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Livres & Revues - Page 7

  • Poètes en revue

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    Action Poétique & la poésie néerlandaise

    premier inventaire

     

     

     

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    Ruud Meijer, Parijs Verplicht
    (photo: Karel Appel & S. Vinkenoog, par Ed van der Elsken)

     

     

     


    Dans Parijs Verplicht (Paris, passage obligé, Thomas Rap, Amsterdam, 1989), livre consacré aux années parisiennes des écrivains et artistes néerlandais de l’après-guerre (1945-1970), on trouve, à égale dis- tance de la deuxième et de la troisième de couverture qui reproduisent un dessin de Hugo Claus, un cahier photos de 16 pages. La première photo proposée au lecteur, prise au début des années 1950 rue de la Tombe-Issoire - chez l’essayiste Rudy Kousbroek (1929-2010) à moins que ce ne soit chez l’écrivain sud-africain Jan Rabie (1920-2001) –, montre six personnes : Rudy Kousbroek lui-même, connu entre autres pour avoir donné une traduction des Exercices de style, le poète fantaisiste Simon Vinkenoog (1928-2009), sa compagne de l’époque (l’Américaine Rory Warschauer), le poète et prosateur expérimental Bert Schierbeek (1918-1996), la peintre deluyphoto1.pngécossaise Majorie Wallace (1925-2005) qui épousa Rabie en 1955, et un jeune homme au bouc : Henri Deluy. C’est quelque temps plus tôt, par une fin d’après-midi de 1950, dans le café Reynders de la Leidseplein d’Amsterdam que ce dernier avait fait, par l’inter- médiaire de celle qui allait devenir son épouse - Anna Maria van Soesbergen (1927-2007) - la connaissance d’un groupe d’artistes néerlandais à peine plus âgés que lui : Lucebert (1924-1994), Gerrit Kouwenaar (né en 1923), Rudy Kousbroek, Remco Campert (né en 1929), Bert Schierbeek (1918-1996), Jan G. Elburg (1929-1992)… Il deviendra l’ami de certains, reverra à l’occasion les autres, tant en Hollande qu’à Paris - le Mabillon leur servant plus ou moins de QG - où la plupart d’entre eux vivront plusieurs années, voire plusieurs dé- cennies.

    couvHolstDeluy.pngAvec sa femme néer- landaise et le franco- phile Dolf Verspoor (1917-1994), le natif de Marseille - qui a entre temps publié à La Haye une plaquette de poésie Titr’animal agrémentée de linos de Harry Dis- berg (1951) - va bientôt faire ses premières armes de traducteur : en 1954 paraît chez Seghers, dans la collection « Autour du monde », Par-delà les chemins. Le volume comprend un choix de pièces de quatre recueils : Voorbij de wegen (Par-delà les chemins, 1920), De wilde kim (L’Horizon sauvage, 1925), Een winter aan zee (Un hiver à la mer, 1937) et Onderweg (En route, 1940) de celui qui est considéré à l’époque, aux Pays-Bas, comme « le Prince des poètes », le chantre de la solitude : Adriaan Roland Holst (1888-1976), membre majeur de la génération de 1910 aux côtés de J.C. Bloem, P.N. van Eyck et Geerten Gossaert, autant de talents qui se sont épanouis sous le patronage de l’une des grandes figures du « Mouvement de 1880 », Albert Verwey, un fidèle de Stefan George. Ami de tous les poètes, Roland Holst «reste à l’écart des disputes littéraires, élaborant une œuvre où se fondent les plus hautes tendances de la sensibilité néerlandaise», précise le texte de présentation. Les traducteurs ajoutent qu’ils auront atteint leur but si leur travail «contribue à attirer l’attention sur la poésie néer- landaise tellement ignorée en France». Ils entre- prennent d’ailleurs d’autres efforts en ce sens.

     

    Les 80 ans d'Adriaan Roland Holst


    La même année, en effet, Henri et Anna Maria col- laborent à une petite anthologie trilingue, La Hollande lyrique, publiée sous les hospices du Comité Central du Centre P.E.N. des Pays-Bas qui présente quelques auteurs rangés parmi les Vijftigers (Paul Rodenko, Gerrit Kouwenaar, Hans Lodeizen et Remco Campert - tous traduits par Henri Deluy), mais aussi l’inclassable Gerrit Achterberg (4 poèmes traduits par Deluy). Toujours en 1954, le n° 4 (1ère série) ronéotypé d’Action poétique propose un éventail plus large. On y retrouve, après une présentation de la main du Marseillais, les noms de Roland Holst, Gerrit Achterberg, Paul Rodenko et Hans Lodeizen, mais aussi ceux des Flamand Hugo Claus (1929-2008) et Paul van Ostaijen (1896-1928), des maîtres défunts Herman Gorter (1864-1927), H. Marsman (1899-1940), M. Nijhoff (1894-1953) et J.J. Slauerhoff (1898-1936) ainsi que ceux des jeunes Lucebert et Simon Vinkenoog. Une partie de ces poèmes seront repris dans des numéros ultérieurs de la revue.

