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poÉsie - Page 21

  • Auguste Clavareau (1787-1864), traducteur

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    Portrait de l’un des principaux traducteurs

    de littérature néerlandaise au XIXe siècle

     

    Si c’est toujours une énorme difficulté, lorsque deux langues diffèrent autant d’esprit et de caractère que le français et le hollandais, de transporter de l’une dans l’autre, d’une façon harmonieuse et correcte, des ouvrages de prose, que dire de l’audacieux qui ne craint pas de traduire des vers hollandais en français et, ce qui est mieux encore, en vers français ?

    Henry Havard

     

     

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    Tombe de Clavareau à Maastricht (photo : J. Verbij-Schillings)

     

     

    Né à Luxembourg le 17 septembre 1787, Antoine Joseph Théodore Auguste Clavareau a grandi dans une famille catholique. Il a reçu une éducation essentiellement française à Namur puis à Mayence et semblait se destiner à une carrière militaire. Mais il préféra suivre les traces de son père né à Halluin en travaillant lui aussi dans l’administration des contributions ; il occupa des postes dans différentes localités (Gand, Bois-le-Duc, Liège, Ostende, Bruges…) avant d’être nommé à Maastricht – ville où beaucoup de gens parlaient encore français et où près de 50% des ouvrages imprimés l’étaient dans cette langue –, où il officiera pendant plus de vingt ans  (début 1823 – fin 1844). Au 1er janvier 1845, il prend, plus ou moins forcé, sa retraite. Il avait épousé courant 1823 une femme de bonne famille hollandaise qui lui donna quatre enfants.

    Clavareau se voulait fidèle à Dieu et au Roi, autrement dit, et malgré l’incompatibilité apparente, à l’Église catholique et à Guillaume Ier, souverain auquel il a dédié bien des vers. Ainsi s’explique en partie son envie de traduire des pièces patriotiques. Il fait partie de ces gens qui, une fois sujets de Guillaume Ier, décidèrent de le rester même alors que la Belgique et le Grand-Duché avaient acquis leur indépendance. D’ailleurs, quand il commence à traduire des poètes d’expression néerlandaise, il s’inscrit dans une mouvance favorisée par le monarque : dans sa volonté d’étendre la langue néerlandaise à l’ensemble de son royaume (plus ou moins l’actuel Benelux), celui-ci ne peut voir en effet que d’un bon œil toutes les initiatives qui permettent de répandre la littérature néerlandaise – entre autres à travers des publications en français – dans les contrées francophones. C’est d’ailleurs un autre membre de l’administration fiscale, contrôleur des impôts directs, Lodewijk Gerard Visscher (1797-1859) qui publia en 1820 le premier manuel présentant les belles lettres néerlandaises aux élèves francophones : Mélanges de poésie et de littérature des Pays-Bas (1). 

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    Ce n’est là que le premier d’une centaine d’ouvrages qui, en l’espace d’une quinzaine d’années, iront dans le même sens. Clavareau a lui-même collaboré à plusieurs éditions scolaires. Outre son désir de faire connaître quelques-uns des poètes néerlandais majeurs aux lettrés d’expression française (« Depuis 10 ans, je me suis imposé la tâche de faire connaître à l’étranger la littérature hollandaise, et mes succès ont enfin ouvert les yeux à nos détracteurs : nos voisins vont sérieusement s’occuper, dans leurs Revues, des richesses littéraires de notre pays » écrit-il dans une lettre du 13 février 1835 à l’éditeur Van Terveen) – notons que certaines de ses publications restèrent toutefois limitées au marché batave –, le Luxembourgeois, rangé dans de nombreuses publications de son temps parmi les « auteurs belges » (2), a en effet œuvré dans un souci pédagogique et d’édification comme en témoignent certaines traductions destinées à la jeunesse, par exemple l’Histoire de la patrie : en cinquante deux leçons à l’usage de la jeunesse et des ClavareauIllustration1.pngécoles des Pays-Bas (1837) ou divers recueils de poésies. Les petites pièces de théâtre de son cru sont en réalité des manuels pieux pour « jeunes élèves des pensionnats de demoiselles » ainsi que le montre la légende placée sous une gravure d’un volume (ci-contre) réunissant deux comédies et un drame de sa main : « De quel livre avez-vous tiré cette histoire ? Je l’ai trouvée dans mon cœur repentant »(3). Il convient de relever que ses traductions « à l’usage de l’enfance » s’adressaient en premier lieux aux petits Bataves auxquels on apprenait très tôt la langue française dans les « écoles françaises », c’est-à-dire ces écoles primaires où une partie, voire la totalité de l’enseignement était dispensé en français. Ainsi, dans la préface à sa traduction des Petits poèmes de Hieronymus (Jérôme) van Alphen (1746-1803) – le recueil de poésies pour enfants le plus célèbre des lettres néerlandaises, réédité il y a peu encore –, il nous explique : « En Hollande, les maîtres, chargés d’instruire les enfans de cinq à six ans, possèdent, comme pour l’âge suivant, tous les livres hollandais qu’ils peuvent désirer, tandis qu’ils se trouvent bien souvent embarrassés pour leur choix, lorsqu’ils doivent apprendre le français à leurs petits élèves ; car ils se gardent bien de mettre dans la mémoire des enfans, des fables ou des contes au-dessus de leur intelligence, qu’ils récitent presque toujours ou comme des perroquets, ou avec une affectation étudiée. J’ai préféré traduire Van Alphen à tout autre ; parce que, selon moi, dans ce genre, Van Alphen a remporté le prix ; et que tous ses poèmes sont excellens pour tous les pays. » Citons un de ces petits poèmes sur une pêche hollandaise devenue une orange en français :

     

    L’ORANGE

     

    De Papa je tiens cette orange :

    Pour ma leçon je la reçus ;

    Et quand, tout joyeux, je la mange,

    Son goût me plaît encore plus.

     

    La gaité sied à la jeunesse,

    Quand le temps est bien employé ;

    Et l’enfant qui fuit la paresse,

    De son travail est bien payé.

     

    DE PERZIK

     

    Die perzik gaf mijn vader mij,

    Om dat ik vlijtig leer.

    Nu eet ik vergenoegd en blij,

    Die perzik smaakt naar meer.

     

    De vrolijkheid past aan de jeugd

    Die leerzaam zig betoont.

    De naarstigheid, die kinderdeugd,

    Wordt altoos wel beloond.

     


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    « De pruimeboom » / « Le prunier »

    poème lu en néerlandais puis en français

    (dans la traduction d’A. Clavareau)

     

     

    Portrait de H. van Alphen

    PortraitVanAlphen.gifToutefois, Clavareau ambitionnera aussi d’instruire la jeunesse des autres pays : « Dans l’intention d’être utile aux établissements d’instruction publique, et saisissant toutes les occasions de faire plus connaître à l’étranger les monumens de la gloire de ma Patrie, je viens de publier une seconde édition de ma traduction de La Nation hollandaise (4)», annonce-t-il ainsi au ministre Van Maanen dans une lettre du 29 novembre 1834.

    Outre ce souci patriotique en faveur d’une nation qui n’est pas, à l’origine, la sienne, on relève une autre chose étonnante dans le parcours de Clavareau : on le voit traduire essentiellement des auteurs néerlandais et non pas flamands alors qu’il a passé la première moitié de son existence ailleurs qu’en Hollande et que, à l’époque où il s’installe à Maastricht, cette ville n’est pas à proprement parler une vraie cité hollandaise. Cette prépondérance s’explique sans doute en partie par les relations que le traducteur a pu entretenir avec les écrivains bataves qu’il côtoyait dans certains cercles de lettrés ; il convient de relever d’autre part que la poésie flamande renaissait alors à peine de ses cendres, la figure de Gezelle se profilant tout juste à l’horizon. Privilégiant donc la défense de la nation, Auguste Clavareau ne s’est toutefois guère intéressé à transposer en français les textes antirévolutionnaires du juif converti Isaäc da Costa (1798-1860) – proches à certains points de vue de la littérature catholique française contre-révolutionnaire –, sans doute trop marqués à son goût par le calvinisme. Dans l’œuvre de Willem Bilderdijk, père spirituel du poète susmentionné, ce qu’il a surtout goûté, ce sont les contes.

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    Isaäc da Costa par J.G. Schwartze/D.J. Sluyter

    DaCostaPortrait.gifAvec ses nombreuses traductions – y compris d’œuvres allemandes, italiennes et anglaises –, et ses propres œuvres – dont beaucoup de pièces de circonstances –, Clavareau gagnera une réelle reconnaissance dans son pays d’adoption. Membre de la société littéraire de Leyde, correspondant de l’Institut des Pays-Bas, il sera fait chevalier de l’ordre du Lion des Pays-Bas. Il sera aussi membre de diverses sociétés (Gand, Liège, Athènes…). Chateau- briand, Lamartine ou encore Xavier Marmier ont reconnu ses talents. Le 29 juin 1842, Victor Hugo lui adressait la lettre suivante : « Je vous remercie, Monsieur, de vos beaux vers. La noble et haute poésie est de tous les peuples, comme elle est de tous les temps. Vos belles strophes nous font compatriotes. L’art et la pensée, comme la religion, sont des patries, de saintes patries sans frontières, qui rallient toutes les âmes tournées vers l’infini. » (5) Le Luxembourgeois lui avait envoyé les strophes suivantes :

     

    Le Poète

    À M. Victor Hugo.

     

    « Qu’est-ce que l’art des vers ? Qu’est-ce que le poète ?

    « Comment le reconnaître ? à quel titre ? à quel trait ? »

    – Froid profane ! la lyre est sœur de la palette :

    Écoute ! quelques mots te feront son portrait.

     

    Le poète est un être au-dessus du vulgaire,

    Qui jette sur la foule un regard de pitié,

    Et qui, de tous les biens de cette pauvre terre,

    N’en encense que deux : l’amour et l’amitié !

     

    Le poète est un être, habitant d’autres sphères,

    Qui, sur les voix d’en haut, module ses accords,

    Vit avec sa pensée, et ne s’informe guères

    Si les fous d’ici-bas amassent des trésors.

     

    Le poète est un être ami de la nature,

    Qui chante les plaisirs, ou console les pleurs,

    Soupire sur les bords d’une onde qui murmure

    Ou tonne avec l’orage au milieu des horreurs !

     

    C’est un être nourri d’éther et d’ambroisie.

    Qu’un rameau de laurier garantit des revers

    Qui voit se consumer le flambeau de sa vie

    Dans des rêves divins, charmes de l’univers !

     

    C’est Homère, Virgile, et Milton et le Tasse,

    Et quelques héritiers de ces morts immortels.

    Que la Fable eût placés au sommet du Parnasse,

    À qui l’Histoire érige en tous lieux des autels.

     

    Oui ! c’est un être où Dieu mit un modèle d’âme,

    Un magique miroir qui darde mille feux,

    Un foyer d’où jaillit une éternelle flamme,

    Pour éclairer la terre aux purs rayons des cieux !

      

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    Malgré les louanges exprimées par ces grands auteurs – sont-elles en partie feintes ? –, malgré l’éloge que fera de lui Daniël François van Alphen, fils de Hieronymus, à La Haye, dans l’hémicycle du Parlement (séance du 25 novembre 1834), Clavareau n’a pas toujours été ménagé par les critiques : « Le poème est faiblement conçu. Les vers, en général d’une bonne facture, ne sont pas exempts d’enflure et de monotonie. L’auteur réussit mieux dans la poésie légère », affirme la Revue encyclopédique (1822, T. 14, p. 139) dans un commentaire lapidaire de La Mort du Comte d’Egmond, alors que quelques pages plus loin, ses Poésies (1821) recueillent un jugement plus clément : « De la facilité, de la correction dans le style, voilà ce qui distingue ce recueil, où le bon l’emporte sur le mauvais. Il apporte une nouvelle preuve que la langue française n’est pas cultivée avec moins de succès dans les Pays-Bas qu’en France. » (p. 370) C’est semble-t-il sa traduction de la Hollandsche Natie (1912) de Jan Frederik Helmers qui sera le plus sévèrement jugée pour des motifs sans doute plus politiques que littéraires. Clavareau prendra soin de répondre longuement à ces critiques, en particulier dans la préface au volume 2 de ses Œuvres dramatiques (1828) : « […] il est juste que je prenne une fois la défense de mes ouvrages, que certains critiques se plaisent à déchirer, depuis que ma Muse a osé ouvrir les trésors de la littérature hollandaise. J’espère qu’il ne me viendra jamais la bizarre idée de chercher à réfuter des articles de journaux dictés par la malveillance ; mais il m’a paru que les suffrages d’hommes éclairés et impartiaux répondraient victorieusement à toutes ces animosités personnelles que réprouvent à la fois et l’honnêteté et le bon goût. Je cultive les Lettres par plaisir et par délassement : il m’eût été si agréable de ne rencontrer que des personnes bienveillantes qui m’eussent averti, sans amertume et sans injures, des défauts de mes ouvrages : plusieurs ont répondu à mes désirs ; d’autres ont pris un chemin tout contraire, et en sont venus au point de ne pouvoir entendre parler de mes moindres succès sans éprouver une fureur qui semble tenir de l’hydrophobie. Je souhaite de tout mon cœur qu’ils se guérissent de cet état de convulsions ; aussi nuisible à leurs talens qu’à leur santé ».

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    Des amateurs de lettre français, lecteurs de ses traductions, l’ont remercié ainsi qu’en témoigne une lettre d’un certain Armand Clavier de décembre 1847 qui compare les mérites de Clavareau à ceux de Jacques Delille, traducteur de Virgile : «  […] je puis ajouter, sans craindre de blesser votre modestie, que vous avez rendu un éminent service à la littérature hollandaise, en éditant, en faveur de l’étranger, de ces œuvres de premier rang, que nous autres, Français, nous connaissons si peu, ce qui est un tort réel ».

