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On trouve en langue française une poignée d'ouvrages exposant l'histoire de la Hollande, le plus récent étant Histoire des Pays-Bas de Christophe de Voogd (Hatier, 1992; rééd. Fayard, 2003). Les PUF ont donné un Que sais-je? en 1966. En 1932, le provençaliste Salverda de Grave (1863-1947) offrait aux lecteurs d'expression française un petit volume intitulé La Hollande (Rieder, Paris). Quatre ans plus tard, un historien, néerlandais lui aussi, publiait chez Armand Colin une Histoire des Pays-Bas du XVIe siècle à nous jours. Ce petit volume - le n° 188 d'une collection qui se proposait de « Vulgariser sans abaisser » - de H.A Enno van Gelder (1889-1973) comporte un avant-propos de son confrère oranais Henri Hauser (1866-1946), avant-propos qui se termine par ces mots: « Que les compagnons du Taciturne, les patriotes alors révoltés contre le monarque de l’Escorial aient pour fils légitimes les ingénieurs qui, sous nos yeux, transforment en polders la mer intérieure, et aussi les juristconsultes qui ont mérité de voir s’élever à La Haye, le Palais de la Paix, espoir des nations qui veulent la justice, voilà ce que les Français ont besoin de mieux apprendre, comme ils ont besoin d’aller prendre à Java des leçons de politique impériale. »
Peu connu encore, il est pourtant le plus grand écrivain néerlandais, puisque le cerveau où il conçoit ses nouvelles et romans est perché à plus de 2, 10 m du sol. Écrivant depuis ses plus jeunes années, David de Poel – né à Groningue en 1973 – suit son chemin en réalisant peu à peu ses rêves, par exemple celui de fonder une revue dont il serait l’unique rédacteur, un de ceseen- manstijdschriftdont il existe une belle tradition en Hollande :Bedrukt-papiera ainsi vu le jour en novembre 2009, un premier numéro dans lequel l’auteur publie des entretiens avec un éditeur et des confrères dont il admire l’œuvre ainsi que deux nouvelles : l’une évoque de manière hilarante une activité à laquelle David de Poel se livre dans la ville où il réside, Amsterdam : contre quelques dizaines d’euros, l’écrivain vient lire le soir à votre domicile, à l’heure où vous vous couchez – il s’assied près de votre lit, vous berce de sa voix et vous n’avez plus qu’à vous endormir. À moins que vous ne l’ayez fait venir pour autre chose…
En 2004, David de Poel a publié son premier roman :De buitenstaander(L’Exclu). Un garçon prénommé Baldwin nous raconte son existence, entre le moment où sa mère meurt dans un accident (il a environ 6 ans) et la fin de sa scolarité en primaire. Son père s’est assez rapidement remarié ; or, le garçon est brimé et battu par sa belle-mère. Il subit les choses en secret, son père refuse d’ailleurs de regarder la réalité en face. Ses grands-parents projettent de l’aider, mais sa grand-mère meurt à son tour. Comment le garçon peut-il échapper à l’enfer qu’il vit sous le toit familial ? Portée par une belle écriture simple et subtile, cette histoire traite de façon crédible, sans tomber dans le mélodrame, un sujet grave. La cinquantaine de courts chapitres se referme sur une fin ouverte. L’auteur brosse un beau portrait d’une belle-mère psychopathe et d’un père aveuglé par l’amour. Il propose aussi une belle évocation des premiers sentiments amoureux qu'éprouvent des enfants d'environ 10 ans. Un livre pour adolescents et pour les plus grands aussi (il n’a d’ailleurs pas été publié aux Pays-Bas dans une collection jeunesse) auquel David de Poel a donné une suite :Blauwzeer(Blessure bleue, éd. Aspekt, 2007).
illustration : peinture de Barend Blankert,Jeune qui dort
David de Poel a réuni certaines de ses nouvelles dansMannen in pakken, de grootste viezeriken die er zijn(XX uitgevers, 2005), recueil traduit en japonais. Il a par ailleurs rendu hommage à certains écrivains comme Boudewijn Büch– romancier, bibliophile et réalisateur de documen- taires qui aimait faire partager ses passions ou encore sa fascination pour les dodos. En vrai amoureux de la lit- térature de son pays, De Poel a aussi écrit une biographie de l'auteur Frans Pointldont on attend la parution.
Né à Rotterdam en 1974,Ramsey Nasrest écrivain, acteur et réalisateur. Après avoir été durant deux ans « poète officiel » de la ville où il réside, Anvers, il a été désigné, début 2009, et ce pour quatre ans, « poète des Pays-Bas », une fonction qui l’amène à écrire des poèmes sur des sujets de société. C’est l’un de ces poèmes qu’il déclame dans la vidéo ci-dessous : IK WOU DAT IK TWEE BURGERS WAS.
