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Poètes & Poèmes - Page 24

  • Mouvement des années 1880

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    Willem Kloos (1859-1938)

     

     

    En guise de présentation d’un poète qui a joué un rôle considérable dans la littérature néerlandaise à la charnière des XIXe et XXe siècles, voici un texte de 1905 rédigé en français qui évoque son œuvre. Si son auteur nous dit que Willem Kloos « fit la guerre à tous les dogmes littéraires », il convient de préciser qu’il fut en quelque sorte le grand prêtre d’un nouveau culte, celui de la Beauté divinisée à travers « l’écriture artiste » (woordkunst) et qu’il élimina les dogmes du passé pour en introduire d’autres. On peut par ailleurs ajouter que « le mouvement de 1880 fut plus qu’un courant littéraire, ce fut une renaissance qui marchait de pair avec une rénovation sur tout le front de la vie économique, sociale et intellectuelle en Hollande. Voilà pourquoi les discussions dans le Nieuwe Gids avaient pour sujets des problèmes économiques et sociaux aussi bien que littéraires et particulièrement la question de savoir si l’art et le socialisme sont compatibles. » (1)

    W. Kloos par W. Witsen

    KloosParWWitsen.gifWillem Kloos – né en 1869 – a été appelé fondateur du Nieuwe Gids ; et lui-même, dans ses « sonnets injurieux », s’est attribué la gloire d’avoir fondé tout le groupe littéraire qui a pris le nom du périodique. Dans la littérature des vingt dernières années je ne connais pas de talent poétique qui ait fleuri si rapidement et se soit fané si tôt.

    Dès son premier recueil de vers il se révéla un des plus fiers, des plus fervents et des plus grands poètes de son temps ; et tel on le voit encore dans le gros volume de sonnets paru en 1894. Jamais on n’avait entendu en Hollande des chants en vers si sonores, d’un rythme si éclatant, d’une si mélodieuse et large ondulation. Sous tous les rapports, Kloos se montra supérieur à ce pauvre Jacques Perk (2), tant admiré par lui pour la délicatesse et la profondeur du sentiment, pour la musique de ses vers et le charme poétique de sa courte existence. Ajoutons aussitôt que Kloos, malgré son beau fragment épique Okeanos et deux fragments dramatiques (3), fut grand seulement comme lyrique : sorte de Verlaine, à la voix plus ample que le poète de Sagesse*. Jamais il n’a pu, comme Shelley, faire un grand drame lyrique, et le puissant talent objectif qui crée des hommes vivants et dramatise la vie lui a fait défaut.

    Bientôt, dans ses magistrales chroniques du Nieuwe Gids, puis dans ses Quatorze ans d’histoire littéraire (4) il se montra grand prosateur aussi. Dans une prose très ample et belle, comme personne n’en avait écrit avant 1880, il analysa d’une façon superbe et hardie, et avec une extrême perspicacité souvent, la redondance et la creuse rhétorique des versificateurs antérieurs au Nieuwe Gids. Il bannit au loin la poésie didactique et scolastique et fit la guerre à tous les dogmes littéraires. Il prouva clairement que l’art cérébral est un art faux et mort-né, que pour être poète il ne suffit pas de savoir à peu près son métier, mais qu’il faut avant tout que l’âme vibre et tressaille dans les mots. « La Beauté, disait-il, dort sur le fond de la Vie, mais elle ne se donne qu’à celui qui porte l’ardeur dans son âme et la volonté dans sa main et le baiser sur son front. » Il communiqua aux jeunes poètes une toute nouvelle théorie du son, si je puis dire ; il leur apprit les secrets murmures de la langue et la vie mystérieuse du rythme ; il leur dit que le vrai poète se reconnaît à la beauté du son et de l’expression, à la faculté de traduire jusqu’aux plus délicates nuances de l’émotion, à l’harmonie parfaite entre la perception et l’image. Et c’est ainsi que Kloos, poète et critique, exerça une forte et salutaire influence.

    Ses recueils de vers sont de valeur très inégale. Il y a des sonnets sublimes et d’autres tout à fait médiocres ; les extrêmes s’y touchent. La série de « sonnets injurieux » (5), parue en 1894 à la suite du volume nommé ci-dessus, porte déjà les germes visibles de sa dégénération artistique et intellectuelle. A quoi attribuer cette prompte décadence d’un si magnifique poète ? J’en vois deux causes principales : lui-même s’est énormément surfait – ne s’était-il pas écrié dans un accès d’immense orgueil : Je suis un dieu au fond de ma pensée ? et surtout : le sentiment lyrique s’était tellement individualisé chez lui que l’épuisement ne pouvait tarder. Aussi, huit ans à peine après la fondation du Nieuwe Gids, son principal fondateur en est déjà aux convulsions de l’agonie. La même année, par suite d’assez dégoûtantes querelles, la rédaction du périodique se dissout et ses membres se dispersent. Kloos s’était montré le plus âpre à la lutte ; c’était lui qui avait distribué le plus d’injures et de coups. Mais laissons là ces querelles peu édifiantes, et constatons seulement que dès lors le soleil du Nieuwe Gids penche vers son déclin et qu’aujourd’hui, malgré certains collaborateurs qui ne sont point à dédaigner, il n’exerce plus guère d’influence sur le mouvement littéraire (6).