    Xavier Marmier

    xaviermarmierportrait.jpgCe sont peut-être les liens que le traducteur entretenait avec Lamartine, Marmier ou encore Hugo qui lui ont permis de publier à quelques reprises dans l’Echo du Vaucluse, bihebdomadaire avignonnais dont une partie non négligeable des quatre pages était alors remplie par ces trois auteurs. Il a donné à ce périodique tant des traductions que des poésies de sa main : un poème de Da Costa (jeudi 18 juillet 1833), une « Ode à M. Alphonse de Lamartine après la mort de sa fille » (traduction sans nom d’auteur, dimanche 25 juillet 1833), le poème de Feith « La Conscience », (jeudi 19 septembre 1833), « À Madame de Lamartine, sur la mort de sa fille » (jeudi 5 juin 1834), « Napoléon à Sainte-Hélène » (jeudi 26 juin 1834), « Poésie encore un jour » (jeudi 11 décembre 1834). L’Écho du Vaucluse lui a par ailleurs décerné des éloges dans un papier paru en pages 1 et 2 le dimanche 1er juin 1834  sous le titre « Petits Poëmes à l’usage de l’Enfance, traduits du hollandais en vers français par M. Auguste Clavareau, Maestricht, chez M. Bury-Lefebvre, Imp.-Libraire » : « […] comme la mémoire est la première faculté intellectuelle, éveillée chez les enfants, l’emploi de la poésie convient parfaitement dans les livres destinés à cet âge. Il faut donc féliciter M. Auguste Clavareau, sur son heureuse idée de traduire en vers français, les poèmes néerlandais de Van Alphen. Ce n’est pas le premier service de ce genre que M. Auguste Clavareau rend à la France et à la Hollande. À lui seul nous devrons de connaître sous un nouvel aspect, la physionomie de ce peuple, qui n’est pas uniquement remarquable par son industrie, son commerce, son héroïque résistance contre le joug de fer de l’Espagne, par ses grands marins, par ses peintres au pinceau si précieux, si fini ; le peuple hollandais a aussi d’admirables poètes […] ». Le même auteur anonyme consacre une recension à la traduction du poème de Van der Hoop intitulée « Le Roi de Rome, poèmes par M. Auguste Clavareau » (dimanche 3 août 1834).

    Dans d’assez nombreux cas, Clavareau « imite » les poètes plus qu’il ne les traduits. Il laisse souvent place à ses propres sentiments et conceptions littéraires, conférant au texte une connotation et une couleur bien différentes de celles de l’original. Le Tombeau, sa transposition du poème Het graf de Feith compte près de cinq fois plus de vers que la version néerlandaise (environ 2000 contre 436 !). Mais sur ce sujet aussi, il lui arrive de parer aux reproches dans la préface de ses productions : « Ceux qui chercherons à disséquer mon ouvrage avec le scalpel d’une critique sévère, y pourront trouver des passages où je m’écarte un peu de l’original ; mais je supplie ces aristarques de se rappeler, dans leurs comparaisons, que je n’ai pas la prétention de donner mon travail VanDerHoopPortrait.gifcomme une traduction littérale, et d’avoir la bonne foi de convenir qu’il est souvent impossible de suivre Helmers fidèlement. Un traducteur, qui s’est imposé la tâche de faire connaître le génie d’un écrivain, doit s’occuper surtout du fond des idées, s’il veut approcher de l’effet que produit l’original » (6). Mais il lui arrive souvent aussi de coller d’assez près, voire de très près, l’original.

    A. van der Hoop Jr, par A.J. Ehnle/P. Blommers

     

    À propos de Lamartine, avec qui il a correspondu, Clavareau relève que Le Ciel étoilé et Orion, deux œuvres qu’il a traduites « ont précédé de bien longtemps les belles poésies de Lamartine, qui, à leur apparition, ont fait tant de bruit dans le monde littéraire » (lettre à Van Maanen, 27 janvier 1836).

    Il lui est arrivé d’envoyer ses traductions – et parfois des poèmes de sa main, voire des lettres dans lesquelles il préconisait des remèdes susceptibles de soulager certains maux ! – à Louis Philippe et à d’autres souverains européens. Mais il s’est bien entendu dispensé de faire parvenir au roi des Français celles qui auraient pu lui déplaire : à propos de l’attaque de la forteresse d’Anvers au cours de laquelle les troupes françaises jouèrent un rôle, il aurait été malvenu de faire lire au monarque des vers vantant l’héroïsme des soldats bataves.

    frchateaubriandportrait.jpgUn autre de ses correspondants fut Chateaubriand. Ainsi, le Vicomte lui adressa-t-il cette courte lettre datée du 9 avril 1845 : « Monsieur, Je me rappelle très-bien de l’honneur que vous fîtes de m’adresser une lettre en 1827. Depuis cette époque, je suis devenu bien vieux et il ne me reste plus qu’à mourir. Je vous prie de recevoir avec mes remerciemens sincères pour les beaux vers que vous voulez bien m’envoyer l’expression de ma considération la plus distinguée. »

    Une grande partie des revenus qu’Auguste Clavareau tirait de ses traductions allaient à des fonds d’aide à des victimes de catastrophe : « mon entreprise est toute basée sur la générosité et le patriotisme » (lettre à Van Maanen, 24 août 1836). Sa correspondance permet de montrer combien il s'employait pour faire publier sa nombreuse production : souvent, il prend les choses en main, envoie des courriers pour trouver des souscripteurs, entre en contact avec des éditeurs-libraires, engage parfois son propre argent, se charge d’obtenir des illustrations, etc. À quelques reprises, il entreprend des démarches en vue de faire diffuser des traductions à assez grande échelle en France ; dans une lettre du 6 juin 1834, il fait ainsi allusion à la possibilité d’envoyer 6000 exemplaires des Petits poèmes de Van Alphen ClavareauVarsovie.pngqui pourraient intéresser l’instruction publique ; dans une autre (30 octobre 1836), il affirme s’être « entendu avec le premier libraire de Paris pour répandre » Varsovie en France. Une autre fois, il s’efforce d’obtenir la diffusion de cette même œuvre qui prend le parti de la Russie face à l’insurrection polonaise. Il est assez difficile de suivre son « parcours » éditorial : de nombreuses traductions ont connu plusieurs rééditions dont les dates ne sont pas toujours faciles à situer ; certains livres imprimés dans un premier temps dans une ville ont en réalité paru chez un éditeur-imprimeur d’une autre localité. Qui plus est, Clavareau a bien souvent changé d’éditeurs même s’il a bien des fois travaillé avec une maison de Maastricht, Bury-Lefèbvre.

    Auguste Clavareau s’est éteint le 6 mars 1864. Environ un siècle après sa mort, la ville de Maastricht, où il a passé la plus grande partie de sa vie, a donné son nom à l’une de ses rues. À une époque, sa ville d’adoption a aussi compté une Société Auguste Clavareau (voir ci-dessous), cercle culturel qui organisait des manifestations littéraires. L’œuvre qu’il a laissée en français – dont des pièces pour œuvres musicales – est aujourd’hui totalement oubliée.

    Daniel Cunin

     

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    L’Art Moderne, 24 décembre 1905, p. 419

     

     

    (1) Sur ces questions, voir l’ouvrage très instructif de Guy Janssens & Kris Steyaert, Het onderwijs van het Nederlands in de Waalse provincies en Luxemburg onder koning Willem I (1814-1830), Bruxelles, VUBPress, 2008. Dans la préface des Mélanges de Poésie et de Littérature des Pays-Bas, L.G. Visscher écrit que sa publication « est composée de fragments d'une riche littérature, et cependant méconnue, que je cherche à faire connaître à ceux de mes compatriotes qui ignorent la langue hollandaise ou flamande, et qui désirent s'instruire par un moyen plus analogue aux connaissances qu'ils ont déjà acquises. Ce n'est pas un ouvrage d'opinion ni de parti ; je ne prétends rien insérer contre le goût et les habitudes d'un peuple que j'aime autant que je l'estime ; je ne défends point l'idiome d'une partie de la nation, quoiqu'il soit ma langue maternelle, comme je n'attaque point la langue française, parce que je ne saurais assez l'admirer ; j'aime donc à me persuader que je ne blesse ici les opinions de personne en émettant les miennes. »

    (2) Relevons qu'à l'époque (avant 1830), quand on parlait du royaume, on disait aussi bien les Pays-Bas que la Belgique ; l'expression « les Belges » pouvait désigner l'ensemble des habitants du royaume, les Hollandais et les Flamands les seuls habitants des provinces dont ils tenaient leur nom.

    (3) Le Présent le plus agréable au ciel suivi de Jenny ou la petite Espiègle et de Marie ou l’Amour filial, Lille, Lefort, 1858.

    (4) Dans le volume La Nation Hollandaise (notes au Chant III), Clavareau donne une traduction d’un long poème sur les héros Bataves de Gisius Nanning, Dévouement sublime ou Tableau national. Et une autre de La Fille infanticide de Schiller ! Il en profite pour faire une sévère critique de Spinoza et un éloge de la nation.

    (5) Lettre reproduite dans Échos Limbourgeois, 1842, p. 79, citée également dans la réponse du traducteur au directeur de L’Astrée.

    (6) « Préface du traducteur », La Nation Hollandaise, poème en six Chants avec des notes, traduit de Helmers d’après la sixième édition, Bruxelles, P.J. De Mat, 1825, p.  II.

     

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    Biographie nationale du pays de Luxembourg

    depuis ses origines jusqu’à nos jours. Fascicule n° 3, 1951.

     

     

    Le poème « De pruimeboom » (« Le prunier »)

    de Hieronymus van Alphen

    chanté par l’ Ensemble Pont de la Virtue

    dans une adaptation de Christian Ernst Graf

     

     

    Bibliographie

    (non exhaustive)

     

    Œuvres traduites

    (du néerlandais et d’autres langues)

     

    Portrait de J. F. Helmers

    HelmersPortrait.gifLord Byron, La Fiancée d’Abydos, poëme en deux chants, avec des notes, 1823.

    Soupir vers l’Italie, 1824.

    Études poétiques, imitées de divers auteurs Hollandais, 1824.

    J.F. Helmers, La Nation Hollandaise, poëme en six chants, avec des notes, traduit d’après la sixième édition, 1825.

    R. Feith, Le Tombeau, poëme en quatre chants, traduit d’après la quatrième édition, et suivi de quelques poésies diverses, 1827.

    H. Tollens, Les Bataves à la Nouvelle-Zemble, poëme en deux chants, traduit  de Tollens, suivi de poésies diverses de Tollens, de Bilderdijk et du Traducteur, 1828, réédition en 1838 (avant d’autres) sous le titre : L’Hivernage des Hollandais à la Nouvelle-Zemble, 1596-1597. Une édition scolaire (1851) comprendra une introduction historique. Une édition de luxe a paru en 1839 avec un portrait du traducteur. Relevons, pour ce qui est de Willem Bilderdijk, l'existence d'une traduction française d'un long passage de son Histoire de la Patrie dans : Nicolas Châtelain, Histoire du synode de Dordrecht, 1841 (sans nom de traducteur).

    J. de Kruiff, L’Espérance de se revoir, poëme en deux chants, 1829.

    R. Feith, Thirsa, ou le triomphe de la Religion, tragédie en cinq actes et en vers, traduite d’après la cinquième édition, 1830.

    A. van der Hoop Jr, La Canonnière, ballade dédiée aux marins hollandais, 1832.

    A. van der Hoop Jr, La Campagne de dix jours, couronne de victoire, offerte à S.A.R. le Prince d’Orange et à ses braves, poëme, 1832.

    H. van Alphen, Petits poëmes à l’usage de l’enfance, 1832.

    H. Tollens, Le Jour de prière générale dans la Néérlande (2 décembre 1832), 1832.

    H. Tollens, L’Anniversaire du prince d’Orange (déc. 1833), chant populaire, s.d (1833).

    H.A. Spandaw, Les Femmes, poëme en quatre chants, 1833.

    A. van der Hoop Jr, Varsovie, tableaux guerriers et poétiques, 1833 (œuvre dédiée au Tsar).

    H. van Alphen, Petits poëmes, à l’usage de l’enfance, 1834 (l’édition comprend en outre quelques poèmes de M. van Heijningen-Bosch).

    ClavareauCarmagnola.pngA. van der Hoop Jr., Le Roi de Rome, 1834.

    J. Bellamy, Marie (Roosje), romance, 1835.

    H. van Alphen, Le Ciel étoilé, cantate, 1835.

    Françoise (Francyntje) De Boer, Petits poëmes, à l’usage de l’enfance, dédiés à mes petites filles Adèle, Sophie, Thérèse, ornés de quatre dessins lithographiés par Nolthénius de Man, 1835.

    E.A. Borger, À mon enfant, dédié à Mme de Lamartine, 1836.

    Petits poèmes à l’usage de la jeunesse hollandaise, poèmes de Feith,  Immerzeel,  Lulofs,  P. Moens, Nierstrasz, de Visser, Warnsinck et Wiselius, 1836.

    P. Nieuwland, Orion, ode, dédiée à Mr. Alphonse de Lamartine, 1836.

    La Nouvelle Abeille du Parnasse, ou choix de morceaux tirés des meilleurs poètes (dont Le Réveil de J. van Lennep), à l’usage des maisons d’éducation, suivie des extraits de La Nation hollandaise de Helmers, 1836.

    J. van Wijk, Histoire de la patrie, en cinquante deux leçons, 1837. lt;/span>

    Étrennes nationales, chants patriotiques, dédiés à son Altesse Royale le Prince d’Orange, 1839.

    Impressions de l’âme, Mélange de traductions du Hollandais, de l’Allemand, de l’Anglais, et de poésies du Traducteur, au profit des quatre veuves et des dix-neuf orphelins, victimes du naufrage du flibot Vrouw Pieternella Pronk, 1841.

    A. van der Hoop, La Mort d’un joueur, tableau dramatique, 1847.

    Souvenirs poétiques, recueil de poésies traduites et originales, dédié à Chateaubriand, 1847.

    À Monsieur Donker Curtius, Ministre de la Justice, au moment des discussions sur la révision de la loi fondamentale des Pays-Bas, 1848.