    couvAP20.jpgPar la suite, et jusqu’à aujourd’hui d’ailleurs, c’est surtout la poésie de la génération des Vijftigers (poètes des années 1950), qui retiendra l’attention de Henri Deluy - à l’ex- ception de celle du Flamand Hugo Claus (traduite par d’autres assez tôt), lequel a lui aussi évolué dans les années cinquante au sein de «la colonie hol- landaise» de Paris, époque à laquelle il se réclamait d’Antonin Ar- taud. Avec son épou- se, Deluy donne ainsi 3 poèmes du Zélandais Jan G. Elburg dans le n° 18 d’Action poétique (1962) : «courte autobiographie», «vouloir», «aubade pour normes morales». Puis, en avril 1963, le n° 20 de la revue présente sept poètes expérimentaux des Pays-Bas dont la plupart avaient fait partie du « Experimentele Groep Holland » aux côtés de Karel Appel, Corneille, Asger Jorn… : Lucebert, Kouwenaar, Campert, Schierbeek, Elburg, Vinkenoog et un nouveau venu, Hans Andreus (1926-1977). Ami de longue date de Lucebert, ce dernier, ainsi que l’a révélé son biographe, avait combattu sur le front de l’Est au sein de la légion des volontaires dans la Waffen-SS. Dans ce numéro, Deluy rappelle le parcours de ces poètes «expérimentaux» hollandais dont les premières manifestations remontent à 1945, ainsi que les liens étroits qu’ils ont entretenus avec le groupe CoBrA né fin 1948 au café Notre-Dame. Ils représentent « la cassure avec les formes reçues de la poésie néerlandaise. Tout l’apport moderne en poésie, Dada et le surréalisme, l’expressionisme allemand et Maïakovski, le marxisme et la psychanalyse, faisant irruption dans ce domaine clos qui semblait n’avoir pas été touché, pour l’essentiel, par les boule- versements de la poésie mondiale après la guerre de 1914-18 ». Le passeur en profite pour redonner quelques traductions de poètes qui lui sont chers et qui sont chers à cette génération des années 1950 – alors encore très peu lue en Hollande –, à savoir le sensitiviste et marxiste Herman Gorter, le patient psychiatrique et meurtrier Gerrit Achterberg, le leucémique Hans Lodeizen. Pour six de ces poètes expérimentaux, Deluy a sélectionné deux poèmes ; Lucebert tient son rang d’ « Empereur des Vijftigers » avec cinq poèmes.

     

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    Action poétique, n° 91, printemps 1983

     

    Pendant un quart de siècle, Deluy poète, traducteur et éditeur va parcourir et visiter d’autres contrées. En août 1974, il offre tout de même sa collaboration à une petite anthologie dans le cadre de la Biennale Internationale de Poésie de… Knokke-Heist : Deux générations de poètes Néerlandais 1950-1970 (on y retrouve les noms de Gerrit Kouwenaar, Bert Schierbeek et Jan G. Elburg). Au printemps 1983, sous le titre « avec Cobra », il consacre la quasi intégralité du n° 91 d’Action poétique aux « Poètes Expérimentaux des Pays-Bas », s’en tenant presqu’exclusivement aux années 1948-1954. Sur le modèle de la couverture (de Frédéric Deluy) inspirée d’un dessin de Lucebert, certaines pages sont agrémentées d’illustrations et de montages d’artistes de la mouvance CoBrA (Karel Appel, Corneille, Jan Cox). Cette fois encore, il s’agit, pour ce qui est des traductions, d’un travail à quatre mains avec Anna Maria. Une place est accordée à deux poètes décédés: Jan Hanlo (1912-1969), dont l’œuvre moins en vue, moins expérimentale, se distingue par une touche romantico-humoristique, et Paul Rodenko (1920-1976), considéré comme un précurseur des Vijftigers et à qui l’on doit une anthologie de la poésie d’avant-garde (Nieuwe griffels, schone leien, 1954), laquelle a joué un grand rôle dans la reconnaissance de la nouvelle génération.

    Jan Elburg

    JanElburgphoto.jpgS’il a été proche de Jan G. Elburg et Lucebert, Deluy s’est également senti beau- coup d’affinités avec le Frison Bert Schierbeek. Dès 1954, la plaquette Het bloed stroomt door (le sang coule) publiée à Amsterdam (éd. De Bezige Bij) et illustrée par Karel Appel, proposait sa traduction française des quatre poè- mes de ce petit ensemble. Le Hollandais, qui s’était dans un premier temps af- firmé comme auteur de romans «compositionnels», sera invité au Centre littéraire de Royaumont en avril 1989 puis à la première Biennale des Poètes (novembre 1991). Ces échanges aboutiront à la parution de deux recueils en traduction : Formentera (Formentera, 1984; Luzarches, Les Cahiers de Royaumont, n° 20, 1990) et La Porte (De deur, 1972; Paris, Fourbis, 1991). Le n° 125 d’Action poétique et le recueil de la Biennale (Une autre anthologie) proposent également quelques poèmes de Schierbeek («John Akii Bua» et «Coquelicots»). Entre 1992 et 2009, un seul autre poète d’expression néerlandaise a participé à la Biennale (l’édition de novembre 1997), une femme, la dendrographe amstellodamoise Esther Jansma dont on peut lire cinq poèmes dans l’anthologie Noir sur blanc (Fourbis, 1998, trad. D. Cunin). L’an passé, ce fut au tour de Saskia de Jong d'être invitée aux manifestations de la Biennale.