JE VOUDRAIS ÊTRE DEUX CITOYENS
(de manière à vivre avec moi)
et voici mon poème, entrez je vous prie
ne faites pas attention si ça résonne
n’ayez pas peur, allons d’abord dans le vide
bienvenue dans mon cratère de lumière
vous et moi nous sommes déjà rencontrés, vous vous rappelez
alors requinqués, sur la réserve, dans l’éclat d’un verre
nos ombres pareilles à du cristal clair
notre renommée aussi éphémère que l’éclairage
sur la lettre d’une femme étale
nous étions couverts de poussière d’or
blêmes, presque diaphanes de trop aimer
nous fermions les yeux l’un pour l’autre
et aimions faire pénitence
quand on nous demandait comment ça allait
nous répondions conformément à la vérité
nous sommes morts de honte, monsieur
nous étions sacrément convaincus
d’avoir un jour flagellé et cruciverbé
de notre propre initiative
le seigneur chair de notre chair
l’apocalypse était une punition marquée
par avance sur notre rétine
et que s’est-il passé durant ces quelques siècles
pendant que nous tournions la tête de l’autre côté ?
j’aurais aimé vous montrer une patrie achevée
pure aux métaphores menées de bout en bout
pétrir un poème sur vous et moi, mais quand je m’y suis mis
j’ai constaté qu’un peuple balayait
de but en blanc un autre peuple
pareils à deux républiques inconciliables
comment sommes-nous passés aussi vite du futile au fruste
des reflets à cet omniprésente masse criarde
comment ce peuple de 4X4 a-t-il pu surgir de ces chiches chenilles ?
ils disent : parce que dieu a disparu – notre père
ayant décidé de se faire plus invisible qu’il n’était,
voyons si c’est possible, non, impossible
dieu avait fichu le camp
et dans cette nature morte au grand absent
les pays-bas abasourdis se retrouvaient
la gueule encore pleine de corruptibilité
de frivolité et d’une envie de mourir saluée par tous
toute leur vanité se révéla vanité
tous les semblants, la boue chérie, tout ce palais de glaces
que l’on avait pris pour l’infini
était déclaré à jamais inhabitable
on entendait le givre crisser sur leurs âmes
et de ce trou – nous sommes nés
kevin, ramsey, dunya, dagmar, roman et charity
comme par magie nous sommes apparus
sautant à l’élastique, marteau gonflable orange à la main
criant braillant antidépressifs
ou silencieux devant un breezer gangbangé
bienvenue aux pays-bas terre de vacances
oui voilà ce qui arrive, ce peuple c’est ce qui reste
une fois la culpabilité arrachée à nos corps
nous remplissons le vide par un autre vide, rutilant
entre chanteurs de psaumes et avaleurs de pilules
entre l’or et le bling-bling
j’ai trouvé un pays qui a été aboli
ce pays, c’est la vengeance des ancêtres
fureur iconoclaste, ils continuent de fulminer en nous
pourtant il existe bien – de même que le lien
entre le string pour enfants et la burka
entre le petit-lait et le coma éthylique : creux et arrondis
nous emboîtons nos siècles
nous abolir les uns les autres voilà notre force
par nature nous aspirons au vide
tout comme le cyclope cherche l’abîme
voyez-vous, je voulais vous montrer une patrie
non pas ce désert d’infinie liberté
mais c’est bien ici que nous habitons, comme ce serait beau
de voir un jour quelqu’un à l’instar d’une divinité en solde
édifier un pays rime après rime
pour ce peuple en mal de son peuple
voyez la fosse grande ouverte de notre âme
c’est là qu’on pourrait faire quelque chose de grand
commençons par un poème
(trad. D. Cunin)
Œuvres de Ramsey Nasr
27 gedichten & Geen lied, 2000 (poèmes)
Kapitein Zeiksnor & De Twee Culturen, 2001 (prose)
Twee libretto’s, 2002
onhandig bloesemend, 2004 (poèmes)
onze-lieve-vrouwe-zeppelin, 2006 (poèmes)
Van de vijand en de muzikant, 2006 (recueil d'articles)
Homo safaricus, 2008 (journal d'un voyage en Tanzanie)
Tussen lelie en waterstofbom, 2009 (édition rassemblant ses 3 premiers recueils de poèmes)
In de gouden buik van Boeddha, 2010 (journal d'un voyage en Birmanie ou Union du Myanmar)
Ramsey Nasr a également écrit des monologues pour le théâtre, un libretto et des traductions/adaptations de deux opéras de Mozart (dont celle d'Il Re Pastorepubliée dansTwee libretto's)
Grande figure de l'orgue aux Pays-Bas, Jan Zwart (1877-1937) a contribué par ses ouvrages historiques, ses compositions et les pièces qu'il a jouées à la radio à faire connaître son instrument auprès d'un large public. Grâce à lui, l'oeuvre de Jan Pieterszoon Sweelinck a connu un vif regain d'intérêt.
Compositeur hollandais né en 1939 à Utrecht, Louis Andriessen fait ses premiers essais de composition auprès de son père, le compositeur Hendrik Andriessen. Il poursuit ses études avec Kees van Baren, au Conservatoire Royal de La Haye où il obtient le premier prix de composition, puis avec Luciano Berio à Milan et à Berlin. De retour en Hollande, il s’affirme rapidement comme une figure majeure de la musique de son pays tant par ses compositions que par l’interprétation de ses propres œuvres et de celles d’autres compositeurs. Engagé socialement, enseignant la composition au Conservatoire Royal, il contribue à un profond renouvellement de la musique hollandaise. Après avoir expérimenté le sérialisme, la musique d’Andriessen s’est détachée de l’avant-garde des années 1950, pour se référer plutôt au jazz, à Stravinsky – son grand modèle –, au travail rythmique des répétitifs américains, et retrouver une harmonie consonante ou polytonale. (suite)