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Le livre Dirk van Bastelaere propose ici une lecture/relecture de son œuvre au cœur de la postmodernité poétique européenne. Regroupés en séries, ses poèmes se réfèrent au cinéma hollywoodien, à la peinture contemporaine, aux standards du rock, mais aussi, ce qui est plus inattendu, aux figures de la piété christique.
Un essai complète cet ensemble, où Dirk van Bastelaere donne un aperçu de ses talents de prosateur. Usant notamment des écrits et des concepts de Lacan, Barthes, Slavoj Žižek et Julia Kristeva, il définit sa poétique.
Splash !, comme le laisse entendre son titre, est aussi une manière innovante, parfois provocante, de pratiquer la poésie comme une pensée en mouvement, une recomposition et un plaisir à expérimenter.
« Tout comme l’atoll, la poésie historique est une structure toujours plus complexe et plus décentrée qui se construit autour du vide de la Poésie réelle, figurée par la lagune, mais présente de façon immanente, une absence structurellement nécessaire autour de laquelle s’est édifié le récif : telle était plus ou moins ma thèse. »
Né en 1960, Dirk van Bastelaere est l’auteur d’une œuvre importante qui fait débat en Belgique et en Hollande, pays où la poésie a un impact collectif.
splash !
D’une autre façon que du haut
des gratte-ciel le plané
au-dessus du bleu cobalt
des piscines absorbe
une fille en lui qui
s’en revient comme cette même fille huilée.
Pas tout à fait une seconde avant celle
du
splash ! assises petitement sur les corps osseux des autres
et comme l’obscurité qui traîne, les ombres
sous le soleil d’arums
des bras des jambes
des cyprès
voués au déracinement.
(trad. D.C.)
Recueils de Dirk van Bastelaere
(Splash ! présente un large choix des trois derniers titres)
Vijf jaar (1984)
Pornschlegel en andere gedichten (1988)
Diep in Amerika. Gedichten 1989-1991 (1994)
Hartswedervaren (2000)
De voorbode van iets groots (2006)
Wwwhhooosshhh - Over poëzie en haar wereldse inbedding (2001) rassemble des essais de l’auteur dont « Stay back, please. Sur le réel de la Poésie comme traumatisme du poème » repris dans Splash !.
Dans Hotel New Flanders (2008), Van Bastelaere propose, avec Erwin Jans et Patrick Peeters, une anthologie de 60 ans de poésie flamande (1945-2005).
Vol. I de l'édition J. van Mierlo des Lettres de Hadewijch,
Standaard Boekhandel, 1947
texte moyen néerlandais (éd. J. van Mierlo)
God doe v weten lieue kint wie hi es Ende wies hi pleghet met sinen knechten Ende nameleke met sinen meiskenen Ende verslende[n] v in hem Daer de diepheit siere vroetheit es daer sal hi v leren wat hi es Ende hoe wonderleke soeteleke dat een lief in dat ander woent Ende soe dore dat ander woent Dat haerre en gheen hem seluen en onderkent Mer si ghebruken onderlinghe ende elc anderen Mont in mont ende herte in herte Ende lichame in lichame Ende ziele in ziele Ende ene soete godlike nature doer hen beiden vloyende Ende si beide een dore hen seluen Ende al eens beide bliuen Ja ende bliuende.
Lettre IX
Dieu te donne de savoir chère enfant qui il est
Et comment il agit avec ses serviteurs
Et en particulier avec ses jeunes servantes
Et qu’il t’engloutisse en lui
Là où est la profondeur de sa sapience là il t’apprendra ce qu’il est
Et l’incroyable douceur avec laquelle un aimé habite dans l’autre
préface Jacques Sojcher, lecture Vincent Vancoppenolle
Couverture : Theo Van Rysselberghe,
Voilier sur l’Escaut (détail), 1892
O vieille maison blanche en l’étang reflétée,
La douceur répétée
De ce nom, toute enfant, je l’aimais: « Missembourg »
Un son vif, puis un lourd.