    Et comme poète et comme critique, Kloos a cessé d’être le « Grand-maître de la langue de Hollande » ainsi qu’il s’intitulait fièrement (7). Autour de ses vers actuels le silence se fait de plus en plus complet. Et ses chroniques sont loin d’avoir la superbe ampleur et le large rythme de sa prose d’autrefois. On n’y retrouve plus cet esprit fin et cet infaillible coup d’œil ; il s’y répète à l’infini et s’attache indéfiniment à vouloir nous faire sentir l’essence de la poésie. Or, comme il a prouvé jadis par ses propres vers et expliqué dans de pénétrantes analyses ce qui distingue la vraie poésie, ces médiocres et fastidieuses redites ne peuvent qu’irriter le lecteur au lieu de l’instruire.

    Kloos – le Kloos des premières années – restera sans contredit un des plus grands poètes de la littérature néerlandaise. Il a eu et a encore de nombreux imitateurs, et bien des sonnets qui se fabriquent actuellement sont inspirés du maître. Les prédictions sont dangereuses ; mais tout semble indiquer que dans la vie littéraire de cet artiste il ne fleurira pas de second été. N’importe ! sa voix fût-elle éteinte à jamais son nom ne périra pas.

    * Dans ses vers français, imités ceux-là de Verlaine, il a complètement échoué (8).

     

    H. Messet, « La littérature néerlandaise », Mercure de France, 15 novembre 1905, p. 202-204.

     

    NieuweGidsDébut.jpg

    couverture du premier numéro du Nouveau Guide

     

    (1) A. Romein-Verschoor, Alluvions et Nuages. Courants et figures de la littérature hollandaise contemporaine, trad. W.F.C. Timmermans, Querido, 1947, p. 17-18. On lira en français : Pierre Brachin, « Le Mouvement de 1880 aux Pays-Bas et la littérature française», in Un Hollandais au Chat noir. Souvenirs du Paris littéraire 1880-1883, textes de Frans Erens, choisis et traduits par Pierre Brachin avec la collaboration de P.-G. Castex pour les annotations, La Revue des Lettres modernes, n° 52-53, 1960, p. 3-27.

    (2) Jacques Perk (1859-1881), ami intime de Willem Kloos. Ce dernier publiera, avec l’aide de Carel Vosmaer, l’œuvre posthume de son ami. La substitution d’une religion individuelle au christianisme se trouve déjà formulée par Perk dans « Deinè Theos » : Beauté, ô toi dont le nom est sanctifié, / Que ta volonté soit faite, que vienne ton empire ; / Que la Terre n’adore point d’autre dieu que toi !

    (3) Okeanos, seule tentative de Kloos d’écrire de la poésie épique. Les deux « fragments » dramatiques s’intitulent Rhodopis et Sappho.

    (4) Quatorze ans d’histoire littéraire (1880-1893), étude publiée en 1896. À l’œuvre du Kloos critique il convient d’ajouter les nombreux volumes des Letterkundige inzichten en vergezichten.

    (5) Les « sonnets injurieux » (scheldsonnetten) ont sans doute été écrits en 1893-début 1894, alors que les tensions atteignaient leur paroxysme au sein du Nouveau Guide. Kloos s’en prend violemment à d’anciens amis (pas toujours identifiables), en particulier des collaborateurs de la revue, et à d’autres personnes dont J.-K. Huysmans dans le cinglant poème « Contre J.-K. Huysmans ». Notons que Theo van Doesburg a, sous le pseudonyme d’I.K. Bonset, injurié à son tour des poètes hollandais dont Willem Kloos, qualifié de «  pot de chambre de Pétrarque » (dans « Chronique scandaleuse des Pays-Plats »).

    (6) Si la revue De Nieuwe Gids (Le Nouveau Guide) – lancée le 1er octobre 1885 par les jeunes auteurs W. Kloos, Frederik van Eeden, Frank van der Goes, Willem Paap et Albert Verwey – a connu une seconde vie (jusqu’en 1943) après le départ de nombreux collaborateurs et la rupture de 1894, l’historien de la littérature a tendance à ne retenir que ses neuf premières années d’existence.