    Fr. Forster, Guillaume d’Orange ou l’Union d'Utrecht, drame lyrique en quatre actes et sept tableaux, 1848.

    Silvio Pellico, Françoise de Rimini, tragédie en cinq actes et en vers, 1849.

    Prudens van Duyse, Chant de l’Esclave germain, dithyrambe, 1849.

    A. Manzoni, Le Comte de Carmagnola, tragédie en cinq actes et en vers, 1851.

    T. Körner, Toni, drame en trois actes et en vers, 1852.

    C.G. Withuys, Le Parjure, épisode tiré de l’histoire de l’Amérique du Nord, 1852.

    T. Körner, Deux cœurs de femme, ou le Domino vert, comédie en un acte et en vers, 1855.

    Jan van Beers (1821-1888)

    JanvanBeers.gifJan van Beers, L’Aveugle, 1856.

    E.W. van Dam van Isselt, Herman, poème, 1856.

    G.J. Sieburgh, Java, poème, 1856.

    Jan van Beers, L’Enfant du pauvre, 1857.

    Thomas Moore, Le Paradis et la Péri, conte oriental, 1857.

    Thomas Moore, Les Amours des Anges, poëme oriental, 1858.

    Thomas Moore, La Lumière du Harem, ou la fête des roses, poëme oriental, 1859.

    L. Van den Broek, Petits poëmes, à l’usage de l’enfance et dédiés à Sa Majesté la Reine des Pays-Bas, 1859.

    J. Heye, Petites poésies, à l’usage de l’enfance, 1859.

    Fleurs de famille, avec des pièces du traducteur, 1860.

    Six poèmes de Jan Pieter Heije, dans J.P. Heije, Al de kinderliederen, 1861

    B.H. Lulofs, Plaintes de la jeune Claire, sur la mort de sa mère,

    Nicolas Becker, Le Rhin Germanique, chant national.

    J. van Lennep, Le Réveil, traduit de Van Lennep, musique de Van Bree.

    À une mère, sur la mort de sa fille, traduit du manuscrit d’un inconnu.

      

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    Œuvres d’A. Clavareau

     

    Poésies fugitives suivies des projets de bonheur, comédie en trois actes et en vers, 1813 (ou 1814).

    Le Caton par amour, comédie en un acte et en vers, 1819.

    Valmore, drame héroïque en trois actes, 1820.

    Poésies, 33 pièces de vers, 1821.

    Les Médisantes, comédie en trois actes, en vers (vers 1821).

    La Mort du Comte d’Egmond, poëme inspiré de l’œuvre de M. Camberlyn, 1821.

    Un jour de fortune, ou les Projets de bonheur, comédie en 3 actes et en vers, 1822.

    Mauvaise tête et bon cœur, comédie en un acte et en vers, 1822.

    Les héros de Huisduinen, par un philanthrope, 1824.

    L’Amour de la patrie, poème, 1826.

    Derrière le Tombeau de Feith, quelques pièces, 1827.

    Œuvres dramatiques, 2 vol., 1828.

    Pièces ajoutées aux Bataves à la Nouvelle-Zemble de Tollens, 1828.

    Les Harmonies de la nature, poème en cinq chants, suivi de L’Amour de la patrie, poème, 1829.

    Chant guerrier au général Chassé, 1832.

    Pièces dans Étrennes nationales, 1839.

    Quelques pièces dans Impressions de l’âme, 1841.

    Échos Limbourgeois, publiés au bénéfice des Incendiés de Hambourg, dont quelques pièces traduites, 1842.

    Lauriers et cyprès, poésies détachées, dédiées à la Reine des Pays-Bas, 1849.

    Marie, ou l’amour filial, petite pièce de théâtre, 1853.

    L’Inconnu ou le merle blanc, comédie en un acte et en vers, 1854.

    L’Étudiant aux arrêts, intermède, dédié aux jeunes étudiants des Collèges, 1854.

    Églantines, Pervenches et Cyprès, poésies religieuses, 1854.

    La Veille des vacances, petite pièce de théâtre, 1855.

    La Répétition interrompue, petite pièce de théâtre, 1855.

    L’Inondation de 1855 dans la Néerlande, au profit des victimes de l’inondation, 1855.

    Deux cœurs de femme, comédie en un acte, 1855.

    Jenny, ou la petite Espiègle, comédie en un acte et en prose, à l’usage des jeunes demoiselles, 1856.

    L’Ange sur les ruines du temple Saint-Martin à Wyck-Maestricht, 1856.

    La Pose de la première pierre de l’Église Saint-Martin à Wyck-Maestricht, 1857

    Le Pêcheur de Blankenberghe, légende du XIIe siècle, dédiée à Mr. Eugène Van Meerbeke, 1857.

    Le Présent le plus agréable au ciel, petite pièce de théâtre, 1858.

    Fleurs de famille, 1860.

    La Pensionnaire en retenue, intermède à l’usage des pensionnats de jeunes demoiselles, 1861.

    Ode aux dieux de la Grèce, posthume.

     

    Autres textes : les préfaces à ses recueils (traités ou esquisses autobiographiques) ; des articles et feuilletons : « Invention de l’Imprimerie », repris sous le titre « Laurent Coster » ; « Lafontaine » ; « Des jeux de la vie » ; « Être maître » ; « Le Diable » ; « Quelques pages des tablettes d’une jeune femme » ; « Quelques réflexions sur le Suicide » ; « De l’amour et des amours » ; « La Tête et le cœur » ; « La Mode » ; « De l’Honneur » ; « Luxe et Indigence » ; « Du Charlatanisme » ; « De l’Esprit » ; « La Langue » ; « Les yeux et les oreilles » ; « L’Eau et le feu » ; « Nous le sommes tous » ; « Sur l’Epigramme » ; « Du Madrigal »…

     

    Des poèmes (ou autres contributions) de Clavereau ont paru dans les revues et journaux suivants :

    Journal de la Haye (1848) ; Astrea/L’Astrée ; La Sylphide (revue bordelaise, 1863) ; L’Écho de Vaucluse (1833 et 1834) ; L’Écho des feuilletons (« La Jeune aveugle », 13ème année),  Journal de Liège et de la Province (1854) ; Le Journal du Limbourg ; Nederlandsche Muzen-Almanak (1838) ; Le Courrier de la Meuse ; Journal du Limbourg ; Annuaire de la littérature et des beaux-arts ; Mémoires et Annuaire de la Société libre d’émulation de Liège ; Provinciale Friesche Courant (1854 et 1855) ; De Noordbrabanter (1855)…

     

    Poèmes (de circonstance, la plupart non datés) : Le Jour de l’An ; Aux ennemis de la paix ; Dieu, donne nous la paix ! ; À l’occasion de l’Exposition des fleurs à Maestricht ; Pour les pauvres ; À l’industrie, à l’occasion du XIe congrès national agricole, à Maestricht, le 26 Juin 1856 ; À l’occasion de l’inauguration de l’éclairage au gaz de la ville de Maestricht ; La Jeune malade, 10 Octobre ; À Son Altesse Royale, Monseigneur le Prince d’Orange, héritier de la Couronne du Royaume des Pays-Bas, le jour de sa majorité, 4 Septembre 1858 ; Ode à l’occasion de l’ouverture du chemin de fer d’Aix-La-Chapelle à Maastricht ; La Naissance du Sauveur ; L’Enthousiasme, ode ; Fête de l’Immaculée Conception ; Les Rogations, ode dédiée aux Pasteurs de village ; La Pentecôte ; L’Assomption ; Le Mois de Marie

     

    Sources

    L’exposé le plus complet sur la vie (et la bibliographie) de Clavareau figure dans un mémoire de fin d’études de Leanne Vroomen que nous remercions vivement : Auguste Clavareau : un missionnaire : achtergronden bij de beweegredenen van een dichter en vertaler, 1997, Scriptie Faculteit der Letteren, Radboud Universiteit Nijmegen, sous la direction du professeur André Hanou. Ce mémoire a par ailleurs le mérite de reprendre une partie de la correspondance du traducteur (63 lettres portant sur la période 1824-1847). C'est à ce travail que nous empruntons la plupart des passages de diverses lettres.

    Michael Smiets, « Levensschets van Auguste Clavareau », Jaarboek van de Maatschappij der Nederlandse Letterkunde, 1871, p. 243-253.

    Voir aussi la postface de l’édition bilingue en ligne des Kleine gedigten voor Kinderen de H. van Alphen : ICI

    E. Jeanné, «  Een Limburgsdichter van Franse expressie : Auguste Clavareau (1787-1864) », Tijdschrift voor taal en letteren, 1937, p. 257-285.

    Johan Wilhelm Marmelstein, « Een Franse bewerking van Van Alphens Kleine gedichten », Levende talen : berichten en mededelingen van de Vereniging van Leraren in Levende Talen, juin 1943, p. 181-184.

    P.L. van Eck Jr., « Van Alphen in ’t Frans », Levende talen, oct. 1943, p. 227-230.

     

     

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    Publications de la Société d'Archéologie du duché de Limbourg,

    T. 1, 1864, p. 207-208

     

    la plupart des documents reproduits ci-dessus proviennent de la DBNL, de Gallica, de Google Books ou encore d'Internet archive

     

     

     

     

  • Un poème de Ramsey Nasr

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    JE VOUDRAIS ÊTRE DEUX CITOYENS

     

    Né à Rotterdam en 1974, Ramsey Nasr est écrivain, acteur et réalisateur. Après avoir été durant deux ans « poète officiel » de la ville où il réside, Anvers, il a été désigné, début 2009, et ce pour quatre ans, « poète des Pays-Bas », une fonction qui l’amène à écrire des poèmes sur des sujets de société. C’est l’un de ces poèmes qu’il déclame dans la vidéo ci-dessous : IK WOU DAT IK TWEE BURGERS WAS.


     

     


    JE VOUDRAIS ÊTRE DEUX CITOYENS

    (de manière à vivre avec moi)



    et voici mon poème, entrez je vous prie

    ne faites pas attention si ça résonne

    n’ayez pas peur, allons d’abord dans le vide

    bienvenue dans mon cratère de lumière


    vous et moi nous sommes déjà rencontrés, vous vous rappelez

    alors requinqués, sur la réserve, dans l’éclat d’un verre

    nos ombres pareilles à du cristal clair

    notre renommée aussi éphémère que l’éclairage

    sur la lettre d’une femme étale


    nous étions couverts de poussière d’or

    blêmes, presque diaphanes de trop aimer

    nous fermions les yeux l’un pour l’autre


    et aimions faire pénitence

    quand on nous demandait comment ça allait

    nous répondions conformément à la vérité

    nous sommes morts de honte, monsieur

    nous étions sacrément convaincus

    d’avoir un jour flagellé et cruciverbé

    de notre propre initiative

    le seigneur chair de notre chair

    l’apocalypse était une punition marquée

    par avance sur notre rétine


    et que s’est-il passé durant ces quelques siècles

    pendant que nous tournions la tête de l’autre côté ?


    j’aurais aimé vous montrer une patrie achevée

    pure aux métaphores menées de bout en bout

    pétrir un poème sur vous et moi, mais quand je m’y suis mis

    j’ai constaté qu’un peuple balayait

    de but en blanc un autre peuple

    pareils à deux républiques inconciliables


    comment sommes-nous passés aussi vite du futile au fruste

    des reflets à cet omniprésente masse criarde

    comment ce peuple de 4X4 a-t-il pu surgir de ces chiches chenilles ?


    ils disent : parce que dieu a disparu – notre père

    ayant décidé de se faire plus invisible qu’il n’était,

    voyons si c’est possible, non, impossible

    dieu avait fichu le camp

    et dans cette nature morte au grand absent

    les pays-bas abasourdis se retrouvaient

    la gueule encore pleine de corruptibilité

    de frivolité et d’une envie de mourir saluée par tous


    toute leur vanité se révéla vanité

    tous les semblants, la boue chérie, tout ce palais de glaces

    que l’on avait pris pour l’infini

    était déclaré à jamais inhabitable

    on entendait le givre crisser sur leurs âmes


    et de ce trou – nous sommes nés

    kevin, ramsey, dunya, dagmar, roman et charity

    comme par magie nous sommes apparus

    sautant à l’élastique, marteau gonflable orange à la main

    criant braillant antidépressifs

    ou silencieux devant un breezer gangbangé

    bienvenue aux pays-bas terre de vacances


    oui voilà ce qui arrive, ce peuple c’est ce qui reste

    une fois la culpabilité arrachée à nos corps

    nous remplissons le vide par un autre vide, rutilant


    entre chanteurs de psaumes et avaleurs de pilules

    entre l’or et le bling-bling

    j’ai trouvé un pays qui a été aboli

    ce pays, c’est la vengeance des ancêtres

    fureur iconoclaste, ils continuent de fulminer en nous

    pourtant il existe bien – de même que le lien

    entre le string pour enfants et la burka

    entre le petit-lait et le coma éthylique : creux et arrondis

    nous emboîtons nos siècles


    nous abolir les uns les autres voilà notre force

    par nature nous aspirons au vide

    tout comme le cyclope cherche l’abîme


    voyez-vous, je voulais vous montrer une patrie

    non pas ce désert d’infinie liberté

    mais c’est bien ici que nous habitons, comme ce serait beau

    de voir un jour quelqu’un à l’instar d’une divinité en solde

    édifier un pays rime après rime

    pour ce peuple en mal de son peuple


    voyez la fosse grande ouverte de notre âme

    c’est là qu’on pourrait faire quelque chose de grand

    commençons par un poème

     

    (trad. D. Cunin)

     

     

    Œuvres de Ramsey Nasr


    CouvRamsey.jpg27 gedichten & Geen lied, 2000 (poèmes)

    Kapitein Zeiksnor & De Twee Culturen, 2001 (prose)

    Twee libretto’s, 2002

    onhandig bloesemend, 2004 (poèmes)

    onze-lieve-vrouwe-zeppelin, 2006 (poèmes)

    Van de vijand en de muzikant, 2006 (recueil d'articles)

    Homo safaricus, 2008 (journal d'un voyage en Tanzanie)

    Tussen lelie en waterstofbom, 2009 (édition rassemblant ses 3 premiers recueils de poèmes)

    In de gouden buik van Boeddha, 2010 (journal d'un voyage en Birmanie ou Union du Myanmar)

     

    Ramsey Nasr a également écrit des monologues pour le théâtre, un libretto et des traductions/adaptations de deux opéras de Mozart (dont celle d'Il Re Pastore publiée dans Twee libretto's)

    Ses livres paraissent aux éditions De Bezige Bij

     

     

    PIC_0114.JPG

    poème de Ramsey Nasr sur un mur d'Anvers

     


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  • La Paix de Nimègue

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    Le poète Jaap Robben

     

     

    PaixdeNimègue.jpg

    Henri Gascard, La signature du traité de paix de Nimègue entre la France et l’Espagne, Musée Valkhof


     

    Né en 1984 aux Pays-Bas, Jaap Robben est auteur et metteur en scène.  Il a publié à ce jour les recueils Twee Vliegen (Deux mouches, 2004), De nacht krekelt (La Nuit grillonne, 2007) et Zullen we een bos beginnen? (Et si on commençait une forêt ?, 2008), trois livres illustrés réunissant des textes pour enfants. Son éditeur, De Geus, publiera cette année un roman jeunesse rehaussé d’illustrations de Benjamin Leroy, le dessinateur flamand qui a signé celles de Zullen we een bos beginnen?.