    C’est vers le milieu des années 1990, suite entre autres à un séjour à Oegstgeest, près de Leyde, où il rencontre de jeunes auteurs, que l’intérêt de Henri Deluy pour la poésie néerlandaise va connaître un nouvel élan. De fait, ces dix dernières années, Action poétique a accordé une jolie place aux nouvelles générations tout en s’attachant à rappeler le rôle des dadaïstes et des expérimentaux. Cette évolution a été rendue possible grâce, entre autres, à la collaboration de quelques poètes et traducteurs et au soutien du NLPVF (rebaptisé depuis cette année Nederlands Letterenfonds), l’organisme amstello- damois qui promeut depuis une vingtaine d’années la littérature néerlandaise à l’étranger – on n’est plus en effet à l’époque où l’on pouvait, comme Edmond Jaloux, écrire : «l’ignorance générale où l’on est à l’égard de la langue néerlandaise ne lui permet pas une large diffusion : il est vrai que les pouvoirs publics n’ont jamais rien fait pour qu’elle fût connue».

     

    Un rapide survol

     

    couvAP156.jpgn° 156 (automne 1999) : hommage à Lucebert à travers le poème que Kouwenaar a dédié à son ami défunt, en regard d’un fac-similé du peintre-poète et, sous le titre «Poètes néerlandais, au- jourd’hui», un dossier de 75 pages proposant un choix de textes de douze poètes nés dans les an- nées 1950 ou 1960 dans une traduction de Pierre Gallissaires et Jan H. Mysjkin. Ce n’est pas tout: un peu plus loin, une quinzaine de pages sont consacrées à Paul van Ostaijen dans lesquelles le rédacteur en chef livre quelques-unes des traductions qu’il reprendra en 2001 dans une anthologie de l’œuvre de ce poète expressionniste majeur des Flandres : Nomenclature (Farrago). L’ensemble est présenté entre une photo de Rotterdam en couverture (par Jan H. Mysjkin), et des deuxième, troisième et quatrième de couverture reproduisant des poèmes visuels de Van Ostaijen.

    couvAP171.jpgn° 171 (mars 2003): à l’occasion du Salon du Livre 2003 qui a cette année-là deux invités d’honneur, les Pays-Bas et la Flandre belge, Henri Deluy se joint les services de Kim Andringa, Erik Lindner et Éric Suchère pour confectionner un dossier « Cinq poètes néerlandais aujourd’hui » (Martin Reints, Tonnus Oosterhoff, Jan Baeke, Frank Koenegracht et Erik Lindner). La com- plicité entre Erik le Hollandais et Éric le Français - bientôt épaulés par Kim Andringa - a d’ailleurs permis la réalisation de plusieurs projets éditoriaux. Ce n° 171 offre en quatrième de couverture la recette de l’erwtensoep, c’est-à-dire la soupe de pois cassés, plat traditionnel hollandais que l’on consomme en particulier lors du réveillon du Nouvel An.


    couvAP181.jpgn° 181 (septembre 2005) : ce numéro intitulé Dada Da accorde une place à Theo van Doesburg et Paul van Ostaijen (2 textes théoriques traduits par Kim Andringa, agrémentés de fac-similés de poèmes visuels) ainsi qu’à Lucebert (le poème «Arp» traduit par Henri Deluy). Relevons la présence d’un petit portrait du collectionneur, artiste et essayiste hollandais Paul Citroen (1896-1983), dessiné par Walter Mehring.

    couvAP182.jpgn° 182 (décembre 2005) : nouvel hommage à Luce- bert, cette fois à travers un échange de lettres d’Éric Suchère et Erik Lindner, et l’un des poèmes les plus célèbres de l’empereur des Vijftigers, «lettre d’amour à notre épouse suppliciée indonésie» (trad. Kim Andringa). Sans oublier la couverture qui reproduit un dessin du peintre-poète. Par ailleurs, toujours dans une traduction d’Andringa, on peut lire pour la pre- mière fois en français Tsead Bruinja (né en 1974) qui écrit aussi bien en frison qu’en néerlandais.

    couvAP185.pngn° 185 (septembre 2006) : ce numéro comprend un dossier sur la poésie belge réalisé par Jan Baetens et Rossano Rossi et présenté par Jean-Pierre Verheggen : «Belges et Belges» ; hormis Baetens qui écrit en français, on dénombre cinq auteurs Flamands: Peter Holvoet-Hanssen (poèmes tirés du recueil Strombolic- chio), Paul Bogaert («Dis- cours»), Jan Lauwereyns («Le moustique tigré asia- tique»), Peter Theunynck («Avis des Panamerican Airlines & C°») et Dirk van Bastelaere (choix de poèmes du recueil Plus loin en Amérique) (trad. Reine Meylaerts, Elke de Rijcke, Jan Baetens et Daniel Cunin)

    couvAP189b.pngn° 189 (septembre 2007) : on retrouve Éric Suchère et Erik Lindner ainsi que Kim An- dringa pour un dossier de 22 pages sur Hans Faverey. Né à Paramaribo en 1930, et décédé à Amsterdam en 1990, ce dernier considérait ses poèmes comme des créa- tions autonomes, des «exer- cices de détachement» nés de l’angoisse de la mort. Suchère signe un «petit récit anec- dotique d’une découverte», Lindner «32 notes» sur la vie et l’œuvre de Hans Faverey. Suivent six séries de poèmes en traduction.