    (7) Même si Kloos cesse d’être le « grand-maître », des auteurs en herbe continuent de lui demander son avis, par exemple le futur peintre Conrad Kickert (1882-1965) (www.conrad-kickert.org).

    (8) Citons à titre d’exemple le sonnet CLXI publié dans Verzen (1894) :

     

    Oh, le doux bonheur d’être une fois sage,

    Sage et puis d’une volonté suprême

    De régner, moi, Roi seul, dans un extrême

    Moment de vouloir et de pouvoir, Mage

     

    Inconscient, tout blanc, qui de lui-même

    Tire son sort superbe, quoique rage

    Autour de lui l’inéluctable orage....

    Inéluctable ? Oh non, sinon que blême

     

    Moi-même, je me perdrais dans la crainte

    Des hommes et des choses, de ce monde

    Terriblement infâme. Ô tas immonde

     

    En ce beau monde, qu’il veut perdre et puis

    Savoir ne voudra jamais que je suis,

    Pauvre moi, suis l’Universelle Plainte.

     

     

    Une poignée de poèmes de Willem Kloos ont été traduits en français (en allemand, on verra par exemple Stefan George : Zeitgonössische Dichter, 1929) : « Homo sum », dans Achile Millien, Poètes néerlandais, A. Lemerre, 1904 ; « Phébus et Apollon », « Je me tus », « Je suis un dieu », « Les feuilles tombes doucement », « De la mer », « Dieu n’est pas un roi », dans Henry Fagne, Anthologie de la poésie néerlandaise, Éditions Universitaires, 1975. On peut lire en français : Joseph Daoust, « Huysmans et Willem Kloos », Bulletin de la Société J.‑K. Huysmans, n° 25, 1953, p. 275‑280.

     

     

    Le poème néerlandais de W. Kloos

    Contre J.-K. Huysmans

     

    Tegen J.K. Huysmans

     

    O, gij uit uw kantoor-bediendes-kop

    Ziende u-zelfs klein in-innerlijkste smerig

    Bestaantje, trots-gaande als een vrij-wel heerig

    Looper langs ’t Volk van ’t groot Parijs, uws kops

     

    Afslaan niet waard zijnd, waard zijnd wel des strops

    Bloed-stremming onafwendbaar, op des tops

    Niet-Zijnds gruwbaarst, vuil voortknoeier op Rops.

    ’n Goed mensch is van elk slecht mensch diepst afkeerig.

     

    Gij zijt geen man: gij zijt een vies verkrachter

    Van ’s Werelds eeuw’ge schoonheid, die voortdurend

    Met staat’gen zwaai vermeestrend ’s werelds macht, er

     

    Een hoogre macht van maakt, o gij, die turend

    In ’s Levens mikroskoop, zoo idioot, vergeet

    Dat gij met uw slim turen nòg niets weet.

     

     

    1880DaveHN.png

    L'Humanité nouvelle, 1899, vol. 4, p. 509

     

    SurKloosParAndréDeRudder.png

    André de Ridder, L'Humanité nouvelle, 1899, vol. 5, p. 398

     

     

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  • Pieter Boskma ou la poésie innée

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    Présentation du poète

    Pieter Boskma

     

    « Ce n'est pas l'inspiration extérieure qu'il faut attendre, c'est l'inspiration intérieure (…) La vie intérieure comporte aussi la vie éthique ou morale, les scrupules, les choix, la volonté raisonnée. Cette vie intérieure est l'état proprement poétique. »

    Max Jacob

     

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     P. Boskma par Tafil Musovic

     

     

    Frison de naissance et de cœur, Pieter Boskma s’est affirmé en trente ans comme le grand lyrique des Pays-Bas. Il n’a pas choisi la poésie, c’est elle qui l’a choisi. On retrouve chez lui des accents d’un Herman Gorter (1864-1927), l’auteur de Mai (1889), long poème qui reste le chef-d’œuvre de la génération des Tachtigers (poètes des années 1880). Lui aussi a pour sa part, un siècle plus tard, appartenu brièvement à un groupe de poètes qu’on a appelé les Maximaux : « Pour moi, Maximaal est essentiellement un plaidoyer pour le lyrisme qui vient tout droit du cœur ».

    Parmi les poèmes qui l’ont marqué dans sa jeunesse, mentionnons-en deux, de poètes à la fois novateurs et traditionnels, le Paul van Ostaijen (1896-1928) d’Avondgeluiden (Soir sonore) :

     

    Métairies claires derrière la lisière

    le long des champs bleus le long eux de la lune

    entends le soir sur les pavés au loin

    le fer des chevaux (...)

     

    et le Lucebert (1924-1994) de er is alles in de wereld het is alles :

     

    il y a tout dans le monde cela est tout

    le sourire canin et fou de la faim

    les peurs ensorcelées de la douleur et

    le grand vautour grand soupir les grands

    les vieux les lourds rossignols

    cela est tout dans le monde il y a tout (...)