    Le 29 avril 2010, le musée Valkhof de Nijmegen, ville dont Robben est actuellement le « poète officiel », a ouvert une salle baptisée « salle de la Paix de Nimègue ». Lors de l’inauguration, Jaap Robben a lu un poème écrit pour l’occasion. Il en a présenté les traductions espagnole et française.




    Comment nous sommes devenus voisins

     


    Où nous nous trouvons, ça s’appelait

    ici

    et le lointain

    là-bas.


    Jusqu’à ce qu’une ligne sépare soudain

    notre herbe de celle des autres.


    Un trait bien plus fin que rien

    fit que dès lors nous fûmes pareils

    et tout le monde au-delà

    en réalité tout autre.



    ***

    CouvJaapRobben.png

     

    Mais c’est pour les enfants (et les plus grands) que Jaap Robben prend le plus de plaisir à écrire. Ci-dessous un poème du recueil Zullen we een bos beginnen ?

     

    JaapRobben1.png

     


    Toute l’eau vient-elle de nos chagrins ?



    Peut-on reconnaître mes larmes

    dans le bleu du globe terrestre ?


    Se rencontrent-elles

    dans la vapeur du thé ?

    dans la forte averse

    qui tient ma fenêtre éveillée ?


    Peut-être deux d’entre elles

    se retrouvent-elles

    dans un glaçon suspendu à un pont

    à moins que ce ne soit

    jamais ailleurs

    que sur une joue.

     

    (traductions : Daniel Cunin)


  • En Hollande, d’André Germain

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    Un écrivain français

    rend visite à ses confrères hollandais

     

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    Portrait d’André Germain, enfant, par Carolus-Duran

     

    Début septembre 1923, André Germain (Paris, 12 août 1882 - Locarno, 15 septembre 1971) arrive – en provenance de Suisse – pour la première fois en Hollande. Le train s’attarde au « purgatoire de Rosendael » avant de déposer le voyageur à La Haye, « le port de toute les existences rentières ». Là, il découvre bientôt les lampions qui se balancent aux branches des arbres, « d’innombrables petits points oranges annonçant les messieurs », ou encore les « mouchoirs oranges qu’arborent à leur ceinture des dames enthousiastes de la royauté de cette fleur habituellement importune et dédaignée, le souci ». La ville, le pays s’apprêtent à fêter les 25 ans de règne de Wilhelmine. Qui était cet auteur et mémorialiste prolifique (il a entre autres publié de la poésie, des nouvelles, des romans dont Lucrèce Borgia en 1960, des critiques – parfois sous le pseudonyme de Loïs Cendré… – a collaboré à un Dictionnaire du snobisme...) aujourd’hui oublié, personnage à la voix haut perchée, mince et chétif, maniéré et mondain, surnommé « notre petit comprimé d’aspirine » par Aragon ?

    Henri Germain (1824-1905)

    PortraitHenriGermain.jpgIssu de la grande bourgeoisie française – son grand-père maternel était ministre de Napoléon III ; son père Henri, auquel il a consacré un livre, a été député et surtout le président-fondateur du Crédit Lyonnais ; sa mère était « tendrement liée » avec les princesses Mathilde et Julie ; une de ses sœurs épousa un Fabre-Luce ; il avait une tante Clermont-Tonnerre… –, il a vu dans son enfance et son adolescence ses proches côtoyer la plupart des personnalités importantes du nouveau régime ainsi que des sommités du monde littéraire et scientifique. Grâce à son père, il a très tôt, longtemps même avant de connaître la vie, appris maintes choses sur les coulisses du pouvoir et les scandales qui ont secoué la République à la charnière des XIXe et XXe siècles. Pourtant, privé d’amour maternel, devant faire avec la « façon lointaine, touchante et maladroite » que son père avait de l’aimer, et confié à des préceptrices cruelles puis à un précepteur funeste, le « faible et fragile enfant que courbait déjà une hérédité trop nerveuse » ne se releva jamais tout à fait de ces traumatismes, la psychanalyse (« douteuse science moderne ») n’ayant donné que des résultat à peu près nuls. « L’un des grands inconvénients de cette éducation arbitraire et barbare fut de me faire divorcer avec la Réalité. Trop malheureux pour pouvoir supporter la condition qui m’était faite, je me réfugiai dans une région idéale », précise Germain au début de l’un de ses volumes de souvenirs, La Bourgeoisie qui brûle. Propos d’un témoin (1890-1940) (*). Dès qu’il put échapper à son précepteur (lequel ne dédiera pas moins à son « cher élève André Germain » son étude Les Origines du vieux catholicisme et les Universités allemandes), le jeune homme timide et maladroit se trouva lancé dans le monde : « Je fréquentai chez Mmes Taine, Doumic, Massieu […]. Les écrivains qui passaient alors pour les plus célèbres, Bourget, Brunetière, Coppée, Huysmans me firent le plus chaleureux accueil. Ma première muse fut Mme de Bonnières […] ». Germain va apprécier la compagnie de dames et de poétesses diaphanes, ses chastes « éblouissements féminins ». Il se liera bientôt à Donna Maria d’Annunzio, sera à un moment un proche de la baronne Deslandes ainsi que de Mme Muhlfeld. Amoureux de la poésie, il recherche « avidement la société des poètes ».

    une des biographies de L. Daudet, celle d'Eric Vatré

    CouvDaudetRéac.pngMais le jeune homme est tellement naïf qu’il va se faire déposséder d’une partie de sa fortune par une « fiancée » et un officier peu scrupuleux. À peine remis de cette mésaventure, il se retrouve marié plus ou moins contre son gré à la jeune Edmée Daudet (née en 1886), fille d’Alphonse et sœur de Léon. Après avoir supporté quelque temps cette épouse capricieuse, son beau-frère fantasque Lucien et sa belle-mère calculatrice – du moins c’est ainsi qu’il les décrits, n’accordant du crédit qu’au célèbre Léon qu’il qualifie néanmoins de « tintin- nabulante poupée » dans Têtes et Fantômes –, André reprend sa liberté. Durant des décennies, il va évoluer dans les milieux artistiques sans presque cesser de voyager. Il est alors un esthète cosmopolite qui connaît plus ou moins tout le monde. Il comptera au nombre de ses amis Jérôme et Jean Tharaud – « ces grands écrivains aussi probes, aussi sûrs dans leur amitié que dans leur art » –, Anna de Noailles, François Coppée, Henri et Marie de Régnier, le peintre Robert Lemercier, Henri Barbusse, Jacques Bainville ou encore Pierre Benoit qu’il dit avoir « inventé » en ce sens où il l’a aidé à ses débuts et lui a confié la direction de la revue Le Double Bouquet. Pendant des années, il sera très proche de Philippe Soupault et de Marie-Louise, l’épouse de ce dernier (« Cinq ans durant, il voyagea avec moi à travers la France et l’Europe. Et puis un beau jour, il s’envola vers une autre planète, en me faisant un pied de nez »). Rilke, dans les derniers temps de sa vie appartiendra à son cercle. Germain, qui séjourna fréquemment en Suisse, l’évoquera par exemple dans « Rilke à Lausanne » et « Le souvenir de Rilke à Lausanne » (Gazette de Lausanne, 23/09/1928 et 08/06/1954).

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    Le Figaro, 12 mars 1909

     

    Le futur mémorialiste a fréquenté très tôt les milieux occultistes (Papus, Sâr Péladan et Stanislas de Guaita, rencontrant aussi à plusieurs reprises Rudolf Steiner, « vulgaire exploiteur, doué des qualités les plus brillantes de prêcheur et de thaumaturge »…), ce milieu parisien que l’homme de lettres néerlandais Frits Lapidoth décrit dans son roman Goëtia (1893) en même temps que les salons où allait bientôt folâtrer le jeune André (1). Il fut aussi un familier de plusieurs dadaïstes et surréalistes, fréquentera Pierre Jean Jouve, Gide, Mauriac, Léon-Paul Fargue, Maurras, Montherlant, Valéry, Catherine Pozzi, Max Jacob, Charles du Bos, Malraux, Saint-John Perse, Patrice de la Tour du Pin, Apollinaire,  mais aussi des personnages comme Léon Blum, Benoist-Méchin, Charles Rappoport...

    CouvGermain1.pngMenant une vie de mécène, finançant et dirigeant des revues (Le Double Bouquet, Les Écrits nouveaux – fondée en 1917 avec le Suisse Paul Budry et qu’il dirigera avec Soupault et Edmond Jaloux, accueillant par exemple André Breton – à laquelle succédera La Revue Européenne dont le premier numéro sortira justement en 1923 et dans laquelle, peu rancunier, il publiera d’ailleurs Aragon, en particulier Le Paysan de Paris), sillonnant l’Europe, recevant dans son luxueux hôtel particulier – où il aimait remettre à ses hôtes une fleur qui leur correspondait, par exemple un œillet noir au poète américain Alan Seeger – et étant lui-même reçu chez de nombreuses personnes plus ou moins célèbres. Ce « bon ouvrier de l’Europe », auteur très estimé à l’époque, fut, selon Nina Berberova, « un des premiers représentants du “bolchévisme de salon” », l’agent de Trotski en même temps, selon certains, qu’un fervent admirateur de « l’esthétique » SS ; pacifiste, il figurera sur la liste noire dressée à la Libération par le Conseil National des Écrivains. Une partie des essais et ouvrages qu’il a publiés sont de nature biographique, consacrés à des personnages historiques ou des artistes qu’il a pour la plupart connus ou dont il a connu des proches : Renée Vivien, Marcel Proust, Goethe, René Bazin, D’Annunzio (il considérait l’épouse de l’auteur italien comme le seul être qui ne l’avait pas trompé), Franz von Lenbach, Rilke, Drumont, Wilde, Henri de Groux, Léon Daudet, Liane de Pougy, Giraudoux, Clifford Barney, Barrès, Cocteau, Maurras, Maurice Magre, les frères Tharaud... Un autre pan de son œuvre se compose de souvenirs littéraires et de voyage, en particulier en Allemagne et en Italie, pays où il séjourna souvent. Ainsi, le volume Chez nos voisins (1935) comprend, outre le récit « En Hollande », les textes suivants : À travers l’Allemagne : Chez les philosophes de Cologne. Chez Bismarck. Visite à Liebermann. Conversation avec l’ex-chancelier Marx. Conversation avec M. Streseman. À travers le Brandebourg. Autour de Florence : La Villa Médicis à Fiesole / Collazzi. Une villa près de Sienne. Entrevue avec la Duse. À Copenhague. Trois Allemands à Paris : Unruh, Sternheim, Rainer Maria Rilke. Visite à Romain Rolland. Ses mémoires sont à l’avenant : une palette de gens de lettres défilent (Proust, Valéry, Gide, Robert de Montesquiou, Rémy de Gourmont, Anna de Noailles et Barrès, l’Allemande Else Lasker-Schüler, l’Arménienne Armen Ohanian, l’historien Frédéric Masson, le critique Ferdinand Brunetière, l’abbé Mugnier, Thomas Mann…). Lui-même figure dans les mémoires et les Journaux des principaux auteurs de son temps (Julien Green, Rémy de Gourmont, Gertrude Stein, André Gillois, Paul Léautaud, Aragon…) ou encore dans un pastiche du Journal des Goncourt paru en 1921 (Journal des Goncours. Mémoires de la vie littéraire par un groupe d’indiscrets), pas toujours d’ailleurs sous le jour le plus avantageux. On le traite par exemple d’ « homoncule » (Louise Weiss), on se moque de son style « mièvre », on parle de lui comme d’un « androgyne ». Il a certes eu une épouse, des maîtresses, dont Armen Ohanian, mais il produit semble-t-il un effet assez singulier sur les gens qu’il rencontre et montre une prédilection pour les (jeunes ?) hommes – quoi qu’il se gêne guère pour dénoncer à mots plus ou moins couverts l’homosexualité de certains.

    CouvGermain2.pngIl ne faut pas oublier non plus ses ouvrages politiques dans lesquels il condamne, comme dans Guerre civile, le régime parlementaire corrompu. À ses yeux, les démocraties les plus parlementaires ne diffèrent guère des dictatures les plus intransigeantes. Son père avait déjà eu l’occasion de dénoncer la politique de certains gou- vernements, de « ces hommes qui ne tiennent qu’à une chose : avoir la majorité et disposer du budget de la France en faveur de leur clientèle », ou encore la politique coloniale de Jules Ferry et consorts. Ayant accès depuis sa jeunesse aux milieux politiques les mieux informés, ayant beaucoup de relations en Allemagne, lié avec Trotski, André Germain a eu très tôt conscience des risques de guerre avec notre voisin d’outre-Rhin. Dans Hitler ou Moscou ? paru dès 1933, il redoute que la chute d’Hitler ne conduise à la bolchévisation du Reich. Un peu plus tôt, en 1931, c’est en Espagne qu’il avait séjourné et d’où il avait ramené La Révolution espagnole en vingt-cinq tableaux, qui contient des pages prémonitoires.