    couvAP191-192.jpgn° 191 & 192 (mars-juin 2008) : dans ce numéro double, le rédacteur en chef rend hommage à celle qui lui a permis de découvrir la poésie et les poètes néerlandais, mais aussi, «au tout début des années cinquante, ce que pouvait être la lecture et l’écriture» : Anna Maria van Soesbergen, disparue peu avant. Ainsi peut-on lire trois poèmes de Lucebert («Rêve», «Sommeil», «O tempora o mores») et un poème de Paul Rodenko («Statue», dans une version différente de celle parue dans le n° 91) traduits par la Néerlandaise des décennies plus tôt.

     

     

     

    O tempora o mores

     

     

    après tant de morts rien de bon ou de mieux

    maintenant que la distance a réduit le gros tas

    en taupinière à l’horizon

    l’espoir de vivre peut à nouveau tuer le doute

     

     

    ou alors le doute redevient un luxe ou l’habitude

    fixer le soleil baisser les yeux pour voir

    le jour brûler en une courte nuit

     

     

     

    couvAP193.jpgn° 193 (septembre 2008): l’ «Ensemble Hannah Höch» de ce numéro comprend une présenta- tion de la femme de lettres néerlandaise Til Brugman (1888-1958), compagne de l’artiste allemande pendant une dizaine d’années. De cette représentante de la mou- vance Dada en Hollande, on peut découvrir cinq poèmes visuels et un autre, dédié à son amie plasticienne, dans sa ver- sion néerlandaise et deux versions françaises, la première de Saskia Deluy (fille d’Anna Maria van Soesbergen et d’Henri), la seconde de Kim Andringa, devenue pour ainsi dire incontournable (elle est par ailleurs l’une des rares à traduire de la littérature frisonne).

    couvAP198.jpgn° 198 (décembre 2009) : cette fois, un dossier «Six poètes néerlandophones». La deuxième de couver- ture annonce la couleur en reproduisant une œuvre de Hendrik Nicolaas Werkman - à qui l’on doit entre autres la revue The next call -, artiste mort sous les balles d’un peloton d’exécution alle- mand le 10 avril 1945. On retrouve ce typographe et graphiste expressionniste un peu plus loin dans l’article du poète et plasticien brugeois Renaat Ramon: «Constructivisme & dada, Van Doesburg / Werkman, De Stijl, Mécano et The Next Call : l’avant-garde aux Pays-Bas», texte rehaussé de poèmes de I.K. Bonset (pseud. de Theo van Doesburg) et d’œuvres de H.N. Werkman. Par ailleurs, sous le titre «Des craquelures dans l’émail», Erik Lindner propose un aperçu de la poésie néerlandaise des années 2000. Suit un choix de l’œuvre de six poètes dans une traduction de Henri Deluy et Kim Andringa. Hormis Erik Lindner, il s’agit d’auteurs (certains sont aussi des compositeurs) qui ont percé en Hollande et en Flandre au cours des dix dernières années : Arnoud van Adrichem, Rozalie Hirs, Saskia de Jong, Ruth Lasters, Els Moors et Samuel Vriezen. Dans ce numéro, la poésie néerlandaise ne s’arrête pas là : elle remplit la quatrième de couverture avec la dégustation du hareng nouveau et la recette du hutspot (hochepot) :

     

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    Cette attention accrue portée à la poésie batave depuis 1999 va conduire Henri Deluy à confectionner, avec une poignée de traducteurs, un mets de résistance qui devrait voir le jour sous peu : Poètes néerlandais de la modernité (1880-2010). Cette anthologie offrira un panorama de la poésie des Pays-Bas à travers près de trente poètes dont la moitié environ ont déjà figuré, à une date plus ou moins récente, dans Action poétique. En 2005, l’amour jamais démenti du Français à l’égard de l’œuvre de Lucebert avait d’ailleurs abouti à la publication d’Apocryphe (Le bleu du ciel, 2005, traduit en collaboration avec Kim Andringa) qui regroupe les premiers recueils du plus grand des Vijftigers (les œuvres complètes sont sept fois plus épaisses).

    poème de P. van Ostaijen (4e du n° 156)

    couvap156b.pngLe présent inventaire, aussi exhaustif que pos- sible, montre que le rédacteur en chef d’Action Poétique a surtout gardé le regard rivé au-delà des fleuves (Rhin, Meuse, Waal). Il l’a tout de même posé à quelques reprises sur la Flandre, en par- ticulier pour revenir sur les traces du célèbre poète et théoricien Van Ostaijen, pionnier du modernisme dans sa contrée, emporté à l’âge de 32 ans par la tuberculose. Aucune revue en France n’a accordé autant de place à cette poésie septentrionale. La poésie hollandaise - et flamande - reste encore en grande partie méconnue dans notre pays, mais un cap a sans doute été franchi ces dix dernières années, et on observe une tendance similaire pour ce qui est du genre romanesque.

    couvHoogtijlangddeseine.jpgTrès prochainement doit paraître aux Pays-Bas un ouvrage assez épais : Hoogtij langs de Seine (éditions Atlas), du peintre et baroudeur Diederik Stevens, une histoire des « Grandes heures » des écrivains et artistes néer- landais sur les bords de la Seine entre 1948 et 1968. Autrement dit, Parijs verplicht revisité et étoffé. Dommage simplement que l’auteur ait omis d’interroger l’un des témoins privilégiés de cette époque alors même que la voix de la plupart des Vijftigers s’est tue, nous laissant autant de « secondes bleues dérobées pour un plus tard ».