     

    Pieter Boskma affirme que le genre poétique correspond à sa nature paresseuse. Il n’en a pas moins publié une dizaine de recueils dans lesquels il pratique son art avec gravité et humour, mariant thèmes et approches contrastés ; la langue parlée côtoie avec aisance le vers élégiaque, le sublime et le magique la réalité la plus crue. Il fait partie des rares poètes qui ne succombent pas à la doxa ra- tionalisante ; la poésie lui permet et de peindre, et de chanter, et de parler et de philosopher. Imprévisible, il publie en 2002 un poème épique de près 250 pages, La Comédie terrestre. Terrestre, il l’est en laissant parler l’être physique, érotique, organique, viscéral.

    Le titre de son dernier recueil, L’heure violette, est emprunté à un vers de T.S. Eliot. Comme dans certains poèmes antérieurs évoquant des figures de peintres, on retrouve dans ces pages une attention accrue pour la lumière ; Boskma ayant quitté Amsterdam, la nature semble devoir occuper do- rénavant une place de plus en plus grande dans son œuvre. À l’instar du romancier de tout premier plan Gerard Reve (1923-2006), il lui arrive de dédier ses œuvres à la Vierge (Notre-Dame de la Médaille miraculeuse, La Dame de tous les Peuples, Notre-Dame de Heiloo…).

    Boskma1.png

    L’auteur a aussi donné un court roman, Une photo de Dieu, et des nouvelles réunies sous le titre Occidentaux. Si François Nourissier a publié sous un pseudonyme féminin le roman Seize ans, Pieter Boskma a pour sa part donné sous celui de Laura van der Galiën (jeune fille présentée comme étant née en France) un recueil intitulé Zeventien (Dix-sept ans, 1996). Il a aussi publié des pastiches du poète Gerrit Achterberg (1905-1962) en les faisant passer pour des poèmes inédits de son grand prédécesseur ; tout le monde ou presque est tombé dans le panneau, y compris les plus grands spécialistes de cet auteur.

     

    Œuvres

    Virus virus (poèmes, avec Paul van der Steen, 1984)

    Quest (Quête, poèmes, 1987)

    De messiaanse kust (Le Rivage messianique, poèmes, 1989)

    Tiara (Tiare, poèmes, 1991)

    Een foto van God (Une photo de Dieu, roman, 1993)

    Simpel heelal (Simple cosmos, poèmes, 1995)

    In de naam (Au nom, poèmes, 1996)

    Te midden van de tijden (Entre les temps, poèmes, 1998)

    Het zingende doek & De geheime gedichten (Le Tableau qui chante & Les Poésies secrètes, poèmes, 1999)

    De aardse komedie (La Comédie terrestre, roman-poème, 2002)

    Puur (Pur, poèmes, 2004)

    Altijd weer dit leven (Cette vie, toujours, anthologie, postface Joost Zwagerman, 2006)

    Westerlingen (Occidentaux, nouvelles, 2006)

    Het violette uur (L’Heure violette, poèmes, 2008)

    Doodsbloei (Floraison de mort, poèmes , 2010)

     

     

    Boskma3.pngPieter Boskma a aussi donné plusieurs plaquettes illustrées par Pieter Bijwaard, un recueil des œuvres poétiques de l’un de ses amis, décédé en 1991, Paul van der Steen (avec qui il avait fondé et dirigé la revue Virus), une anthologie de poèmes de Herman Gorter… Il a fait partie de l’équipe fondatrice de la revue entièrement consacrée à la poésie Awater dont il est resté rédacteur jusqu’en 2003. La plupart des œuvres de Pieter Boskma sont publiées par In de Knipscheer et Prometheus/Bert Bakker.

    Voici deux poèmes de Pieter Boskma, tels qu’ils ont paru dans l’anthologie Le Verre est un liquide lent. 33 poètes néerlandais, Farrago, 2003 :

     

    Muette toute et douce tu es

    toute muette que toute douce je

    tu es comme tout à coup moi parfois

    toi des couleurs une nuit entière

    toi et encore un je plus doux

    que toi tout à coup toi qui rit en toi

    car tu es silence doux tout

    en toi et rire et que tu

    qu’en plus tu et au surplus

    peux t’ouvrir et au surplus

    te refermer un peu même un peu

    plus que moi un peu comme

    un peu comme moi.

     

                                        (In de naam)

     

     

    La lumière jaune de Van Goyen

    darde en effleurant les dunes,

    de la résurrection des morts

    au commencement des temps.

     

    La gerçure des bouleaux nus

    luit à croire l’écorce couverte d’or,

    et, sur les dalles funéraires, les noms

    trouvent un second souffle.