    André Germain a enrichi la langue française d’un adjectif : corydonien. Il faut d’ailleurs admettre que sa prose est assez riche, même si bien des pages sont gâchées par des propos de salon futiles, des bavardages mondains : « M. Germain met en scène quelques belles flâneuses prenant leur thé de cinq heures en compagnie de jeunes hommes tout aussi désœuvrés, mais à qui, généreux, l’auteur prête pour les besoins de la cause plusieurs des avantages de l’intelligence. Cette aimable société hume la boisson parfumée et grignote à belles dents petits gâteaux et gens de marque. Les voix s’affrontent, le thé repose oublié au fond des tasses et les victimes du jeu de massacre jonchent le sol », commente un critique de la Gazette de Lausanne (22/07/1923). Jeu de massacre, car Germain ne craint pas de dire pis que pendre des gens connus qu’il fréquente. On lui a souvent reproché, par exemple Paul Morand dans son Journal inutile, de fabriquer « de faux souvenirs », mais c’est quand il exagère le trait, quand il éreinte, quand il dit ou fait dire des énormités à ses protagonistes que sa phrase est peut-être la plus savoureuse. Quoi qu’il en soit, certains lui reconnaissent une pensée riche et reconnaissent en lui un critique qui fait entendre un accent très particulier, une fastueuse éloquence. Il « a de la vigueur dans la touche lorsqu’il s’avise de composer un portrait […], de la vigueur et une infinie cruauté servie par un vocabulaire d’une opulence et d’une ingéniosité providentielle », constate Jean Nicollier.

    CouvBalcon2.pngÀ l’époque de son séjour en Hollande, André Germain vient de faire paraître Têtes et fantômes (une galerie de portraits d’écrivains) et s’apprête à éreinter entre autres Tzara dans De Proust à Dada, recueils de chroniques récentes dont parlera Franz Hellens dans Le Disque vert. Alors qu’il a pris l’habitude de voyager avec Philippe Soupault, il nous dit qu’il arrive seul « dans ce pays pour moi si étranger ». Si Georges Duhamel (2) et Léon Daudet (3) ont évoqué leur voyage hollandais dans les mêmes années que Germain, c’est bien ce dernier qui propose, sous l’aspect documentaire, le texte le plus intéressant. Il s’est d’ailleurs rendu aux Pays-Bas dans l’intention d’écrire sur les artistes et les savants qu’il aura l’occasion de rencontrer, nous dit après coup le critique Johannes Tielrooy dans les quelques lignes qu’il consacre au Français dans l’hebdomadaire culturel De Amsterdammer du 15 décembre 1923.

    Au cours de la première semaine de son séjour, le voyageur s’intéresse principalement à la peinture (4) ; il remarque les œuvres de Jan Toorop, « le peintre le plus célèbre ici et dont le pinceau, le crayon surtout, méritent l’amour des artistes, tandis que sa pieuse conversion, toute parfumée de nonnes, toute sanctifiée de prêtres qu’il voit encore comme les rêva notre plus naïf matin, et parmi lesquels il ne craint pas d’idéaliser même les Jésuites, serait digne d’enchanter, s’il n’avait délaissé pour les séductions de Babylone les souvenirs d’Orthez, notre cher et coupable François Mauriac ». Il rend d’ailleurs visite au maître, « une rencontre très pure ». Il est surpris de constater que les Hollandais s’accordent sur la valeur d’un certain nombre d’artistes de leur pays sans que cela, à la différence de la France, ne prête à polémique. À La Haye, il se rend également chez le poète Willem Kloos (où il croise Hélène Swarth) : «  Demi-heure passée dans un salon petit, encombré de gloire, de photographies, de deux dames, épouse et belle-sœur, elles-mêmes écrivains, disposant de milliers de lecteurs, et qui pourtant de la gloire de leur grand homme se font les servantes. Elles parlent de lui, montrent ses livres […] Lui se tait, montrant une belle tête encore menacée de jeunesse, qui dut être celle d’un prince romantique, il y a trente ans. Et tout à coup, il interrompt son silence pour lui donner une couleur : “Verlaine m’appelait Guillaume le Taciturne” ». Avancer toutefois, comme le fait l’auteur français, que Kloos fut l’un des derniers amis de Verlaine, est tout simplement faux : deux ans et demi après son séjour en Hollande, le poète ne se souvenait que du nom de Toorop et bien entendu de celui de Zilcken (5). Toorop lui aussi lui avait parlé de Verlaine : « L’excellent peintre qui, pour se prêter aux humeurs et aux caprices du camarade français avait les loisirs de sonPortraitKloosUnivLeiden.gif cœur, l’a mieux qu’un autre pénétré. Car il ne l’a pas vu seulement aux instants brillants où il amusait et mystifiait tout le monde, mais aussi aux heures sombres, ce soir-là par exemple quand, sur le chemin de Wassenaar, regardant avec trop d’amitié chaque mare et esquissant un saut, le pauvre grand poète répétait : “L’eau m’attire.” Et l’accent d’une compassion met au-dessus de la malice de l’observateur la conscience du chrétien, lorsque Toorop conclut : “Son âme n’avait pas trouvé ce qu’elle cherchait.” »   W. Kloos, par W. Witsen (Université Leyde)

     

    Depuis son arrivée, André Germain songe au seul Hollandais qu’il a connu jusque-là, « un poète qui habitait non loin du carrefour de Buci une maison percée d’alvéoles comme un fromage, qui me disait des choses vagues et douces et s’est depuis enfoncé dans les brumes dont il semblait, enthousiaste et maigre, se nourrir ». Ce poète aujourd’hui oublié aux Pays-Bas s’appelait Dop Bles (6). Germain finit par apprendre qu’il est toujours en vie et qu’il habite La Haye, « rue des Églantines ». Les deux hommes se retrouvent, Dop Bles va l’introduire auprès de quelques auteurs et peintres (dans un premier temps Dirk Coster et J.P.J. Franken).

    Après un bref passage par Rotterdam, ville qu’il trouve infâme et sordide, le Français se retrouve à Zandvoort. Il séjourne ensuite à Amsterdam. Le 19 septembre, il rend visite à Albert Verwey (7), « le plus célèbre poète de Hollande », qui vit à Noordwijk. « De sa voix chaude, fidèle, il commence de me parler, aussi simple que hanté. Et dans la chambre attentive où la diligence et l’ardeur se tiennent comme des servantes, de royaux visiteurs sont bientôt entrés : Mallarmé, Verlaine, Henri de Régnier (8), Ludwig Derleth, Stefan George, tous en de solennels vêtements, et moins protégé par l’orgueil ou la gloire, timide sous sa vacillante couronne de pampres, le pauvre Ernest Dowson. Tous ces noms, mon hôte les prononce peu à peu, posant auprès d’eux quelque circonstance exquise. George… Ce fut le premier qui lui apparut dans la solitude où, tout jeune encore, il s’était enseveli. Après avoir, durant quelques années, dirigé avec Kloos, Van Eeden et Van Deyssel, “le mouvement de 1880”, il avait fui le combat et le succès, mécontent des compromis qu’ils exigent, voulant la pureté absolue. Et voilà qu’au fond de son silence une grande voix résonne, George. Les poèmes d’orgueil et de marbre le transportent ; et puis le poète vient à lui, force étrange, charmeur hautain. Verwey, la nature même, est capté par ce grand seigneur né de lui-même, mais qui impose à sa vie une telle retenue, un sens et ses moindres gestes, qui met une grave distance entre les hommes et lui. Un commerce intime, quoique d’un côté mêlé de déférence, s’établit entre le mage d’Allemagne et le bon Hollandais. » Puis les deux hommes s’entretiennent des autres poètes. Si Germain admire lui aussi la poésie de George, il émet certaines réserves, du moins le fera-t-il dans ses souvenirs publiés en 1951 : « Stefan George glissa peu à peu sur la pente de laVerweyParJanVeth.gif déification. » Verwey raconte qu’il a, en vain, cherché à rencontrer Dowson à Londres. Il rêvait d’établir une « sublime alliance entre poètes égaux de pays différents. […] De ses pieuses archives et comme du fond de sa mémoire il tire une image pour me la montrer. Comme il est beau et chargé de sens, ce groupe de cinq jeunes gens si lourdement couronnés qui attendent l’avenir : en bas ceux qui ont choisi les plus modestes places, Klages, malgré lui dompté un instant, mais, sous sa paisible méditation de séminariste, couvant des révoltes qui ébranleront le sanctuaire, Wolfskehl et Verwey heureux de servir, offrant, pour que le maître y réside, l’un sa maison et l’autre son cœur ; et au-dessus d’eux, plus hautain que touché, plus génial qu’humain, le grand poète qui ne consent à trouver un pair que dans cet autre évocateur au royaume plus intime, Schuler. Quel extraordinaire rêveur, ce Schuler, qui promenait parmi les ombres des temps anciens son filet, ne consentait pas à écrire ses songes brûlants, mais parfois à des auditeurs subjugués, épouvantés, les livrait ! »

    ci-dessus : A. Verwey, par Jan Veth

    Après cette visite au poète de l’Idée, André Germain retourne à Amsterdam où il songe à Renée Vivien, la poète anglaise d’expression française qu’il n’a pas connue mais à laquelle il a consacré un livre en 1917 : elle a en effet vécu un temps dans la capitale hollandaise. Le 26 septembre, après s’être rendu au Stedelijk Museum, le Français fait la connaissance d’une autre grande figure des lettres hollandaises, Fredrik van Eeden (1860-1932), à qui l’on doit au moins un chef-d’œuvre, le roman Van de koele meeren des doods (Des lacs glacés de la mort, 1900) : « […] dans un coin du hall de l’hôtel, un vieillard m’attendait avec une angélique patience dont je me sentis confus ; il n’avait pas même ôté son caoutchouc et le portier avait négligé de faire asseoir décemment l’une des gloires du pays. C’était Frédéric van Eeden, l’auteur de trente volumes adorés en Hollande, traduits, sauf en français (9), dans presque toutes les langues européennes, l’ami de jeunesse de Kloos, le rival de Verwey. Par sa venue s’achevait pour moi la célèbre trinité.

    CouvGermain6.png« Je m’excusai de mon retard ; il eut vite fait de me rassurer et de me mettre à l’aise. De tout son être s’échappait une chaude, une jeune bonté. “Mon meilleur ami est français, fit-il. Mais peut-être que vous ne l’aimez pas, peut-être que vous allez me dire du mal de lui ?” Dans cette interrogation passe la sensibilité limpide et désarmée d’un enfant. Et c’est comme si je fermais une plaie quand, ayant deviné, je prononce non pas avec l’ignorante animosité de certains de mes compatriotes, mais avec un respect sincère, les syllabes attendues : “Romain Rolland”.

    « Une demi-heure plus tard, cet homme confiant et qui aime faire part de ses joies, me parlait déjà de celle dont il est tout rayonnant, sa conversion au catholicisme. Je l’écoutais, attentif, ému comme on l’est facilement devant le plus grave des aveux. Habitué sans doute à la contradiction, mais non aux nuances, il crut pouvoir célébrer tout ce que dans l’Église il aimait ; et il mit en première ligne les Jésuites, qu’il voyait non pas comme ses renards, mais comme ses agneaux. Le contraste était si violent entre une pareille innocence et ceux auxquels elle se prêtait qu’un sourire me traversa. Alors, d’un mouvement si touchant, si affectueux posant sa main sur mon bras, Van Eeden murmura : “Riez, riez donc. Vous avez bien raison.” Dans ce geste s’épanouissaient une grâce spontanée et aussi une abnégation admirablement chrétienne, joyeuse de s’offrir à mon ironie pour dérober à ses coups et élever en plein ciel la congrégation si totalement vénérée. Cela ne suffisait pas à me rendre les Jésuites aimables ; mais j’avais honte soudain de les avoir attaqués, comme quand on a, devant la naïveté d’un enfant, entamé quelque fée. » André Germain décide de se rendre chez cet homme hors du commun dès le lendemain, dans la localité de Bussum. Là, « l’écrivain idéaliste dont toute la vie s’est passée consciencieusement en essais humanitaires et en exploration de soi-même a tenté de réaliser un programme communiste et une colonie tolstoïenne. Il y a risqué et perdu sa fortune. Un peu plus loin dans le bois, des habitations qui ont gardé leur sourire simple et leur aspect d’idylle attestent encore une tentative qui, durant plusieurs années, mit la paix entre les hommes et du bonheur sur un petit coin de notre terre. Le plus triste, c’est que la colonie vivait assez bien, pouvait durer et qu’elle a péri par la générosité de Van Eeden qui, durant une terrible grève à Amsterdam, voulut venir au secours des familles affamées et soutint une coopérative désastreusement fondée. Ce deuil-là, l’homme me souriant le porte en son cœur et d’autres plus sanglants ; et pourtant rien, on le sent, ne peut lui ravir sa paix.

    F. van Eeden, vers 1910

    VenEedenVers1910.jpg« Ce jour-là, non plus sur ses lèvres, mais dans un de ses livres, j’ai trouvé la confidence du plus grand chagrin de sa vie, qui en fut en même temps l’illumination : la mort de son fils ainé.

    « C’est un admirable récit, direct, transparent, fait par le cœur plus que par la plume. L’homme s’y révèle tout entier – candeur, droiture, longue et humble attente d’une foi qu’il ne voulait pas forcer – et, au bout de sa recherche, cette merveilleuse révélation que la mort vint lui apporter. “Avoir senti la possibilité d’une mort sainte et belle, écrit-il, voilà le trésor que Paul m’a laissé, un trésor dont je puis donner indéfiniment sans qu’il diminue.”