     

     

    Daniel Cunin

     

     

    Ce texte propose une version revue et augmentée de l'article qui a paru dans Action Poétique, n° 200, juin 2010, p. 131-136.

     


    Jeudis littéraires, par Pascale Casanova, 2 juillet 1998, France Culture

    Avec Pascal Boulanger et Liliane Giraudon

     

     

  • L’Énéide revisitée

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    Un chef-d’œuvre des lettres flamandes

     

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    Dans Énée ou la vie d’un homme (Aeneas of de levensreis van een man, 1982, rééd. 1999), le romancier Willy Spillebeen propose, en douze chapitres, une réécriture de l’Énéide du point de vue d’Énée, à la fois « je », « tu » et « il » au sein de la narration : « Moi, ou bien est-ce toi, toi qui m’est étranger, ou moi, Énée, ou bien encore lui, cet autre, je ne sais, je ne sais pas qui je suis, qui tu es ni qui il… Lui, Énée, lui la légende, les mensonges… ». Énée a perdu sa voix, son corps ne lui obéit plus. Allongé sur sa couche, il n’est plus que souffrance. Même ouvrir les yeux lui est devenu un supplice. La mort ne saurait tarder. À ses côtés, il a encore sa fille Elissa, Elissa qu'il confond presque dans son amour avec Didon. De nombreux souvenirs lui reviennent, de nombreux fantômes aussi et des courses ensanglantées à dos de cheval. On comprend pourquoi il s’est distancié de son père Anchise auquel il réservera tout de même de dignes obsèques. Le moribond revit aussi ses amours - par exemple avec Créuse qui lui a donné un fils, Ascagne - et sa carrière militaire : blessé, il choisit Théodore, lequel lui ressemble comme deux gouttes d’eau, pour le remplacer ; les actions héroïques de ce dernier seront attribués à Énée. Par devoir, Énée a renoncé à Didon et épousé Lavinia. Villages détruits et villes à édifier réapparaissent dans l’esprit de l’homme qui agonise. Alors que son existence prend fin, il laisse justement une cité qui est en cours de construction. Entre les drames qu’il a traversés se glissent malgré tout des parenthèses gaies, des instants de bonheur même si « l’homme n’est pas fait pour le bonheur, mais pour exercer sa curiosité ». Doutes sur ses ascendances divines, attirance pour le beau périssable, fait de terre, de chair et de sang, liens d’amitié qu’il est parvenu à tisser, furieuse passion des sens, ce ne sont là que quelques-unes des facettes qu’Énée explore, facettes de l’homme qu’il a été, qu’il a cru être au-delà de la légende avant d’enfin naître, à travers la mort, à une nouvelle vie : « Énée naît pour de bon… je meurs… je suis libre. » 

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    P.-N. Guérin, Énée et Didon, 1815 

     

    Mme Perrine Galand-Hallyn a évoqué Énée ou la vie d’un homme lors de plusieurs cours et conférences : « Le roman de W. Spillebeen apparaît comme une réécriture de l’Énéide du point de vue d’Énée. C’est l’une des rares réécritures centrées sur ce personnage, le plus souvent ce sont l’amour de Didon, la descente aux Enfers ou encore le voyage initiatique (par exemple dans La Modification de Michel Butor) qui ont été privilégiés (voir la thèse de Seuret-Deran, Le Personnage d’Énée dans la littérature française, 2001). Le travail de Spillebeen est ici, par certains aspects, comparable à celui de Giono dans Naissance de l’Odyssée : ces deux œuvres ont en commun la déconstruction systématique du mythe héroïque. Giono a montré comment l’histoire d’Ulysse s’est construite malgré lui, gommant ses erreurs et ses maladresses. Willy Spillebeen place dans la bouche d’Énée la même dénonciation des valeurs héroïques. Il opère ainsi une relecture “alexandrine” de l’Énéide : il s’inscrit en quelque sorte dans la lignée d’Ovide (comme de ses suiveurs antiques et modernes), qui a probablement cherché lui-même à démythifier dans ses œuvres l’idéologie mise en place par l’empereur Auguste, en opérant une “réduction épique”, c’est-à-dire une critique des valeurs collectives, une réutilisation à rebours ou décalée des thèmes de l’épopée, ainsi qu’une modification du point de vue de l’énonciation, de l’objectivité à la subjectivité.