     

    D’une vitre éclabousse un soleil

    cru qui chute à travers les nuages.

     

    Une flamme près des hauts fourneaux

    se propage dans l’épaisseur du cœur.

     

    C’est alors que, de l’asile d’aliénés de la nuit,

    Malevitch crache son Carré Noir.

     

            (Het zingende doek & De geheime gedichten)

                                                  (trad. D.C.)

     

    Boskma2.jpgEn septembre 2010, Pieter Boskma a publié Doodsbloei, « journal de deuil » sous forme poétique – une suite de plus de 250 poèmes proches du sonnet, hommage impres- sionnant à sa compagne disparue. Le premier tirage de cette « épopée » a été vendu en une semaine.

     

     

    portrait de Pieter Boskma

    (vidéo, 2006, Omrop Fryslân, néerlandais/frison)

    ici

     

    Pieter Boskma lit lors de la Nuit de la Poésie

    Utrecht 19 septembre 2015 

     

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  • Martinus Nijhoff (1894-1953)

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    Poète moderniste

    NijhoffFrontispice_0001.jpgNé dans une célèbre famille d’éditeurs, de bibliophiles et de libraires, Martinus Nijhoff* a publié dès 1916 un recueil De wandelaar (Le Promeneur) annonçant une poésie mariant forme classique rigoureuse et thématiques modernes et prosaïques, une poésie capable de saisir la vie là où elle s’était déplacée (usines, gares, laboratoires, hôpitaux…). Le jeune homme aspira bien vite à utiliser ses qualités de poète non point tant pour chercher à éclairer la part affective de l’homme que pour donner forme à ce qui rôde, à ce qui est en gestation dans la conscience collective néerlandaise. Une partie de son œuvre est fortement marquée par l’héritage chrétien ; la mort l’a d’ailleurs surpris alors qu’il travaillait à une traduction des Psaumes.

    Deux de ses longs poèmes d’aspect narratif, Awater (1934) et Het uur U (L’Heure H, 1936), appartiennent aux classiques de la littérature néerlandaise, de même que ses recueils Vormen (Formes, 1925) et Nieuwe gedichten (Nouveaux poèmes, 1934). M. Nijhoff a également laissé une œuvre importante comme critique et comme traducteur (L’Histoire du soldat de Ramuz, La Tempête de Shakespeare, Iphigénie en Tauride d’Euripide… ou encore des poèmes d’Edgar Lee Masters, T.S. Eliot, Villon, Charles d’Orléans, Musset, Vigny, Hugo, Nerval, Baudelaire, une chanson de Léon Xanrof…, pièces insérées dans les œuvres poétiques complètes). Il a même commis quelques vers en français, par exemple ceux-ci dans sa jeunesse :

    Le monde est plein de fous –

    Et qui n’en veut voir

    Doit se tenir tout seul

    Et – casser son miroir.

    Quelques poèmes de Nijhoff ont paru en traduction française dans des anthologies ou des revues. Quant aux deux qui suivent, ils sont empruntés au recueil Le Promeneur (1916). Dans le premier, on retrouve un thème cher aux symbolistes français, celui du Pierrot, mais traité ici avec une gravité marquée par le dédoublement de la personnalité. Le poète donnera peu après un Pierrot plus ironique dans « une rapsodie clownesque », Pierrot au réverbère, long dialogue entre Arlequin et Pierrot sous forme de quatrains. Le second, dont le titre est à l’origine en français, évoque les soldats néerlandais mobilisés – comme Nijhoff lui-même – et réduits à l’inaction pendant plus de quatre ans alors qu’aux frontières la guerre faisait rage.

     

    Pierrot

     

    Je l’ai croisée, la nuit, sous quelque lampadaire,

    Fardée ainsi que les païens fardaient leurs morts –

    « Femme, d’errer, je suis las », ai-je dit alors.

    Elle a ri de mon habit blanc, de mes manières.

     

    J’ai repris : « Femme, toi et moi, mourrons ensemble ;

    Mon nom est Pierrot – » Lui demandai le sien.

    Puis nous avons dansé tels des gens pris de vin.

    Mon cœur désassemblé craquait en battant l’amble.

     

    Ce pas de deux, c’était frôler, frôler l’à-pic

    De la stupeur. Pareille au venin de l’aspic,

    La folie déferla dans mon corps, à le rompre –

     

    Je détournai les yeux, tel l’auteur d’un carnage,

    Et, me découvrant seul dans la rue, la pénombre,

    Je décampai, la main jetée sur le visage.

     

    CouvAnthoNijhoff.jpg
    couverture d'une anthologie récente

     

    Les soldats qui chantent


    Routes et rues hérissent leurs pavés :

    Avez-vous, blonds soldats, les pieds qui saignent ?