    « En ces paroles se résume la confession du père, mais il faut la lire tout entière : c’est un don intime qu’il nous fait. Et quand on la connait, c’est une sympathie profonde qu’on éprouve pour la vie de recherches et d’aspirations, d’inquiétude et de bonté qui trouva sur les lèvres d’un mourant une sublime réponse. Vie commencée dans l’imitation de Tolstoï et qui s’achève dans l’amour du Christ: entre les deux disciplines un ange a passé, et ceux qui aperçoivent sur les images et les portraits pendus aux murs l’extraordinaire sourire de son visage mortel ont confiance, dans ce qui nous est raconté de son résigné départ, disons plutôt de son rayonnant retour. »

    Dans son Dagboek (Journal), édité par H.W. van Tricht, Frédéric van Eeden consacre quelques lignes à André Germain. On apprend que ce dernier a passé une partie de son séjour avec un ami : « Hier, mercredi 26 septembre, j’étais à Amsterdam où j’ai déjeuné à l’Hôtel de l’Europe avec André Germain et John Rodker. Germain, un bonhomme fin, doux, auteur de vers qui ressemblent à ceux de Tagore pour ce qui est de la forme. Petit de sa personne, chauve mais cheveux longs sur la nuque (papier à musique) (10). Une élocution parfaite, une douloureuse moue mélancolique qui rappelle ces vieilles aristocrates en amidon qui sentent la lavande.

    CouvDagboekVanEeden.gif« J’ai fait bonne chère, on se serait cru à Paris. Rodker est un jeune anglais typique, beaucoup plus jeune que Germain. Son livre Montagnes Russes a eu du succès. Nous avons longuement parlé des littératures hollandaise et française, de Romain Rolland. Au-dessus de la mêlée s’est vendu à 80 000 exemplaires. Aujourd’hui, j’attends Germain et Rodker ici. » Le vendredi 28, Van Eeden insiste à son tour sur l’aspect frêle du cosmopolite : « Hier, promenade avec Rodker dans le domaine de Bantam. Je les ai conduits, lui et Germain, sur le chemin du bois de Bredius. Le contraste entre mon turbulent et remuant Hugo, et le tendre, le fragile et précautionneux homme de lettres était saisissant. »

    Début octobre, le Parisien retrouve La Haye, ville qu’il apprécie beaucoup. Malheureusement pour lui, il y a rendez-vous avec ami anglais (11) qui ne partage pas du tout son engouement. De fait, il renonce à retourner voir Toorop et Kloos. S’il assiste tout de même à une réunion littéraire organisée en son honneur chez Dop Bles, c’est sans pouvoir converser comme il l’aurait voulu avec « les deux êtres les plus intéressants : un petit prince javanais poète (12), une farouche jeune fille qui compose des drames avec des événements empruntés à l’histoire norvégienne du huitième siècle ».

    Quand à sa dernière soirée, il la passe « chez une joyeuse dame ». Ils ne sont que cinq, « tous poètes, et la conversation eût pu ressembler à une prairie de Hollande, ouatée de brouillard et d’eau. Elle fut terrible au contraire. Car Dop Bles toujours doux, Nyhoff qui semble prêt à se réjouir de tout et un troisième poète à la figure rassurante, venu dans de bonnes intentions du pré lointain où il habite au bord d’une mare (13), furent réduits en cendres par ce volcan qui aussitôt s’alluma, le grand poète Boutens (14). Sa lave couvrit mes plus récents souvenirs, les excellentes impressions que m’avaient laissées certains de ses confrères. Je subissais, atterré, cette dévastation à laquelle les beaux traits durs et la voix incisive du vitupérant semblaient ajouter des forces. Et je faillis perdre mon inspiration et laisser à jamais interrompu mon récit, hommage à un pays dont les plaines d’eau, de ciel et de flottante verdure s’embellissent réciproquement, où les, hommes et les jours me furent bienveillants ».

    P. C. Boutens

    PortraitPCBoutens.jpgC’est sur ces mots que se termine le témoignage de Germain. Dans son récit perce çà et là semble-t-il une certaine morgue à l’égard de l’« étroitesse » de la Hollande, des espaces, des habitants. Du moins, c’est la lecture que semble en faire une Néerlandaise, Adrienne den Tex, qui rend public son offusquement dans une lettre (« M. André Germain et la Hollande », Le Mercure de France, n° 183, 01/10/1925, p. 284-285) : « Les réflexions que se permet M. André Germain sur mes compatriotes sont trop aigres et souvent injustes. Je ne crois pas qu’il y ait un pays plus âprement indépendant que le nôtre, avec des sujets moins indisposés à se laisser mener et diriger par des prêtres calvinistes ou de toute autre religion. » À l’occasion de la parution de « En hollande » dans le volume Chez nos voisins (Rieder, 1927), un chroniqueur de La Revue Belge (1er janvier 1928, p. 474) émet, sur le ton de l’ironie, un avis un peu différent : André Germain, qui « appartient à une petite chapelle politico-littéraire, dont M. Romain Rolland semble être le curé », « ne se contente pas d’une petite croisière à bord d’un modeste chalutier : il court l’Europe et recueille dans maints pays des impressions très diverses, qui vont de l’art à la politique et qui touchent des problèmes irritants dont le critique littéraire n’a pas à s’occuper. […] On sent chez l’auteur un désir d’impartialité si grand qu’il le pousse parfois, sans doute à son insu, à peindre des apparences pour la réalité qu’il souhaite. Les portraits ont de l’animation, et les coins des pays qu’il nous montre, tant en Allemagne qu’en Italie et en Hollande, ont la touche du réel. »

    On dira que Germain, lui qui ne pouvait s’empêcher de sortir ses griffes et de manier le sarcasme, n’en était pas à une critique près. Malgré ses défauts, cet homme a eu le mérite de s’intéresser à bien des écrivains étrangers et d’ouvrir ses revues à une pléiade d’auteurs français parmi les plus prestigieux de l’entre-deux-guerres.

    Daniel Cunin

     

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    (*) Éditions Sun, 1951. C’est de ce volume dont sont tirées la plupart des citations autres que celles empruntées à « En Hollande », Le Mercure de France, 15 avril 1925, p. 359-380 (repris dans Chez nos Voisins, 1927)

    CouvGermain4.png(1) Dans son récit sur son séjour hollandais, Germain effleure d’ailleurs la question de l’occultisme à propos d’une femme qui, à Zandvoort, lui parle des nombreuses sectes théosophiques que compte le pays. Il évoque Krishna Murti et Sundar Singh. Il évoque aussi une demeure amstellodamoise pleine de sculptures et d’objets curieux (animaux, jizos, fétiches congolais, crânes mélané- siens…) qui le transportent dans un univers ésotérique.

    (2) Georges Duhamel (1884-1966), Suite hollandaise (Éditions du Sablier, 1925, après une publication dans la revue Europe en mai et juin 1925), texte réédité dans Géographie cordiale de l’Europe (Mercure de France, 1931). Relevons que l’écrivain français, alors très connu et très lu en Occident, a eu un grand ami hollandais, Johannes Tielrooy. À la mort de ce dernier, Duhamel a rédigé un hommage qui sera publié en hollandais : « Frankrijk verloor een groot vriend: Johannes Tielrooy », Critisch bulletin: maandblad voor letterkundige critiek, 1953, n° 9, p. 405-407. L’homme de lettres hollandais avait pour sa part consacré bien des pages aux œuvres du Français. C’est lui aussi qui a consacré à la visite de Germain en Hollande quelques lignes dans De Amsterdammer (15/12/1923) : « Een Fransch schrijver, wiens vroegste werk al van 1906 dagteekent, André Germain, heeft Nederland en eenige Nederlandsche literatoren bezocht, nieuwsgierig naar onze wetenschappen en kunsten, en voornemens daarover te schrijven. In de handen  van eenige zijner gastheeren liet hij zijn twee laatste boeken: Renée Vivien, étude (Crès, 1917) en Têtes et Fantômes (Emile-Paul, 1923). Het eerste is de studie van een dichterlijk prozaïst over een subtiele dichteres; het tweede een bundel geestige, fantazierijke, gevoelige critieken en essay's, waarin politieke en  literaire salons beschreven, en vele figuren van schrijvers en staatslieden gekenschetst worden, meest van onzen tijd. De heer Germain is een man die in zijn weelderig “hotel” veel ontvangt en die ook veel ontvangen wordt;  hij is een man van smaak en zijn geest staat open voor iedere edelmoedige gedachte. Men zal genieten van de nobele en afdoende wijze waarop hij den beklagenswaardigen snoever Léon Daudet zijn plaats wijst, een plaats die duhamelportrait1.pngeigenlijk niet in de Kamer of aan een redactiebureau is, maar in een kermistent. Ook leze men zijn beschrijving van een dadaïstische séance; Germain is hier tegelijk grappig en fijn, wat zeldzaam is bij tegenstanders van het dadaïsme. Hij schrijft een traditioneel-mooi Fransch met eenigszins plechtig-rythmische zinnen, die tenslotte toch wel pakken. De heer Germain is medebestuurder van de interessante, internationaal-gezinde Revue Européenne (éd. Simon Kra, 6, rue Blanche). »

    G. Duhamel, bois gravé par C. Le Breton

    (3) Léon Daudet (1867-1942) s’est rendu une dizaine de fois en Hollande. Des évocations plus ou moins brèves de ces séjours se relèvent dans quelques-unes de ses œuvres – par exemple son roman Le Voyage de Shakespeare – et parfois dans ses articles. Le premier ouvrage de la collection « Belles Heures » – placée sous le signe de la clepsydre et de la rose, et publiée par le célèbre éditeur Stols, de Maestricht –, présente en moins de 100 pages ses impressions hollandaises : Le Balcon de l’Europe (1928).

    (4) Il ne visitera la collection Kröller qu’à la toute fin de son séjour : « Je demeure ébloui, assommé », s’exclame-t-il alors.

    CouvVerlaineNL.png(5) Voir J.F. Heijbroek & A.A.M. Vis, Verlaine in Nederland. Het bezoek van 1892 in woord en beeld, Universiteitsbibliotheek van Amsterdam, 1985, p.146. Cet ouvrage, publié à l’occasion d’une exposition organisée à la Bibliothèque universitaire d’Amsterdam, rassemble un très grand nombre de documents sur le séjour de Verlaine en Hollande et corrige bien des erreurs et approximations qui figurent dans la littérature portant sur cette question. Kloos, Toorop, Verwey et Van Eeden font partie des artistes néerlandais qui ont passé un certain temps avec le poète français.

    (6) Adolf Bles (1883-1940), poète, romancier, auteur dramatique et critique, élève du grand poète J.H. Leopold. Libraire pendant un certain nombre d’années, il a publié sous de nombreux pseudonymes, entre autres des parodies et le faux journal intime d’une jeune fille. De ses années à Paris, il a tiré un recueil de poésies modernistes, Parijsche verzen (Poèmes parisiens, 1923). Il a traduit des poètes français ou encore Cyrano de Bergerac. Sa fille fut longtemps la compagne de son meilleur ami, Mondrian. Dop Bles s’est suicidé quelques mois avant l’invasion de la Hollande par l’Allemagne.

    Sur ce poète, l’essayiste Dirk Coster (1887-1956) écrit dans son panorama très subjectif de la littérature hollandaise publié dans les colonnes de L’Art libre (juin 1921, p. 92) - que Germain a sans doute lu - : « De ces trois poètes [Coster évoque également A. Roland Holst et M. Nijhoff], Dop Bles, qui, à vrai dire, n’appartient plus par son âge à la plus jeune génération, est, par l’esprit et le cœur, le plus mûr, - et en même temps au point de vue technique, le plus faible. C’est, peut-être, à cause de cette faiblesse technique qu’il est le moins connu des jeunes poètes hollandais. Il ne traduit jamais dans ses vers que les raffinements les plus exaspérés de la culture moderne. Mais nul ne le fit d’une façon aussi personnelle et nul ne les vécut lui-même aussi intensément que Dop Bles. Le Paris en déclin de 1914, qui, dans une débauche des sens et des nerfs, délirait contre le triste séjour des tranchées boueuses, ce Hollandais l’a connu et il y a vécu comme peu de Français peut-être. Dans ce Paris, il a souffert la torture des sensations extrêmes, des sensations qui vibrent à la limite de la décadence et de la bassesse la plus noire, - à la limite de la folie. Les nuits d’hôpital, les visions de rues et de cafés de nuit, les ivresses de l’éther et ses extases, les amours maladifs dans des garnis pleins de relents parfumés, les transports nerveux dans lesquels la mort apparaît à la dérobée, la faim qui prépare le crime, - tel est l’amer décor de vie frénétique dans lequel naissent ses poèmes parisiens, qui parfois bredouillent d’une façon incompréhensible et parfois atteignent la tragédie.