    P. Lepautre, Énée  portant Anchise, 1716, Le Louvre

    énée,virgile,butor,giono,énéide,flandre,roman,willy spillebeen,héros,antiquité,mythes« Le roman de Spillebeen est symboliquement composé de douze chapitres. Il s’ouvre sur les angoisses d’Énée agonisant, victime d’une crise cardiaque (tout aussi symbolique). Dans un flash-back, le “héros” revoit tous les épisodes de sa vie qui ont été travestis par la légende (et l’Enéide), et dévoile ses échecs, de sorte que la “morale” virgilienne de tous les épisodes s’en trouve déconstruite. Anchise apparaît lâche, violent, autoritaire. Énée déteste la guerre et les armes (pendant la guerre de Troie, il est blessé et Théodore, un guerrier revêtu de son armure, accomplit ses exploits à sa place, comme Patrocle l’avait fait pour Achille), il ne croit ni aux dieux ni au surnaturel (sa mère est non Vénus, mais une simple bergère morte en couches). Ses sentiments pour Créuse et Lavinia, et même pour Ascagne, sont ambigus. Son seul amour aura été Didon, et l’ensemble du roman est structuré autour de cet amour, infiniment préférable à toute mission collective. Spillebeen, à travers ce roman qu’il a reconnu comme autobiographique, règle ses comptes avec la figure paternelle, la religion, le devoir. » (source)

    L'auteur en août 2009

    énée,virgile,butor,giono,énéide,flandre,roman,willy spillebeen,héros,antiquité,mythesL’écrivain flamand s’est montré à la hauteur de son ambitieux projet : il est parvenu à trouver une structure originale pour faire revivre les Troyens et Énée au sein d’un univers soutenu par des descrip- tions à la fois expressives et élégantes. Mariées à la beauté de l'écriture, l’intensité et la densité de la narration confèrent à ce roman une dimension intemporelle.  (DC)

     

     

  • Littérature néerlandaise en traduction

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    Dans la magazine Culture de l'Université de Liège, le journaliste belge Michel Paquot consacre un dossier aux lettres néerlandaises. Il s'entretient avec Erik Spinoy, Emmanuèle Sandron et Daniel Cunin, s'intéresse au cas Pieter Aspe et propose un petit aperçu de parutions récentes.


    CouvReveEnRouteverslafin.jpgLes éditeurs français traduisent régulièrement des auteurs néerlandais. Actes Sud, Gallimard et Le Castor Astral sont particulièrement actifs sur ce terrain. Le premier réunit des auteurs comme Cees Nooteboom, Hella Haasse ou Anna Enquist au sein de la collection « Lettres néerlandaises » dirigée par Philippe Noble ; le deuxième rassemble Willem Frederik Hermans, Kader Abdolah, Harry Mulisch, Adriaan Van Dis ou Jeroen Brouwers dans sa collection « Du Monde entier » ; et le troisième, via la collection Escales du Nord codirigée par Francis Dannemark, se montre ouvert à la fois aux Flamands (Jef Geeraerts, Willem Elsschot, Stefan Hertmans, Geert van Istendael, Louis Paul Boon) et aux Hollandais (Benno Barnard, Doeschka Meijsing). Mais d'autres éditeurs ne sont pas en reste, par exemple Héloïse d'Ormesson (Stefan van Brijs, Vonne van der Meer), Phébus (Karel Schoeman, Gerard Reve) ou Denoël (Elle Eggels, Carl Friedman, Paul Gellings, Sakia Noort). Voici quelques parutions récentes. (lire la suite)

     

    A lire sur le même site un papier consacré à l'auteur flamand Peter Verhelst, ou encore un dossier sur la traduction littéraire et un article sur la traduction d'Alice in Wonderland.


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  • Renaissance littéraire et artistique

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    QUELQUES PAGES DE L'HISTOIRE DES PAYS-BAS

    DE H.A. ENNO VAN GELDER

     

     

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    On trouve en langue française une poignée d'ouvrages exposant l'histoire de la Hollande, le plus récent étant Histoire des Pays-Bas de Christophe de Voogd (Hatier, 1992; rééd. Fayard, 2003). Les PUF ont donné un Que sais-je? en 1966. En 1932, le provençaliste Salverda de Grave (1863-1947) offrait aux lecteurs d'expression française un petit volume intitulé La Hollande (Rieder, Paris). Quatre ans plus tard, un historien, néerlandais lui aussi, publiait chez Armand Colin une Histoire des Pays-Bas du XVIe siècle à nous jours. Ce petit volume - le n° 188 d'une collection qui se proposait de « Vulgariser sans abaisser » - de H.A Enno van Gelder (1889-1973) comporte un avant-propos de son confrère oranais Henri Hauser (1866-1946), avant-propos qui se termine par ces mots: « Que les compagnons du Taciturne, les patriotes alors révoltés contre le monarque de l’Escorial aient pour fils légitimes les ingénieurs qui, sous nos yeux, transforment en polders la mer intérieure, et aussi les juristconsultes qui ont mérité de voir s’élever à La Haye, le Palais de la Paix, espoir des nations qui veulent la justice, voilà ce que les Français ont besoin de mieux apprendre, comme ils ont besoin d’aller prendre à Java des leçons de politique impériale. »

     

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  • Europe du Nord

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    DESHIMA, hors-série n° 1

     

    Après trois ans d'existence, la revue française des mondes néerlandophones Deshima s'élargit au reste des pays du Nord. Cela devrait se traduire par un rythme de parution plus soutenu : deux numéros par an au lieu d'un, l'un étant plutôt consacré à la Scandinavie, l'autre aux terres d'expression néerlandaise.