    Jugulez la douleur d’une rengaine :

    « Marie, je m’en vais ; Marie, je m’en vais. »

     

    Regard rivé sur les clochers bien hauts,

    Nous progressons, quatre, épaule contre épaule.

    Mélancolie, tu nous en fais de drôles :

    « Le diable a deux cornes et deux sabots. »

     

    Où est la musique et où le tambour ?

    Dieu nous a laissés comme des sans-grades,

    Corps à bout et cœur qui bat à rebours –

     

    Chantez la bague et l’amour, les souffrants,

    Et par dédain pour deux ou trois grenades !

    Un bon soldat, c’est un grand cœur d’enfant.

     

                                              (trad. D.C.)

     

    Le portrait du jeune auteur par Herman Hana a été publié en frontispice dans De wandelaar.

    * la diphtongue ij (autrefois : ÿ) se prononce [ɛj] comme dans soleil.

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  • Pierre Mac Orlan parle de Guido Gezelle (1954)

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    AU CARILLON DE BRUGES 

     

    Quand un romancier français parle de Bruges,

    du plus grand poète d'expression néerlandaise du XIXe siècle,

    Guido Gezelle (1830-1899), et de la traduction de la poésie flamande

     

     

    Pierre Mac Orlan

    Lectures pour tous

    ORTF - 21/04/1954 - 00h06m25s

     

     

    « Pierre MAC ORLAN reçoit Pierre DUMAYET dans sa maison de Saint Cyr sur Morin. Il parle de sa fonction de président des carillonneurs de France et de la place des carillons dans son œuvre. Il fredonne l'air du carillon de Bruges et raconte une anecdote sur celui d'Arras, villes où il a vécu et qui sont dominées par les sonneries de cloches. Il souhaite que les carillons reprennent leur place dans l'avenir, le son des cloches étant pour lui un son humain. »

     

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    H. De Graer, Portrait de Guido Gezelle, 1905

    Guido Gezellemuseum, Bruges

     

     

    Quelques mots sur le poète

    de Flandre occidentale

      

    « […] Pendant ce temps, il était un homme, qui, de son côté, faisait subir au langage la même refonte, qui résumait en lui toutes les faces de l’évolution poétique de son époque, mais qui n’était d’aucune époque pourtant, car il avait la qualité inestimable et essentielle qui fait les poètes purs ; le moins prisé et le plus grand, il se contentait de donner quelque chose de son âme à tout ce qu’il voyait, de faire passer un peu de la lumière et de la chanson de son âme dans tout ce qu’il disait : c’était Guido Gezelle.

    Il eut la destinée adéquate à son génie : pendant presque toute sa vie, il fut isolé, pauvre, incompris, vilipendé, ignoré. Mais il avait heureusement en lui cette lumière que les autres ne voyaient point, il avait des trésors inépuisables de vie intérieure et profonde, l’atmosphère d’émotion et de beauté qui donne une éternité aux choses quotidiennes.

    Il apparaît dans une province qui jusqu’alors était restée presque complètement en dehors du mouvement littéraire, et qui d’ailleurs formait une contrée bien à part : la West-Flandre. Pays essentiellement agricole, sans grandes villes industrielles, et que n’atteignaient pas les chemins de fer ; terre où le passé se perpétuait vivant, où le peuple parlait encore toujours le doux et imagé flamand du Moyen Âge, et restait inébranlablement attaché à sa religion traditionnelle. Gezelle, qui était prêtre et professeur au collège de Roulers, a été l’expression de ce milieu, mais en même temps il s’est exprimé lui-même d’une façon si complète, que son œuvre en prend une signification d’humanité universelle.

    A. Vermeylen par I. Opsomer

    mac orlan,gezelle,radio,traduction,poésieJe crains qu’il ne me soit difficile de vous donner une idée de ce qu’est l’œuvre de Gezelle. Il le faudrait bien pourtant, puisqu’il est admis aujourd’hui par les critiques les plus autorisés que Gezelle est le plus grand poète que les pays de langue néerlandaise aient eu depuis le XVIIe siècle, et puisque c’est peut-être le seul de tous nos poètes qui mérite, sans conteste, une gloire européenne. Malheu- reusement, c’est le moins traduisible qu’il y ait. Dès qu’on le transpose, il perd sa personnalité la plus intime : cette musique spirituelle d’une richesse de rythmes, d’une subtilité et d’un accent profond dont je ne trouve de parallèle chez personne.