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    Tout cela, cependant, ne rendait aucun son nouveau en littérature, depuis que Rollinat et les nombreux et faibles suiveurs de Baudelaire avaient exprimé la misère des vies les plus lamentables. Mais une émotion nouvelle apparaît dans cette œuvre par le contraste qu’elle commande. Car une force inattendue et plus douce, une force de bonté puérile et de compassion cherche à se libérer de ce délire des sens et des nerfs, - une compassion qui essaie de se masquer d’une indifférence esthétique et d’un manteau d’ironie, et qui, pourtant, se découvre timidement. Le plus beau poème qu’on ait publié, sans aucun doute, en 1918, en Hollande, est la Carmen de Dop Bles. Un éclair de pitié et de résignation plaintive illuminé, dans ces vers, “l’idole louée” qui y apparaît : une misérable prostituée, qui court, sans but, de-ci, de-là, dans les rues pendant la nuit. Et le poète, dont la conscience fatiguée célèbre la femme comme une perdition, comme une marchandise indifférente, comme une futilité capable d’éveiller des rêves, est en même temps poussé par cette autre force à oublier soudain toute la science spéciale de cette femme, pour se faire l’interprète de sa douleur, à elle pour qui l’amour est d’une mortelle importance et qui, abandonnée, ne tarderait pas à disparaître. Ici il se rapproche du plus grand poète populaire que la Hollande ait eu depuis cent ans et dont il est presque superflu de rappeler le nom : J.H. Speenhoff. Des autres œuvres de Dop Bles, nous citerons encore Levensdrang, un drame symbolique, bizarre et génial. »

    André Germain évoque aussi une « Hollandaise hostile à sa patrie, échouée en  d’autres pays au bord de lacs tantôt laids et tantôt sublimes, qui a fait vers ma vie un si bizarre pèlerinage, impétueuse et raide, muette et surchargée de chants, tulipe ivre, les mains pleines d’offrandes, le cœur secrètement lourd de poèmes… » Cette femme qu’il a connue alors qu’il vivait en Suisse (1916-1917), il en reparle, sans mentionner son identité, dans La Bourgeoisie qui brûle : « une Hollandaise de grand mérite, artiste et poète. […] Elle se confiait à ses fleurs, à ses broderies, à ses poèmes. Mais elle ne parlait presque pas. Elle ressemblait, pure et droite, à l’une des fleurs symboliques de son pays, à une tulipe wilhelminienne ». Germain côtoiera d’autres poètes bataves : Adriaan Roland Holst a en effet participé en 1926, aux côtés de Valéry, Rilke, Léon Blum ou encore Oscar Vladislas de Lubicz Milosz, à la réunion préparatoire des « semaines européennes » qu’il envisageait d’organiser chaque année en septembre dans le château de Crissier afin de réunir des personnalités de tous pays pour échanger des idées.

    (7) Autodidacte qui deviendra professeur de littérature à l’Université de Leyde, Albert Verwey (1865-1937) a laissé une œuvre tellement considérable et variée qu’il est difficile de l’évoquer en quelques lignes. Poète, critique et essayiste, co-fondateur, en 1885, de la revue De Nieuwe Gids (Le Nouveau guide), puis du Tweemaandelijksch Tijdschrift – devenu De XXe eeuuv (Le XXe siècle) en 1902 –, il fut considéré comme un chef de file en assumant, de 1905 à 1919, la direction de De Beweging (Le Mouvement), périodique qui rassembla la génération de 1910, laquelle entendait privilégier « un art qui est expression d’une Idée, d’une force spirituelle englobant l’individu et la collectivité, mariant rêve et réalité, et donnant corps à une synthèse entre artiste et société » (Anne-Marie Musschoot, dans Histoire de la littérature néerlandaise, Fayard, 1999, p. 529). Pierre Brachin relève dans les premiers cycles de poèmes de Verwey une attirance pour l’Antiquité, un sentiment de la Nature, une aspiration personnelle à la Beauté. Il a célébré « la Vie, principe d’harmonie cosmique, et par conséquent de joie, que le poète a pour tâche de répandre ». Le professeur Brachin lui reproche d’être trop cérébral et estime, comme bien d’autres, que le meilleur de sa productions est à chercher dans ses études d’inspiration philosophique, avant de noter : « On sait les vicissitudes de son amitié avec Stefan George » (La Littérature néerlandaise, Armand Colin, 1962, p. 115 et 116). Ayant beaucoup pratiqué Spinoza et Hegel, Verwey s’est orienté vers une « Idée », réalité supérieure proche d’un panthéisme cosmique, qui accorde une grande place à la dimension spirituelle et à l’imaginaire. Beaucoup considèrent son recueil de poésie De weg van het licht (Le Chemin de la lumière, 1922) comme son œuvre majeure.

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    Outre le témoignage d’André Germain, relevons celui laissé par Apollinaire (Mercure de France, 16/11/1912, p. 442-443) : « J’ai rencontré dernièrement un poète hollandais, M. Albert Verwey, directeur d’une revue estimée De Beweging (le Mouvement). Il m’apprit que tandis que la presse française faisait son possible pour déconsidérer l’art français moderne, c’est-à-dire ce cubisme que j’ai longtemps défendu seul, au contraire, en Hollande, le bourgmestre d’Amsterdam inaugurait une exposition cubiste, qui avait lieu au Musée.

    « Ainsi, cependant qu’à Paris on demandait des sanctions contre des peintres coupables d’avoir des opinions esthétiques différentes de celles qui ont cours dans les salles de rédaction, à Amsterdam, on faisait au cubisme une réception officielle.

    Je demandai à M. Verwey s’il connaissait des raisons d’une si grande différence de traitement, à l’égard de la nouvelle peinture, non plus art d’imitation, mais art intérieur ; le poète batave, homme mûr, nanti d’une véritable culture artistique, m’a répondu : “C’est qu’en Hollande tout le monde s’intéresse depuis longtemps aux choses de la peinture et il n’y a pas un poète chez nous qui n’ait aussitôt saisi les relations qui lient la nouvelle peinture à la poésie.”

    « Il ne faut pas oublier en effet que Delaunay, Gleizes, Le Fauconnier, Metzinger, Léger, etc., c’est-à-dire la plupart des peintres cubistes, vivent dans la compagnie des poètes. Quant à Picasso, qui inventa la peinture nouvelle et qui, on ne peut plus en douter aujourd’hui, est la figure artistique la plus haute de ce temps, il n’a vécu que parmi des poètes dont je m’honore d’être. »

    Très peu de textes de Verwey sont accessibles en français. Relevons son article « L’orientation de la littérature hollandaise » (Mercure de France, janvier 1907) qui a suscité à l’époque quelques remous, ainsi que « Mesure et poésie » (Maat en poëzie), essai traduit du néerlandais par Pierre Brachin, Anthologie de la prose néerlandaise. Pays-Bas I, Aubier, 1970.

    H. de Régnier, par Th. van Rysselberghe

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    (8) À propos de Verwey et d’Henri de Régnier, le publiciste Alexandre Cohen note dans sa chronique du Mercure de France (avril 1901, p. 275) : « M. Verwey, dans son essai La Poésie en Europe, apprécie, en ces termes, l’œuvre de M. Henri de Régnier: “Ce poète, réfugié le plus loin possible de son époque, dans sa Tour d’Ivoire, et qui se spiritualise en les paysages de rêve du symbolisme grec, a entendu la voix de la vie et de son pays et il y répond avec un accent plein de vigueur.” » Relevons que Jan Toorop était ami et de Verwey et de Stefan George.

    (9) Dans une note, André Germain mentionne que Le Petit Jean vient d’être publié par les éditions Rieder. En réalité, une autre traduction du De kleine Johannes (la parution des différentes parties de l’original s’est étalée sur les années 1887-1906) avait paru dès 1903. Voir l’article de Joris van Parys, « Haar kleine Johannes. Frederik van Eeden, Sophie Monnier en Le Petit Jean (Parijs 1921) », Zacht Lawijd, n° 0, 2001, p. 53-70. Un petit geste illustrant cette amitié entre Frederik van Eeden et Romain Rolland dont il est question juste après : en septembre 1914, l’auteur français avait traduit de l’allemand un texte du Néerlandais, une « Lettre ouverte à nos amis allemands », publiée initialement en allemand en première page de l’hebdomadaire amstellodamois De Amsterdammer Weekblad voor Nederland, afin de la diffuser dans la presse (on peut lire la version française dans le Journal de Genève du 28 septembre 1914).

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    annonce de la parution du Petit Jean,

    Gazette de Lausanne, 17/12/1921


    (10) Dans ses Mémoires d’une Européenne, la féministe Louise Weiss fait allusion à la chevelure de Germain en brossant de lui un portrait au vitriol : « Sans doute mes lecteurs se rappellent-ils à peine André Germain, cetCouvGermain3.png homoncule qui, dans le salon de Claire de Jouvenel, se roulait aux pieds d’Anatole France. André Germain expectora son venin à mon sujet dans un volume consacré aux grandes favorites de l’histoire de France. Excusez du peu. Il avait été pondu dans Paris par le puissant baron Germain, fondateur du Crédit Lyonnais. Oncques nevit une telle montagne de crédit accoucher d’un si plat grimaud. Ses phalanges jouaient aux osselets et sa tignasse avait été montée sur tulle avant de revenir frisotter sur sa tête à claques. »

    (11) Probablement John Rodker (1894-1955), dont parle Van Eedden, à moins qu’il ne s’agisse d’Edward James que Germain connaissait également.

    (12) Il s’agit certainement de Raden Mas Noto Soeroto (1888-1951), journaliste et auteur néerlandais en même temps que le premier poète javanais à avoir inscrit son nom dans l’histoire de la littérature néerlandaise. Ses poèmes en prose, inspirés de l’œuvre de Tagore, étaient très appréciés. Issu d’une famille de la noblesse indonésienne, il vint faire des études dans la métropole et devint au bout d’un certain temps une figure du milieu culturel haguenois. Ainsi qu’il l’a exprimé dans Kleurschakeeringen (1925) ou encore dans sa revue Oedaya (Lever du soleil), fondée en mai 1923, il aspirait à une société indonésienne mariant le meilleur de la culture indigène et de la culture hollandaise.NotoPhoto.png  Noto Soeroto retourna vivre sur sa terre d’origine en 1932 (sans la famille qu’il avait fondée à La Haye). Torturé par les Japonais durant la guerre, il mena après 1945 une vie assez misérable. Au moins une de ses œuvres à été traduite en français : La chanson du Wayang (Wajang- liederen, 1931), traduit du néerlandais et présenté par Lode Roelandt, accompagné de trois lettres de Romain Rolland, Europe, n° 38, août 1935 et Les Cahiers du Journal des poètes, Bruxelles, n° 26, 1937. Une thèse à été consacrée à cet auteur et politicien : ici

    (13) Ce poète n’était autre qu’Adriaan Roland Holst (1888-1976) qui vivait dans la localité de Bergen sur les bords d’un petit lac. Si André Germain ne relate pas la visite qu’il lui a rendue, Adriaan – Jany pour les intimes – parle pour sa part du Français dans sa correspondance. Ainsi, le 6 octobre 1923, il écrit à son confrère P.N. van Eyck (1887-1954) : « Cher Piet, […] On a vu apparaître ici en Hollande un écrivain français, André Germain, qui a rendu visite à plusieurs hommes de lettres, histoire de s’entretenir avec eux. À moi aussi, à Bergen, par une matinée pleine de pluie et de vent ; je l’ai vu glisser dans une grande automobile silencieuse et s’engager sur ma Nesdijk trempée et submergée : une curieuse espèce de modèle réduit qui trottinait en se mettant de loin à me chanter des politesses. Il est resté environ une demi-heure à parler : d’une affectation incroyable, mais tellement naturelle et drôle que je l’ai au fond trouvé particulièrement sympathique – Le premier soir à La Haye, je me suis rendu avec Pom [= Martinus Nijhoff] chez Jeanne Smit, l’amie de Boutens, et là, nous sommes tombés sur Germain en compagnie de Boutens et de Dop Bles + épouse. Boutens a été ce soir-là imbuvable ; Bles, je trouve qu’il ne passe pas, mais Germain, lui, s’est réellement montré d’un miniature drolatique indescriptible, affable ; jamais encore de ma vie je n’ai vu un tel bonhomme. Il a insisté pour que Pom et moi lui rendions visite à Paris, il organiserait quelques dîners afin de nous faire rencontrer les jeunes littérateurs ; nous pensons sérieusement aller passer 3 ou 4 jours là-bas en Novembre. Avec entre autres Valéry Larbaud, Germain est rédacteur de La Revue Européenne, et j’ai lu dans cette publication quelques contributions de sa main (sur d’autres auteurs) qui me paraissent particulièrement talentueuses et subtiles. » (H.T.M. van Vliet, Tussen twee generaties. Briefwisseling A. Roland Holst en H. Marsman (1922-1940), [Achter het Boek], La Haye, Letterkundig Museum, 1999, p. 359-360 - Merci à Marcel van den Boogert pour cette référence). Ce n’est qu’en septembre 1924 que Roland Holst devait rendre visite à Germain, ce dont il fait part à sa mère dans une lettre. À cette occasion, André Germain lui a dédicacé une photo le représentant, qui se trouve aujourd’hui au Musée de la Littérature de La Haye. Dans La Bourgeoisie qui brûle (p. 277) le Français mentionne d’ailleurs qu’il reçoit à cette époque, en Normandie, dans un petit château rose qu'il a loué, « un poète hollandais ». A. Roland Holst a traduit un poème d’André Germain qui a été publié sous le titre Zang in het najaar (Chant en automne) dans De Gids de février 1925, p. 169.

    Adriaan Roland Holst reçoit en 1959

    le Grand Prix triennal des Lettres Néerlandaises

    des mains du roi Baudouin

    (14) Professeur de lettres classiques, traducteur de nombreux auteurs (Sophocle, Eschyle, Platon, Homère, Goethe, Novalis, Omar Khayyam, O. Wilde…), le poète P.C. Boutens (1870-1943) a d’abord publié des recueils dans une veine sensitiviste. Il va s’essayer à rendre toujours plus perceptible un peu de la réalité qui nous dépasse. Mêlant symbolisme et philosophie platonicienne, son œuvre s’adresse à une « élite » ; Boutens estime que la beauté est réservée à des élus. Toutefois, sa réécriture d’une œuvre poétique de 1374, Beatrijs (Béatrice ou la Légende de la sacristine, 1908, dont une traduction française d’André Priem a paru en 1954), connut un très grand succès. Un critique s’enthousiasme au sujet de cette œuvre et de Boutens en général : « En poésie, Boutens nous a donné un petit chef-d’œuvre, Beatrys. […] La légende de Béatrice, telle que Boutens l’a contée, en vers tout simples, un peu volontairement mièvres et puérils, mais si clairs, si doux, si touchants, contraste par sa simplicité avec le reste de son œuvre. Elle n’en est pas moins d’une impression subtile et délicate. Et cela requiert un don de divination profonde et une maîtrise étonnante d’évocation que d’avoir pu rendre, et en vers modernes, cette naïve légende du Moyen Âge, qui conte comment Béatrice, quittant le couvent pour suivre un amour profane, est remplacée dans son modeste rôle par la Vierge elle-même jusqu’au retour de la pécheresse repentante ». (J. Lhoneux, « Le mouvement littéraire hollandais en 1909 », Revue germanique, 1910, p. 328 et 329-330). Quant à Edmond Jaloux, il a laissé sur le Hollandais un témoignage bien différent de celui de Germain : « Quand j'allai en Hollande, je m'empressai de rendre visite à P.-C. Boutens. Il habitait un hôtel privé, somptueux et glacial, que des amis avaient mis alors à sa disposition. Je vis un homme sec, anguleux et froid, qui avait l'air à la fois d'un professeur et d'un officier. Il me parla des poètes français, je l'interrogeai sur les poètes de chez lui. Nous finîmes par parler des Grecs. Il me manifesta une grande indignation à l'égard des traductions dues à nos universitaires.