     

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    Les responsables éditoriaux s'expliquent : « Deshima entre dans sa quatrième année, et comme chaque être vivant, elle se renouvelle de temps en temps. Ce nouveau numéro de Deshima comporte deux innovations majeures. Il s’agit d’une part du premier volume hors-série publié dans la revue. D’autre part, et c’est sans doute plus inattendu, Deshima se dote d’un nouveau sous-titre: « Revue d’histoire globale des Pays du Nord ». Cette évolution nous a paru logique. En effet, dans les trois numéros précédents, Deshima ne s’occupait pas uniquement des Pays-Bas et de la Belgique, mais donnait également une large place aux contacts culturels avec d’autres pays. Dès sa création, Deshima a présenté l’histoire dans une perspective qu’on appelle aujourd’hui en anglais « global history » et que nous voudrions rendre ici en français par l’expression « histoire globale ». Le choix de l’élargissement aux pays du Nord a également ses raisons. Les départements d’études néerlandaises et scandinaves de l’Université de Strasbourg collaborent régulièrement depuis plusieurs années. À travers le dernier numéro de Deshima et les séminaires intitulés « Chemins du Nord » organisés par les deux départements, nous avons découvert au fil de ces rencontres une histoire intimement imbriquée entre les pays néerlandophones et ceux de la Scandinavie. À titre d’exemple, dès le XVIIe siècle, des Suédois (C.-P. Thunberg) et même des Allemands (Philipp Franz von Siebold) étaient engagés par la Compagnie néerlandaise des Indes Orientales pour sillonner les mers du globe et partir à la découverte de terres encore inexplorées par les Européens. Ce mélange de nationalités était monnaie courante sur l’île de Deshima dans la baie de Nagasaki, alors que les Japonais ne pensaient avoir à faire qu’à des Néerlandais. Notre collaboration nous a finalement paru tellement fructueuse, que nous avons décidé de l’institutionnaliser en ouvrant Deshima aux autres pays du Nord pour que nos lecteurs puissent en profiter également. Bien entendu, la littérature occupera toujours une place de choix dans les prochains numéros. Pour mener à bien cette nouvelle orientation, Thomas Mohnike entre dans la direction de la revue en tant que spécialiste des pays scandinaves. Thomas Beaufils, quant à lui, travaille désormais à l'Université de Lille 3, mais reste bien entendu fidèle à son propre enfant. Sylvain Briens, nommé à l’Université Paris IV, contribuera également régulièrement à la rédaction de numéros. »

     

    Sommaire du numéro hors-série 1 - 2009

    Capitales culturelles et Europe du Nord /

    Kulturhauptstädte Nordeuropas

     

    Thomas Beaufils & Thomas Mohnike, « Deshima grandit ! », p. 5

    Sylvain Briens, « Capitales culturelles. Quelques éléments de définition », p. 7

    Arne Melberg, « Wo ist der Süden? Wo ist der Osten?  Literarische Varianten europäischer Grenzen », p. 17

    Sylvain Briens, « Paris, capitale culturelle scandinave du XIXe siècle ? Pèlerinages symboliques et transferts culturels », p. 33

    Javier Maestro, « Helsingfors (Helsinki), capitale culturelle à la fin du XIXe siècle », p. 51

    Lidia Gluchowska, « Totenmesse, Lebensfries und Die Hölle. Przybyszewski, Munch, Vigeland und die proto- expressionistische Kunsttheorie », p. 79

    Annie Bourguignon, « Art et mégalopole. Vilhelm Ekelund et Berlin », p 117

    Hubert F. van den Berg, « Der Sturm als Kunsthandlung und Nachrichtenbüro in der deutschen Propagandapolitik in den neutralen Nachbarländern während des Ersten Welt- kriegs », p. 135

    Klaus Müller-Wille, « CoBrA und Fin de Copenhague. Strategien kultureller Dekapitation im Umfeld Asger Jorns », p. 153

    Per Bäckström, « Stockholm – Hauptstadt der skandi- navischen Avantgarde der 1960er Jahre », p. 183

     

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    Résumés

     

    Sylvain Briens, Paris as Nordic Cultural Capital of the 19th century? Symbolic pilgrimages and cultural transfers

    At the end of the 19th century, a number of Nordic writers met in Paris, which represented a cultural capital for modernity in Europe. They wanted to escape from the intellectual environment of the Nordic capitals, which they considered as peripheries, in search for inspiration, stimulation and recognition. The aim of the article is to analyse in which way Paris became, in parallel with other cities such as Berlin, a place for aesthetic innovation and a centre for the Nordic writers in the construction of the modern project. It mainly focuses on the impact of Parisian intellectual environment on Nordic literary production at the end of the 19th century. By studying geographical, intellectual and social contexts of cultural fields, as well as by analyzing transfers and cultural mediations, it attempts to define the role of Paris as Nordic cultural capital of the 19th century.