    S’il est quelqu’un qu’on puisse appeler poète par la grâce de Dieu, c’est bien celui-là : n’ayant d’autre ambition que de dire aussi simplement que possible, en dehors de toute convention, mais aussi complètement que possible, avec les nuances les plus indéfinissables, ce qui se passe autour de lui et en lui, - la réalité qu’il voit, et celle, infinie, qu’il sent. Dans l’ordre de la nature, nul n’a rendu de façon aussi originale et aussi juste les mille mouvements et demi-teintes imperceptibles des choses et des êtres ; dans l’ordre des sentiments, il a baigné les remous de l’émotion d’une musicalité et d’une lucide clarté d’âme, qui est le sublime dans la simplicité. Et au point de vue de la forme, cet homme, dont tous les sens étaient affinés à tel point que chez lui, si l’on peut dire, la sensation est de la pensée, sut se créer une langue poétique d’une diversité, d’une force, d’une souplesse aérienne, qu’on ne soupçonnait pas avant lui. Il a su faire du néerlandais, que des esprits mal informés tenaient encore pour un vague patois, une langue à la fois aussi primesautière, aussi naturellement claire, aussi savoureusement jaillie du langage populaire que l’anglais de Burns, et en même temps aussi hardie, aussi élastique, aussi capable d’exprimer les nuances les plus fugitives que le français d’Arthur Rimbaud ou de Jules Laforgue. Je le comparerais volontiers à Verlaine, mais avec quelque chose de plus sain et de plus large, quelque chose de plus généralement humain. Pour l’infinie variété, la création incessante des rythmes qui doivent dire toutes les formes possibles de la vie, je ne trouve pas d’équivalent en littérature. Toute comparaison d’ailleurs n’est que très approximative, et, pour conclure, Gezelle était Gezelle.

    Les qualités essentielles de son art étaient en germe dans ses premiers poèmes et se développèrent bientôt avec tout le charme d’une force ingénue. Puis, une catastrophe survint, qui brisa sa vie : ce jeune professeur ecclésiastique ne rentrait pas assez dans les cadres admis, la forme même de sa pensée brisait les conventions dont vivait son milieu. Le conflit éternel entre l’homme supérieur et la médiocrité normale fit le reste : Gezelle dut quitter le collège de Roulers ; peut-être même réussit-on à le faire douter de lui-même, car cette âme de croyant si fière et si pure sombra pour longtemps dans le découragement. Il nous faut respecter le drame intime qui le déchira : l’histoire n’a pas à connaître de ce qui se passa au fond de cette conscience. Mais la blessure fut si profonde que Gezelle, qui avait alors à peine trente ans, se tut. Ce qu’il a produit entre 1860 et 1890 tiendrait en une mince plaquette. Pendant trente ans, cette bouche fut quasi muette, ce cœur fut scellé, enterré quelque part au fond d'une petite ville.

    mac orlan,gezelle,radio,traduction,poésie, august vermeylenNous devons à cette crise une série de poèmes que Gezelle dut considérer alors comme son chant du cygne ; il consentit avec peine à ce qu’un de ses amis les publiât, en 1862. Ils viennent d’un cœur saignant et ont un accent tragique, une subjectivité immédiate, qui les différencie de tous les autres vers de Gezelle. Ce fut une effusion unique de tout ce qu’il y avait eu en lui d’amour et de douleur. Car il semble bien que sa plus grande souffrance fut d’être violemment séparé de l’affection de certains de ses élèves : sa plainte s’exhala en paroles de fièvre, en sanglots, en prières, et ces vers-là peuvent compter parmi les plus beaux que l’amitié ait jamais inspirés. Puis vint l’apaisement, peu à peu, et une lumière plus tranquille, d’une suavité mystique, baigne les derniers poèmes de cette période.

    Cependant le public capable de comprendre des modulations aussi subtiles, aux environs de 1860, était fort clairsemé. Gezelle, retiré dans son coin, seul, meurtri, fut conspué par la critique. Et puis, la critique usa de son arme la plus efficace : le silence. Elle ne le connut plus.