Mais le sens de ce nom me fut longtemps mystère…
Jusqu’au jour où mon père,
Rangeant de vieux papiers, pensivement me dit :
« C’est aux temps interdits
Que la maison qui nous abrite fut nommée :
Les églises fermées,
Vers les quatre-vingt-treize, des prêtres proscrits
Ont dit la messe ici. »
Missembourg… Missembourg… chant long, « château des messes »
Tout le passé se dresse…
Marie Gevers (1883-1975) fait partie de ces écrivains flamands qui ont choisi le français pour écrire leur œuvre. Son fils Paul Willems (1912-1997), qui lui succèdera à l’Académie royale de langue et de littérature française de Belgique, fera d’ailleurs de même. Née à Edegem, près d’Anvers, Marie Gevers a passé sa vie dans la grande maison familiale de Missembourg, laquelle sert de cadre à plusieurs de ses livres. Les strophes citées ci-dessus fournissent une des versions relatives à l’origine du nom de la vieille demeure. Outre sonœuvre, elle a laissé un certain nombre de traductions de romans et contes d'auteurs flamands et néerlandais.
Le roman le plus célèbre de Marie Gevers,La Comtesse des Digues(1931) – avec lequelMensen achter de dijk(1949) de son confrère et compatriote Filip de Pillecyn (1891-1962) n’est pas sans présenter des parallèles – offre une merveilleuse évocation d’un coin des Flandres et d’un monde aujourd’hui disparu. Beautés de la nature, métiers d’antan, menaces que font peser les éléments, sentiments qu’éprouve l’héroïne Suzanne tiraillée entre plusieurs hommes dont l’un, le beau et fort Triphon, incarne la nature et un autre, Max Larix, la bourgeoisie cultivée, sont les ingrédients majeurs de cette histoire qui se déroule sur les bords de l’Escaut, le grand amour de l’héroïne : « Elle songeait vaguement que Triphon avait “mangé à la cuisine” avec Jo et que Larix se promenait en quelque sentier boueux. Elle trempa sa main droite dans l’étang, s’amusant du cercle de fraicheur à ses doigts… une bague de fiançailles avec l’eau… parfois à son poignet : “ainsi l’anneau de la chaine qui me retient à l’Escaut”… Puis creusant sa main, elle y ramenait un peu d’eau – l’âme de l’Escaut – et la laissait couler entre ses doigts joints. Elle pêcha ainsi un de ces petits têtards qui pullulent dans les mares : “Je pêche l’âme de l’Escaut dans un trou à brochet… et je ramène une larme noire”. »
La maison de Missembourg
Le mot de l’éditeur
L’histoire intrigante et passionnante d’une femme amoureuse d’un homme et d’un fleuve. Parviendra-t-elle à concilier ces deux amours si différents ? C’est le roman du fleuve, de l’Escaut-roi, du mariage, toujours à préserver, des eaux avec les terres qu’elles irriguent et qu’elles minent. C’est le roman d’une femme attachée au fil des saisons, à la surveillance des digues, au combat d’amour avec l’eau. Mais il arrive que les digues cèdent, que le désir soit plus fort. Alors il faudra que la Comtesse des digues choisisse et qu’elle trouve entre l’homme qu’elle va épouser et le fleuve une nouvelle harmonie.
Sur la langue employée par l’auteur
La Comtesse des Digues– comme d’ailleurs la plupart des œuvres de Marie Gevers –, révèle de diverses façons son appartenance à un espace linguistique bilingue ou même plurilingue. Ce sont évidemment d’abord les nombreux patronymes et toponymes flamands qui enracinent ce texte dans un « terroir » linguistique bien précis, au même titre, d’ailleurs, que les paysages évoqués, les allusions au folklore, à l’artisanat local, à la flore et à la faune. Mais il y a plus : on observe que la langue française tend à s’y faire vernaculaire, accueillante aux expressions populaires en flamand, aux apports lexicaux étrangers dans les mots de la conversation (dag, proficiat, mijn beste), aux interjections en dialecte du pays de Weert. Un rapport dialogique s’instaure même par endroits avec la langue flamande : ce sont ces rapports, en ce qu’ils déterminent les modalités d’émergence d’une langue dans l’autre, qui retiendront surtout notre attention ici car ils constituent à notre avis la véritable histoire de ce texte. (suite)