséquilibre.

    Gonfle-toi dignement. Comment, tu ne joues pas à ça… Rustre.

    La poésie, un concours de coloriage ? Ta boule magique explose.

    Bruxelles ou Paris ? Monte. D’autres commentaires ? Prêt ? Saute –

     

    Automne, langage l’air pâle. Nabot parle à l’oreille

    d’un poète sans parachute – tombant comme un météorite.

     

     

    Peter Holvoet-Hanssen

    traduit du néerlandais par Daniel Cunin

     

     

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    photo Het Kapersnest : Koen Broos

     

    Né à Anvers en 1960, Peter Holvoet-Hanssen n’est pas tombé de la dernière pluie : il a travaillé dans les secteurs maritime et culturel et a été gardien des dauphins du zoo d’Anvers.

    En sa qualité d’Envoyé de l’élément vif, messager de « l’élément mobile », il tente de lier des extrêmes – le haut et le bas, l’inaccessible et l’accessible, l’humour et l’émoi, la routine et la folie – aussi bien dans la forme que dans le contenu, et ce sur un sous-sol mouvant.

    Il y a plus de dix ans, Peter Holvoet-Hanssen a surpris le monde littéraire avec le recueil Dwangbuis van Houdini (La Camisole de force d’Houdini), qui lui a valu le principal prix flamand récompensant une première œuvre littéraire. Ce volume rend hommage au maître de l’évasion, le Hongrois Harry Houdini. Sur les traces de celui-ci, Holvoet-Hanssen repousse ses propres limites en se jouant des difficultés, se libère de tous les corsets, transgresse les catégories habituelles de la poésie.

    Sa façon de lire ses poèmes en public est particulièrement enthousiasmante. Il aime dépasser les bornes et braver les convenances afin de libérer l’âme de toute forme de carcan. La teneur théâtrale et musicale de l’œuvre fait que les performances du poète sont très appréciées lors des festivals et des soirées de poésie.

    Il travaille avec son épouse, l’auteur Noëlla Elpers, pour la jeunesse.

    CouvSantander.jpgwww.kapersnest.be – leur « Repaire de pirates » veut stimuler chez les jeunes l’amour de la poésie, de la littérature et de l’histoire.

    Il est à ce jour l’auteur d’un anti-roman (Le Moine volant), et de cinq recueils de poèmes. Les trois premiers (Strombolicchio. De la forge de Vulcain ; Santander. Confidences dans la peau du renard et celui mentionné plus haut) forment un triptyque, une « quête placée sous le signe du nombre trois, de la mélodie ultime réunissant à la fois bonheur et souffrance ».

    En 2008 il a reçu le Prix de la Culture de la Communauté flamande pour le recueil Spinalonga (2005). Quant à Navagio, paru en 2008, il clôt la première période de l’auteur, son premier long voyage par des mers et des îles où tempêtes et rires se percutent à souhait.

     

    Holvoet-Hanssen a par ailleurs établi une édition bilingue d’un choix de poèmes d’Arthur Rimbaud (Ik heb de zomerdageraad omarmd, Amsterdam, Bert Bakker, 1999).

     

    Traductions en français

     

    - Littérature en Flandre. 33 auteurs contemporains, Escales du Nord, Le Castor Astral, Bordeaux, 2003.

    - Ici on parle flamand & français. Une fameuse collection de poèmes belges, Francis Dannemark, Escales du Nord, Le Castor Astral, Bordeaux, 2005.

    Action poétique, n°185, Paris 2006.

    Poètes de Flandre. Peter Holvoet-Hanssen, Fonds flamand des Lettres, plaquette, s.d.

    10 poèmes pour « Quand la langue jubile », Printemps des Poètes de Namur, mars 2009 (plaquette).

     

    Spinalonga, 44 poèmes, 2005

    poésie,flandreDans la plaquette L’Europe en poésie (p.12-13) figurent deux poèmes de Peter Holvoet-Hanssen. De Cortège, il dit : « Un poème que l’on pourrait chanter à tue-tête tout en jouant du tambour ; dans le genre grotesque, idéal pour un carnaval peuplé de figures simiesques. » Et de Roza et la lune : « Berceuse pour conjurer les peurs ; à la fin, la peur qu’inspire la lune (l’inconnu) se trouve avalée et remplacée par “le lit de roses” (de Roza) ; le premier vers est une phrase prononcée un jour par ma fille Anna Roza à l’âge de 4 ans. »