    Ce qu’on reprochait à Gezelle, c’était d’abord, cela va sans dire, d’être un poète. On admettait la description un peu terre-à-terre du milieu dans lequel on vivait ; on saisissait une chanson politique, une ode nationale, toutes choses qui ont un but, et dont le sens est parfaitement défini ; mais la poésie essentielle de Gezelle passait par dessus les têtes de ce temps-là. D’autre part, on le traitait de particulariste, et c’est là un point sur lequel il est nécessaire d’attirer un instant votre attention. Car Gezelle fit école, et son “particularisme” est même, aujourd’hui, redevenu une actualité. Gezelle et ses disciples prétendent avoir le droit de puiser abondamment dans la langue populaire, en la stylisant, bien entendu. En Hollande, deux siècles et demi de grande culture avaient transformé l’esprit du néerlandais, l’avaient fixé dans un moule parfois un peu conventionnel, un peu trop livresque ; c’était ce hollandais qui en Belgique donnait le ton, était la langue littéraire. Mais la West-Flandre, toujours isolée, n’avait pas suivi l’évolution générale. Son idiome, d’une richesse inouïe, était une forme surannée du néerlandais. Les soi-disant particularistes, rejetant toute convention, et amoureux avant tout de réalité directe et spontanée, affirmèrent que, pour ce qu’ils avaient à dire, cette forme surannée mais vivante était plus belle que le néerlandais classique. Ils ne se contentèrent pas de l’affirmer : aujourd’hui qu’ils comptent parmi les auteurs les plus lus, même en Hollande, ils ont imposé leur idée à coup de chefs-d’œuvre, et l’on commence à s’y faire. On commence même à comprendre qu’ils font comme des quantités de poètes de tous les temps, qui trouvaient nécessaire de rajeunir le langage poétique à l’aide d’expressions du terroir : et si l’on admet que le français de Rabelais est bien du français, malgré qu’il soit rempli de néologismes, on ne peut contester que le langage poétique de Gezelle ne soit du néerlandais. Et d’ailleurs, quelle ironie dans le mot : ce sont précisément les “particularistes” qui ont le plus contribué à l’expansion de notre littérature au delà des frontières ! »

     

    August Vermeylen

    « Les lettres néerlandaises en Belgique depuis 1830 », 1905

     

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    G. Gezelle, billet de 5000 francs belges (1982-1994)

     

    couverture

    Liliane Wouters, Guido Gezelle, Poète d'aujourd'hui,

    éd. Pierre Seghers, 1965.

     

     

  • Michel Bartosik

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    Famille écrite

     

    bartosik,pink poets,anversDisparu le 1er février 2008 à l’âge de 59 ans, Michel Bartosik laisse six recueils de poésie ainsi qu’un grand nombre d’essais et de critiques. Membre d’un groupe d’une douzaine de poètes anversois dont quelques dandys, les Pink Poets (1972-1982), collaborateur des revues Hand, Impuls et Impuls/De tafelronde, il a cosigné en 1975 un manifeste en faveur d’une poésie axée sur la langue et non sur l’anecdotique tout en renvoyant à la tradition maniériste des XVIe et XVIIe siècles. Durant les dernières années de sa vie, Bartosik a donné de très belles contributions sur la poésie dans De leeswolf et Poëziekrant, faisant partager avec tact son amour de certaines œuvres contemporaines ou plus anciennes. Cet homme discret, dont l’œuvre est restée confidentielle, a vu son dernier recueil Geschreven familie (Famille écrite, Gand, PoëzieCentrum, 2003) couronné par une prestigieuse distinction littéraire. Très exigeant à l’égard de sa propre œuvre, retravaillant sans cesse ses créations avant de les publier, il reniait plus ou moins la première moitié de sa production. Polyglotte, il a laissé de rares vers en français ou encore en anglais. Nous proposons ci-dessous la traduction de deux poèmes de Geschreven familie.

     

     

    La chair fondante d’une pêche

    qui se fait jus (quand quelqu’un

    près de toi en dépouille le velours),

     

    morceaux émiettés de ton pain

    et mie humectée dans la bouche gorgée

    après gorgée       la dernière chose

     

    que nous ayons imaginée ensemble, un repas

    à étaler sur des heures, expectative du pauvre,

    désarroi d’enfants, à tes lèvres

     

    on a porté le jour suivant l’eau

    glacée      tu l’as repoussée 

     

     

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    toile de Louisa Chevalier

     

     

    La porte refermée, vient

    la délicatesse des fruits.

     

    Deux mains apeurées les ont disposés

    au soleil, derrière les vitres.

     

    Un pouce, le soir, sépare

    en évitant de trop trembler

    la blettissure du pourri.

     

     

    Quelqu’un, quelque part, rêve encore, goûte

    le geste avec lequel tu soulèves d’entre eux

    le plus petit, mastiques, jusqu’à l’exténuation, une chose

     

    trop sèche

     

    traduction D. Cunin

     

     

    Œuvres poétiques

     

    Omtrent vos Reynaert 3 (À propos de Maître Renart 3, en collaboration avec Peter Bormans, Geert Currinckx et Freddi Smekens, 1968)

    Linguïstiek (Linguistique, 1975)

    De verzamelnaam der eenzaamheid (Le nom générique de la solitude, 1976)

    Rigor mortis (1980)

    Sunt lacrimae (1990)

    Geschreven familie (Famille écrite, 2003)

     

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    addendum : en 2013, le PoëzieCentrum de Gand a réuni l’ensemble de l’œuvre poétique de M. Bartosik sous le titre Schroomruil

    éd. Koen Van Baelen, Peter Bormans, Anneleen De Coux, Matthijs de Ridder ; postface Erik Spinoy

     

    Merci à Louisa et à Koen

     

     

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