     

    Arne Melberg, Wo ist der Süden? Wo ist der Osten? Literarische Varianten europäischer Grenzen

    Borders and limits are of obvious importance in Europe: this is demonstrated daily by masses of more or less illegal immigrants and by other forms of so-called trafficking. The article analyses literary versions of two specific frontiers in the works of a wide range of European authors: The South and the East, both showing quite different characteristics. The literary version of the border called South gives us something that is definite and dividing – although the components making up the borderline have shifted during the ages. The border called East, on the other hand, seems vague and extensive, more of a zone than a dividing line. In both cases, however, mythological interest is invested: the border – line or zone – is a place of drama and conflict, ultimately a drama of civilization. However, the literary investigations of the border are not concerned with law or traffic. The borders described are all located in the haven of imagination.

     

    Javier Maestro, Helsinki (Helsinfors) as Cultural Capital at the turn of the century?

    Helsinki, the capital of Finland, was called at the turn of the century by its Swedish name Helsingfors. At that time, it was the capital city of the Grand Duchy of Finland, a territory that was part of the Russian Empire. The article describes the cultural and political development of Helsingfors during the 19th Century. It evaluates the influence of Saint Petersburg and the heritage of the Swedish culture in the process that would lead Finland to autonomy. Through the creation of a number of modern newspapers published in Swedish or in Finnish and based in Helsingfors, the city contributed to the creation of a liberal public opinion in Finland. The article stresses finally the importance of the world exhibitions in Paris and London for the international recognition of a Finnish national cultural identity.

     

    Lidia Głuchowska, Requiem Mass, Frieze of Life and Hell. Przybyszewski, Munch, Vigeland and the proto-expressionistic art theory

    The article investigates in the beginnings of expressionistic art theory. It emphasises hereby the importance of the cross-aesthetic dialogue between the Norwegian artists Edvard Munch and Gustav Vigeland with the Polish-German author and critic Stanisław Przybyszewski. They made their acquaintance in the modernist milieu of end 19th century Berlin, but expanded their dialogue and activities to the major cities of Eastern, Central and Western Europe as Paris and Prague. Przybyszewski’s studies on Munch and Vigeland express an understanding of the artist and the viewer not merely as an aesthetic sensual subject, but as creators of their own right. These works did have an incontestable influence on the two artists and far beyond. However, those impacts remain to be studied in detail.

     

    Annie Bourguignon, Art and Megapolis. Vilhelm Ekelund and Berlin

    The article analyses the circumstances that led the Swedish poet and aphorist writer Vilhelm Ekelund to stay several years in Berlin at the beginning of the 20th century. Although Ekelund production is considered as one of the first examples of modernist poetry in Sweden, his attitude towards modernity has been globally negative. During his stay in Berlin, he suffered of the urban environment. In his essays and articles on the city, he condemned the way of life in the megapolis. His main interest in the German cultural life was the Neo-Hellenist tradition from Lessing to Nietzsche and the work of Goethe. The reading of Nietzsche was decisive for Ekelund and his inclination for Pre-Socratic philosophy. He claimed that the German culture represented classicism as opposed to modernity. He never became a poet of the megapolis. However, he did not reject totally the urban environment he experienced, and his stay in Berlin would have some influence on his later literary production.

     

    Hubert F. van den Berg, Der Sturm as art gallery and intelligence agency in German propaganda in the neutral neighbouring countries during the First World War

    In the centre of studies that analyze the processes of transnational cultural transfers, individual agents often figure as artists and patrons or institutions like theatres, museums, publishing companies or galleries. However, intelligence agencies may have developed an important influence as well. The article describes the secret activities of the well known expressionistic Berlin based gallery Der Sturm as one private branch of German propaganda politics during First World War. That private secret news agency, steered by Nell Walden-Rosland, used its image as apolitical art institution to promote covertly specific political contents in Scandinavian and Dutch press that would depict Germany as a cultural power.

     

    Klaus Müller-Wille, CoBrA and Fin de Copenhague – Strategies of cultural decapitation in the milieu of Asger Jorns

    The theme of cultural capitals and the intimately connected ideas of modernity and avant-gardes had been in the centre of critical assertions by the Danish artist Asger Jorn from his early beginnings. The article studies texts from different periods of his production, deriving from his various engagements in groups as CoBrA, the International movement for an Imaginist Bauhaus and The Situationist International. All these endeavors tented to subvert the predominance of cultural capitals and the homogenization of European avant-garde movements. As a counterpoint, specific national traditions are used to enforce the development of art in the Post-war period.

     

    Per Bäckström, Stockholm – Capital of the Nordic Avant-Gardes of the 1960s

    The topic of this article are challenges inherent in writing the history of the Nordic neo-avant-garde. Firstly, I will present a brief outline of the historical situation in which the movement developed in the 1960s, with focus on Stockholm as the cultural capital of the time, and on the international exchange that took place between artists and groups. Secondly, the “art-works” of the neo-avant-garde will be discussed. These can often be characterized as both cross-aesthetic and performative, a fact that articulates certain problems for a historical analysis. I will proceed from the easily describable to more complex issues, in order to illustrate some of the main difficulties for the study of the Nordic avant-garde.

     

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