    - Ils se croient toujours à la cour de Louis XIV, me dit-il avec violence. A leurs yeux, Eschyle, Sophocle, Pindare manquent de goût. Ils se permettent d'émonder, d'adoucir, d'atténuer. Ils n'osent pas transcrire directement les puissantes, les gigantesques métaphores d'Eschyle, ses mots-images. Tenez, écoutez cela!

    Il s'empara de l'Orestie et me lut, à livre ouvert, dans un français splendide, quelques fragments d'Agamemnon. En effet, pas d'atténuation, pas d'arrangement avec lui ; c'était la vraie langue eschylienne avec ses racourcis impétueux, ses comparaisons rudes et réalistes, ses ellipses grandioses, son sourd roulement de tonnerre.

    Et je ne peux oublier aujourd'hui ce Hollandais raide, hautain et comme inactuel, dans son grand salon à peine chauffé, à peine éclairé, mais sobre et somptueux, me traduisant d'un jet dans une langue qui n'était pas la sienne un des plus beaux textes de l'Antiquité. » (« P.-C. Boutens», Gazette de Lausanne, 22 juillet 1943).

    Il est assez amusant de constater que cet homme sans doute aussi précieux que Germain n’a pas trouvé grâce aux yeux de ce dernier. Préférait-il les mâles grossiers ? lui qui, dans La Bourgeoisie qui brûle, écrit à propos de Barrès qu’il fréquenta à partir de 1900 : « Il se laissait aller à cet attrait que ressentent souvent les délicats vis-à-vis des mâles grossiers, qui leur apparaissent comme des professeurs d’énergie. » 

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    André Germain,

    « Dans les coulisses du drame allemand.

    Le massacre des prétoriens »,

    Journal de Genève, 4 juillet 1934

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  • L’œuvre de Willy Spillebeen

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    Entre introversion et extraversion :

    un entretien avec le romancier et poète flamand

    Willy Spillebeen

     

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    La Lys en hiver 

     


    littérature,flandre,france,roman,néerlandais,poésie,mythologieStyliste hors pair, Willy Spillebeen nous parle ci-dessous de certaines caractéristiques de son œuvre : l’importance de la mythologie et du paysage dans l’ensemble de ses romans comme dans sa poésie, les métaphores sur lesquelles il édifie la plupart de ses histoires, la place qu’il accorde à la vie et au témoignage de certaines personnes qu’il a croisées au cours de son existence… Nombreux sont ses livres qui s’arrêtent sur des périodes troublées de l’Histoire, explorant les enjeux du pouvoir à travers les thèmes de l’équité et de la violence, du bien et du mal, de l’idéologie et de la cruauté : la conquête de l’Amérique par les Espagnols (par exemple dans Le Jésuite anonyme), la Saint-Barthélemy (racontée par Bousbecque, alors au service de la reine de France, dans Busbeke of de thuiskomst), la révolution russe (Anastasia), les deux conflits mondiaux du XXe siècle (Une autre guerre, Amants en temps de folie, La Butte ou encore le roman jeunesse Serge/Samuel)…


    littérature,flandre,france,roman,néerlandais,poésie,mythologieIl arrive à Willy Spillebeen de situer l’action de ses romans dans le Nord de la France. Ainsi, Le Seigneur de Peuplingues, qui baigne dans une atmosphère digne d’un Simenon, évoque un procès retentissant, l’auteur reconstruisant en quelque sorte l’affaire Rohart. Il situe à Linselles, près de Lille, une autre affaire judiciaire remontant plus ou moins à la même époque (le court roman De nabestaande publié dans le volume Le Désir de consolation). À travers une relecture du poème The End of War de Herbert Read, Les Yeux d'or de Dieu (titre emprunté à un vers de Georg Trakl) nous fait revivre un drame qui s’est déroulé près de Valenciennes en novembre 1918, lors la dernière nuit de la Première Guerre mondiale : un officier allemand moribond va entraîner des centaines d’hommes dans la mort. La capacité de l’auteur à se glisser dans la peau de ce soldat qui vit ses dernières heures est pour ainsi dire hallucinante. D'ailleurs, l'agonie constitue la donnée de base de trois de ses autres œuvres : Cortés ou la chute (1987), Énée ou la vie d’un homme (1982) et enfin Bousbecque ou le retour (2000) qui décrit les dix-huit derniers jours de l'existence de l'humaniste flamand Ogier de Bousbecque (ou Busbecq), l'homme à qui l'on doit entre autres l'introduction de la tulipe et du narcisse en Europe.

    littérature,flandre,france,roman,néerlandais,poésie,mythologieDans plus d’un de ses livres, l’écrivain approfondit une autre souffrance, celle que font subir les adultes aux enfants. Relatant lui aussi une histoire vécue, le court et magnifique roman Les Chiens de la Belle au bois dormant (couverture ci-contre) narre en trois tableaux d’une rare dureté trois années de l’existence d’une fillette désemparée par la séparation de ses parents et l’inconscience de sa mère. Là encore, les données que l’auteur emprunte à la réalité échappent à l’anecdotique grâce à une belle maîtrise de la composition. Dans Le Hasard, c’est un garçon de 4 ans qui se retrouve le jouet des « grands », en l'occurrence des représentants de l’administration (policier, magistrat, infirmières…). Pluche de mer se penche sur le destin d'un enfant un peu plus grand, un des boat people vietnamiens qui atterrit en Flandre.

    L’intérêt que Willy Spillebeen a porté à l'Histoire et à certains auteurs de l’Amérique latine l’ont amené à écrire, outre des traductions d’œuvres de Pablo Neruda (entre autres le Canto General), des récits centrés sur les civilisations aztèque (Cortès ou la chute), maya (L'Enfer existe) et inca. D'autre part, un profond amour de sa région natale, marié à une prédilection pour le genre historique, l’a conduit à peindre l’existence de deux grandes figures flamandes : Ogier de Busbecq, déjà mentionné, et Guillaume de Rubrouck. Ce dernier, originaire d'un village situé près du mont Cassel, été un ami très proche de Louis IX, lequel l’avait envoyé en Mongolie vingt ans avant que Marco Polo ne s’y rende. De ce voyage, il a ramené une œuvre importante (Voyage dans l’empire mongol). Il aurait participé aux sixième et septième croisades et été prisonnier avec le roi à Mansourah. Guillaume aurait aussi assisté à la mort du souverain. Il a vécu un certain temps à Paris où il avait comme ami Roger Bacon.

     

    vidéos de l'entretien accordé par Willy Spillebeen

    le 30 janvier 2010

    arrivée en Flandre occidentale par une belle journée hivernale

    romans jeunesse, structure des romans, Les Yeux d'or de Dieu...

    la métaphore à la base du roman,

    l'écriture de l'Énée, l'impossible liberté

    mythologie grecque, civilisation d'Amérique latine,

    le paysage, l'humour

    Emmanuel Looten,

    la traduction (Romain Gary, Charles De Coster)

    évolution littéraire, structure du roman,

    dette à l'égard d'écrivains d'expression espagnole

    Ogier de Busbecq, Guillaume de Rubrouck,

    la Flandre et la Grande Guerre, la poésie

    Faulkner, Yourcenar, Joyce, L.-F. Céline ;

    une écriture qui marie classicisme et modernité

     

     

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    La Chasse au renard

     

    L'un des romans majeurs de l'écrivain flamand, fresque épique du déclin de la terre natale des protagonistes, trois pères et trois fils qui évoquent leurs désillusions et la résistance acharnée qu'ils opposent à la fatalité ; le renard apparaît comme la métaphore de l'homme qui ne cesse, au cours de l'Histoire, d'être pourchassé sans jamais trouver un havre de paix. Quand la Flandre occidentale sert de cadre à une tragédie de dimension universelle.

     

     

    ROMANS, RÉCITS & NOUVELLES

    De Maanvis (Le Scalaire), Desclée de Brouwer, Bruges, 1966.

    De Krabben (Les Crabes), Desclée de Brouwer, Bruges, 1967.

    De Sfinks op de Belt (Le Sphinx sur le dépotoir), Manteau, Bruxelles, 1968.

    Steen des Aanstoots. Een boek (Pierre d’achoppement. Un livre), Davidsfonds-De Standaard / Louvain-Anvers, 1970 (autobiographie romanesque).

    Drie X Drempelvrees (Trois x La peur d’entrer), Standaard, Anvers, 1984 (trois nouvelles).

    De Vossejacht (La Chasse au renard), Davidsfonds-De Standaard/Louvain-Anvers, 1979.

    Herinneringen aan de Toekomst (Souvenirs du futur), Orion, Bruges, 1979 ; réédité sous le titre De Andere Oorlog (La Grande Guerre), Davidsfonds, Louvain, 1988.

    Het goede Doel van het Geweld (La Bonne fin de la violence), Davidsfonds, Louvain, 1979.

    Aeneas of De Levensreis van een Man (Énée ou la vie d’un homme), Manteau, Anvers, 1982, réédition Davidsfonds, Louvain, 1999.

    Doornroosjes Honden (Les Chiens de la Belle au bois dormant), Manteau, Anvers, 1983.

    De Varkensput (Le Puits aux cochons), Manteau, Anvers, 1985.

    CouvSpillebeenRat.jpgDe Engel van Saint-Raphael (L’Ange de Saint-Raphaël), Manteau, Anvers, 1986.

    Moeder is een Rat (Mère est un rat), Houtekiet, Anvers, 1986.

    Cortés of De Val (Cortés ou la chute), Houtekiet, Anvers, 1987.

    De Waarheid van Antonio Salgado (La Vérité d’Antonio Sagado), Houtekiet, Anvers, 1988.

    Het Toeval (Le Hasard), Houtekiet, Anvers, 1989 (le titre a un double sens : à la fois hasard et crise d’épilepsie).

    De Schreeuw van de Bunzing (Le Cri du putois), Houtekiet, Anvers, 1991.

    In vele Staten - Amerikaans relaas (Dans tous mes États – Récit américain) Manteau, Anvers, 1992 (récit d'une année passée aux États-Unis).

    De anonieme Jezuiet (Le Jésuite anonyme), Manteau, Anvers, 1992.

    De Seigneur van Peuplingues (Le Seigneur de Peuplingues), Manteau, Anvers, 1993.

    De ongestorven Doden (Les Morts qui ne sont pas morts), Manteau, Anvers, 1994.

    Thersites of het Bordeel van Troje (Thersite ou le bordel de Troie), Manteau, Anvers, 1997 (théâtre, monologue).

    God gouden Ogen (Les Yeux d'or de Dieu), Davidsfonds, Louvain, 1998.

    Busbeke of de thuiskomst (Bousbecque ou le retour), Davidsfonds, Louvain, 2000.

    De hunker naar troost (Le Désir de consolation), Davisfonds, Louvain, 2001 (deux courts romans et deux longues nouvelles).

    De heuvel (La Butte), Davidsfonds, Louvain, 2003.

    Minnaars in waanzin (Amants en temps de folie), Davidsfonds, Louvain, 2006.

    Rubroeks reizen (Les Voyages de Guillaume de Rubrouck), Davidsfonds, Louvain, 2009.

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    Énée ou la vie d’un homme

    le roman dans lequel Willy Spillebeen réécrit l'Énéide

     

     

    ROMANS JEUNESSE

    CouvSpillebeenAdo5.jpgHij is een Vijand en een Vriend, Brito, Anvers, 1970, réédité sous le titre Vijand en Vriend (Ami et ennemi), Berghmans, Anvers, 1984.

    De Hel bestaat (L’Enfer existe), Manteau, Anvers, 1984.

    Een Pluisje van de Zee (Pluche de mer), Houtekiet, Anvers, 1989 (réédition Davidsfonds/Infodok, Louvain).

    Anastasia, Davidsfonds/Infodok, Louvain, 2001.

    Het toeval (Le Hasard), Davidsfonds/Infodok, Louvain, 2003 (réédition en collection jeunesse du roman de 1989).

    De muur (Le Mur), Davidsfonds/Infodok, Louvain, 2004.

    Serge/Samuel, Davidsfonds/Infodok, Louvain, 2005.

     

     

    Louis-Ferdinad Céline, personnage de roman


    Dans le roman Het varkensput (Le Puits aux cochons), où la Première Guerre mondiale occupe une nouvelle fois une belle place, Willy Spillebeen aborde un épisode peu connu de la vie de Louis-Ferdinand Céline.

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    Le Puits aux cochons

     

     

    ESSAIS

     

    Pour être à peu près exhaustif, il convient de mentionner que Willy Spillebeen a également publié un certain nombre d’essais sur des poètes d’expression néerlandaise, en particulier les Flamands Jos de Haes (Desclée de Brouwer, Bruges, 1966), Hubert van Herreweghen (Desclée de Brouwer, Bruges, 1973), André Demedts (1974), Marcel Coole (1977) Luuk Gruwez (2003) et les Néerlandais Jan Hendrik Leopold (Orion,  Bruges, 1978), Ida Gerhardt (Orion,  Bruges, 1980) et Martinus Nijhoff (De Geboorte van het Stenen Kindje, Orion, Bruges, 1977). Mais l’un de ses premiers ouvrages, c’est bien à un poète flamand de France que Willy Spillebeen l’a consacré : Emmanuel Looten (1963).

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    L'étude consacrée à Emmanuel Looten

    suivie d'un choix de poèmes en traduction néerlandaise

     

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